Le Kenya a gelé mercredi les comptes bancaires de 85 personnes et entités suspectées de liens avec les miliciens somaliens shebab.
Les Somaliens, qui subissent eux aussi des attentats shebab, et leurs proches vivant au Kenya se sentent victimes d'une "punition collective", après la fermeture de fait par les autorités kényanes des compagnies de transfert d'argent, indispensables à la survie de beaucoup en Somalie.
Cette mesure "a des conséquences directes pour moi, parce je ne peux pas toucher l'aide que m'envoie ma fille commerçante au Kenya", explique Abdisalm Mohamed, un habitant de Mogadiscio. Pour lui, il s'agit d'"une mauvaise décision qui punit collectivement tous les Somaliens".
Le Kenya a gelé mercredi les comptes bancaires de 85 personnes et entités suspectées de liens avec les miliciens somaliens shebab, responsables de l'attaque du 2 avril contre l'université de Garissa qui a fait 148 morts, dont 142 étudiants. Figurent dans cette liste 14 compagnies de transfert d'argent, dont les activités sont de facto suspendues.
En l'absence de système bancaire en Somalie, livrée au chaos depuis plus de 20 ans, ces transferts sont le seul moyen pour de nombreux Somaliens de recevoir l'aide financière cruciale que leur envoient leurs proches installés à l'étranger, notamment au Kenya voisin, où vit une importante communauté somalienne.
Mercredi, le président somalien, Hassan Sheikh Mohamud, a souligné que le système de transfert d'argent, déjà remis en cause aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne par des réglementations antiterroristes de plus en plus strictes, était "vital pour des millions de Somaliens".
Fermer les agences de transfert "ne fera qu'aggraver la misère de la population victime du terrorisme" shebab, a-t-il estimé.
Chaque année, la diaspora somalienne du monde entier envoie environ 1,1 milliard de dollars en Somalie, un montant largement supérieur à l'aide internationale.
"Il est triste que les mêmes qui sont victimes des shebab ici soient aussi punis à cause des shebab", renchérit Samira Hussein, une Kényane travaillant à Mogadiscio.