23-11-2024 05:22 AM Jerusalem Timing

Stop TTIP: les Européens contre le libre-échange avec les USA

Stop TTIP: les Européens contre le libre-échange avec les USA

Les conséquences catastrophiques ne se limitent pas à la question de l’emploi ou de la croissance. La remise en cause des normes sanitaires dans les produits agroalimentaires pose un véritable problème de santé publique.

L'opinion en Europe est de plus en plus hostile l’Accord de libre-échange entre l’Union européenne et les Etats-Unis (TTIP), certains experts l'interprétant comme une tentative de domination de l'Union européenne par Washington.

Le 18 avril est déclarée la Journée mondiale d'action contre l'Accord de partenariat transatlantique de commerce et d'investissement (TTIP) entre l'Union européenne et les Etats-Unis. Les manifestations de protestation se dérouleront samedi dans 34 pays. Et bien que la Commission européenne ait refusé la création de l'initiative européenne des citoyens (EBI) "Stop TTIP", intervenant contre la mise en place d'une zone de libre-échange UE-USA, quelque 230 organisations de 23 pays d'Europe ont déjà adhéré à cette initiative citoyenne auto-organisée.


Jacques Sapir, économiste, directeur d'études (professeur) à l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales à Paris, a ainsi commenté cette initiative:

"L'Union Européenne et les États-Unis ont engagé depuis maintenant plusieurs années, des négociations pour le Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement (TTIP) appelé aussi TAFTA. Cet accord, qui a fait couler beaucoup d'encre et suscité de violentes polémiques, est supposé être un accord commercial majeur qui devrait intégrer de manière profonde leurs économies et créer une « zone » économique et commerciale importante. Cet accord, il convient de le souligner, est négocié dans une absence totale de transparence, qu'il s'agisse du mandat réel de négociation ou des négociations elles-mêmes.

Les défenseurs du TTIP soutiennent l'idée que ce traité stimulera la croissance en Europe et aux États-Unis. De fait, les prévisions qui sont avancées par la Commission Européenne, mais aussi par des bureaux d'études (comme le CEPII ) annoncent des gains qui sont considérés comme politiquement significatifs. En fait, ces gains apparaissent comme négligeables , en termes de PIB et de revenus des particuliers dès que l'on cherche à les estimer avec des instruments fondés sur des méthodologies réalistes. De plus, on peut paradoxalement constater que ces prévisions montrent aussi que tout le bénéfice lié au traité se ferait aux dépens des échanges intra-européens et va entrainer une forte hausse du chômage dans l'Union Européenne. Le traité remettrait donc en question le processus d'intégration économique européenne ce que tendent à démontrer des modèles du Modèle des politiques mondiales des Nations Unies (GPM) .


On mesure alors les conséquences potentiellement catastrophiques du TTIP pour l'Europe. Par ailleurs, ces conséquences catastrophiques ne se limitent pas à la question de l'emploi ou de la croissance. La remise en cause des normes sanitaires dans les produits agroalimentaires pose un véritable problème de santé publique. Enfin, les procédures d'arbitrages prévues par le TTIP créent un cadre léonin et sont de véritables scandales au regard des principes de la souveraineté nationale. On est très loin des perspectives que semblaient promettre à l'économie mondiale le modèle utilisé par le CEPII ou par le CEPR. Ces modèles ont montré, en particulier lors des précédentes négociations (en 2003) qu'ils ne réunissaient pas les critères minimaux d'acceptabilité tant au niveau scientifique que politique. En fait, l'absence de prise en compte des coûts de la libéralisation des échanges rend les résultats de ces modèles suspects. Les travaux tentant d'estimer ces coûts indiquaient que ces derniers étaient loin d'être négligeables. On peut donc en conclure que le libre-échange n'a nullement favorisé les plus pauvres parmi les PVD. Il n'y a donc nulle « justice » dans le domaine du commerce international.


Cette expérience rend d'autant plus insupportable l'absence de transparence qui prévaut actuellement tant sur le mandat que sur les négociations elles-mêmes et qui caractérise l'Union européenne. De ce point de vue, la légitimité de cet accord ne saurait exister tant que cette absence de transparence continuera de se manifester et tant qu'un débat honnête, centré sur des outils réalistes, n'aura pas eu lieu quant aux conséquences de cet accord."

Sputnik