Les deux preneurs d’otage ont été tués lors de l’opération et le procureur Mehmet Selim Kiraz est décédé deux heures plus tard à l’hôpital.
La police turque a interpellé mercredi une vingtaine de proches du groupe clandestin d'extrême gauche à l'origine de la prise d'otage qui s'est soldée la veille par la mort d'un magistrat et des deux militants qui le retenaient.
Le coup de filet des forces de l'ordre s'est déroulé dans la ville d'Antalya (sud) et a visé 22 étudiants soupçonnés de liens avec le Parti/Front révolutionnaire de libération du peuple (DHKP-C), qui a revendiqué la prise d'otage de mardi.
Selon l'agence de presse Dogan, la police a lancé son raid après avoir reçu des renseignements laissant penser que le DHKP-C préparait d'autres opérations similaires à celle menée au palais de justice d'Istanbul.
Interrogé par Dogan, un avocat des étudiants interpellés a démenti ces allégations.
Les unités spéciales des forces de l'ordre sont intervenues mardi soir contre deux militants armés proches de ce groupe marxiste, connu pour de nombreux attentats commis en Turquie depuis les années 1990, qui retenaient depuis plusieurs heures un magistrat et menaçaient de le tuer.
Les deux preneurs d'otage ont été tués lors de l'opération et le procureur Mehmet Selim Kiraz est décédé deux heures plus tard à l'hôpital, atteint dans des circonstances qui restent à éclaircir de plusieurs balles à la tête et à la poitrine.
Ce magistrat enquêtait sur les circonstances de la mort de Berkin Elvan, un adolescent décédé le 11 mars 2014 après 269 jours d'un coma provoqué par le tir d'une grenade lacrymogène de la police à Istanbul lors d'une manifestation en juin 2013.
Un hommage lui a été rendu mercredi matin au palais de justice de Caglayan, sur la rive européenne de la mégapole turque, devant des centaines de ses collègues magistrats et avocats. "Nous ne t'oublierons pas, toi notre martyr", proclamait une large bannière déployée au coeur de l'immense bâtiment.
Le Premier ministre Ahmet Davutoglu devait assister plus tard à ses obsèques religieuses, selon l'agence de presse progouvernementale Anatolie.
Fermeté
Le chef de la police d'Istanbul Selami Altinok a justifié l'intervention de ses hommes en expliquant qu'elle avait été provoquée par des coups de feu tirés dans la pièce où les deux militants, âgés d'une vingtaine d'années, retenaient leur otage.
"Nous avons fait tout ce qui était possible" pour obtenir leur reddition, a expliqué à la presse Selami Altinok juste après l'opération.
A deux mois des élections législatives du 7 juin, Davutoglu s'est réjoui de l'issue de la prise d'otage. "Cette opération a largement atteint son objectif", a-t-il commenté.
"Nous considérons que cette attaque ne visait pas seulement le procureur Mehmet Selim Kiraz mais aussi la justice, la démocratie et tous les citoyens de Turquie", a ajouté Davutoglu, "personne ne doit douter que nous continuerons à combattre le terrorisme avec détermination et par tous les moyens".
"Ce qui s'est passé n'est pas à prendre à la légère (...) c'est un incident auquel nous devons prêter la plus extrême attention", a de son côté estimé Erdogan.
Selon les médias turcs, le commando exigeait que les policiers à ses yeux responsables de la mort de Berkin fassent une "confession publique" et qu'ils soient traduits devant un "tribunal du peuple".
Aucun policier n'a pour l'heure été formellement mis en cause dans l'enquête ouverte il y a quatre mois par le procureur Kiraz.
En mars 2014, l'annonce de décès de Berkin Elvan, âgé de 15 ans à peine, avait fait spontanément descendre des centaines de milliers de personnes dans les rues de Turquie. De nombreux manifestants ont encore commémoré sa disparition le 11 mars dernier dans tout le pays.
Le cas de Berkin Elvan est devenu un symbole de la violente répression exercée par le pouvoir en 2013 et de la dérive autoritaire que lui reprochent ses détracteurs. Erdogan l'avait publiquement qualifié de "terroriste".