Le site de la chaine américaine arabophone alHorrat a publié une interview faite avec le fameux tweeter saoudien Moujtahed et dans laquelle il n’a pas ménagé l’Arabie-saoudite..
Le site de la chaine américaine arabophone alHorrat a publié une interview faite avec le fameux tweeter saoudien anonyme, connu sous le pseudonyme Moujtahed et dans laquelle il a dénoncé l’absence de réformes, l'incapacité de la famille régnante à gérer les affaires du royaume, les changements qui vont certainement frapper à la porte du royaume..
Quelques extraits de l’interview rapportés par la chaine satellitaire iranienne alAlam:
AlHorrat : Certains lie votre nom au chef du Mouvement islamique pour la réforme, le Dr Saad al-Faqih, tandis que d'autres voient en vous un proche collaborateur de la famille royale en raison de la qualité des informations que vous publiées. Qui est exactement Moujtahed ?
Moujtahed : les spéculations sur Moujtahed sont nombreuses, toutes les questions sur l’identité de Moujtahed ne peuvent obtenir de réponses.
AH : quand le compte Twitter de Moujtahed deviendra-t-il une personnalité saoudienne réelle ?
M: quand un mouvement réel de changement sera entamée et quand j’estimerai qu’il est dans l'intérêt général de changer de rôle, alors oui mon rôle changera.
AH : Dans vos tweets vous réclamez des réformes en Arabie Saoudite, comment estimez-vous les changements initiés par le défunt roi Abdallah et poursuivis par le le roi actuel Salman bin Abdel Aziz?
M: De quelles réformes vous parlez ?!
AH : Par exemple la participation des jeunes dans les institutions gouvernementales et politiques, notamment le prince héritier et le successeur du prince héritier font partie de la jeune génération. N’est-pas une partie de la réforme que vous exigez?
M: Peut-on qualifier ses réformes de réformes politiques ? Aucun changement n’a touché le pouvoir absolu des al-Saoud , ni dans leur immunité absolue, ni dans le manque de transparence de leur gouvernement, encore moins dans la dépendance de la justice , dans l'absence de liberté d'expression, de liberté de rassemblements. Au contraire les choses ont évolué vers le pire . Sous le règne du roi Abdallah des lois ont été émises criminalisant les médias de communication et les réseaux sociaux s’ils écrivaient dans un sens contraire à la politique de l’ État, il n'y a eu aucun changement dans la lutte contre la corruption des entreprises publiques financières et administratives qui sont un excellent moyen de vols pour les hauts-responsables saoudiens ..
AH : Oui, mais l’Arabie finance plus de 150 000 boursiers d'études à l'étranger, n’ont-ils pas un rôle dans les réformes?
M: Ce nombre de boursiers est une preuve d’échec et non de réforme, si l'État cherchait à réformer il aurait du multiplier les universités en utilisant la rente pétrolière, mais aujourd'hui il ne peut pas accueillir des centaines de milliers d'étudiants, c’est un scandale! Nous envoyons des boursiers en Jordanie et au Pakistan, vous vous rendez compte de la gravité de la situation.
Les grandes villes manquent de réseaux d'eau potable, la population se voit forcée d’attendre dans de longues files à Jeddah autour de camions-citernes qui transportent de l’eau.. et vous me parlez de réformes?!
Nous n’avons pas de services, ni d’universités, ni d’armée, ni de responsabilité politique, ni de transparence, ni libertés… où sont les réformes ??
AH : À votre avis les réformes ne doivent avoir lieu qu’au sein de la famille régnante sinon il n’y aura pas de réforme? Autrement dit, réforme de la famille ou réforme de la nation?
M: le problème de la famille régnante c’est qu’elle ne peut être réformée, car toute véritable réforme dans le sens de la participation politique, la responsabilisation, la transparence et l'indépendance de la magistrature signifie une révolution du peuple contre elle, un peuple qui peut traduire en justice les princes.
Or, ces derniers sont parfaitement conscients de cela, c’est pourquoi ils refusent la libération des prisonniers politiques sans conditions, parce que leur libération octroie à l’opposition une certaine immunité en ce sens que cette dernière osera mettre en cause la politique de la famille régnante, puis déclencher un renversement par une révolte populaire.
Comment est-il possible que les Saoud permettent la liberté d'expression et celle de manifestation s’ils savent que la première de ces libertés est de dénoncer Mohammed ben Nayef et Mohammed ben Salman.
AH : Est-ce que cela signifie que Moujtahed en appelle à une révolution contre les Saoud et à descendre dans les rues?
M: Moujtahed se contente de relater les faits, car le peuple, ses différentes personnalités notables et ses militants doivent profiter de ces faits afin de pouvoir réaliser combien ils sont marginalisés et donc agir en conséquence.
Si le peuple est capable de se révolter, il se révoltera sinon, ce n’est pas Moujtahed qui pourra l'inciter.
AH : Comment la jeunesse saoudienne réagit à vos tweets? Croyez-vous au pouvoir des réseaux sociaux pour changer?
Moujtahed: Pas seulement la jeunesse saoudienne, tout ceux qui peuvent lire mes tweets sont intéressés par ce que j’écris, car mes tweets ont gagné une grande crédibilité.
D’ailleurs, mes sources au ministère de l'Intérieur me rapportent que mes tweets sont entrain de former une opinion publique réelle, à tel point que les agents du ministère en question sont chargés de me surveiller 24 heures/24 et de lancer des campagnes de diffamation contre mes tweets afin de nuire à ma crédibilité. Car mes tweets nuisent à l’image de la famille royale, mais pour que ces tweets opèrent un changement, il faut que l’opinion publique les exploitent, les tweets ne forment pas un changement.
AH : Recevez-vous des messages de la part de citoyens saoudiens?
Moujtahed: Je reçois beaucoup de messages par e-mail, et bien sûr il y a ceux qui m’insulten, ceux qui m’encouragent, ceux qui exigent plus, ceux qui réclament des manifestations, et ceux qui publient leur histoire.
Suite au succès de l'expérience, j’ai attiré d'autres sources d'information, et bien sûr il y a les malhonnêtes qui m’ envoient de fausses informations ou qui tentent d’infiltrer mon compte.
AH : Après cette expérience, que planifiez-vous pour l’avenir?
Moujtahed: Je compte mettre en place un site web pour Moujtahed pour ceux qui souhaitent accéder à des informations plus facilement, le reste dépend du peuple et des militants et comment ils comptent exploiter les faits que je rapporte pour changer la situation.
AH : Comment envisagez-vous l'avenir du peuple saoudien?
Moujtahed: la famille régnante avec Mohammed bin Salman survivra au plus deux ans, car les divergences au sein de la famille et les défis régionaux sont dangereux et risquent d’anéantir les Saoud, le peuple risque de souffrir et traversera une période chaotique , mais il sera en mesure de se réorganiser.
AH : Êtes-vous optimiste quant à l'avenir de l'Arabie Saoudite avec tous les changements qui ont lieu au sein de la famille royale?
Moujtahed : Ni optimiste, ni pessimiste. Mes prévisions sont fondées sur la connaissance de la réalité, les Saoud ne possèdent pas la capacité de rester au pouvoir avec le mécanisme actuel dans leur gestion des affaires du pays.