23-11-2024 11:09 AM Jerusalem Timing

Après la chute de Ramadi, les problèmes de l’armée irakienne refont surface

Après la chute de Ramadi, les problèmes de l’armée irakienne refont surface

Papier d’angle de l’AFP qui n’évoque nullement la responsabilité des USA dans la faiblesse de cette armée

Le pouvoir irakien s'est indigné des accusations américaines sur le manque de volonté de ses soldats de combattre les jihadistes à Ramadi, mais des failles dans le commandement militaire et les faibles moyens expliquent en partie leur retraite chaotique de la ville.
   
Alors que l'organisation jihadiste Etat islamique (EI) s'est emparée le 17 mai de Ramadi, le secrétaire américain à la Défense Ashton Carter a regretté dimanche que l'armée irakienne n'ait "pas montré de volonté de se battre".
   
Cette déclaration a déclenché une salve de critiques en Irak, et le vice-président américain Joe Biden s'est empressé de téléphoner lundi au Premier ministre irakien Haider al-Abadi pour saluer "le courage et l'énorme sacrifice de (ses) soldats" face à l'EI.
   
Capitale de la province d'Al-Anbar, Ramadi avait résisté pendant des mois aux assauts des jihadistes qui l'ont finalement conquise le 17 mai après une vaste offensive et une retraite chaotique des forces irakiennes. Sa perte a constitué l'un des revers les plus importants pour Bagdad et l'allié américain.
   
"Les forces irakiennes qui ont quitté Ramadi l'ont fait sous grande pression et seulement en dernier recours", a affirmé le cabinet de consultants Soufan Group intelligence. "Ce n'est pas de bravoure dont les forces ont manqué mais d'armes, de leadership et de logistiques rapides".
   
  'Abandonnés sur une base'

Ahmed al-Fadhily a décidé de combattre l'EI, qui s'est emparé depuis 2014 de pans entiers d'Irak. Mais il a préféré quitter l'armée et rejoindre la coalition de forces chiites, les Unités de Mobilisation populaires (Hachd al-Chaabi en arabe), qui aide les forces gouvernementales face aux jihadistes.
   
"Quand j'étais dans l'armée, nous n'obtenions jamais de munitions. Parfois, nous étions comme abandonnés sur une base sans ravitaillement", raconte-t-il.
"Nous savions que personne ne ferait de sacrifices pour nous secourir. (Mais) c'est différent dans les Hachd al-Chaabi, les combattants y ont la foi".
   
Les Hachd al-Chaabi, soutenus par l'Iran, sont seulement nominalement sous le contrôle du Premier ministre.
"Nous combattons pour protéger notre terre de Daech (un acronyme en arabe de l'EI), tandis que la plupart des soldats et officiers travaillent pour recevoir un salaire", accuse Ahmed al-Fadhily.
   
La corruption est un fléau au sein des forces de sécurité en dépit des récentes mesures gouvernementales pour le combattre.
   
L'effondrement des cours de pétrole, principale source des revenus publics, et les dépenses générées par la guerre antijihadistes ont vidé les caisses de l'Etat. Résultat: des membres des forces de sécurité n'ont pas été payées depuis des mois alors que de hauts officiers corrompus s'enrichissent, assurent policiers et soldats.
   
L'Irak paie toujours le prix de la campagne de débaassification du pays, qui a suivi le renversement en 2003 du régime de Saddam Hussein par une coalition dirigée par les Etats-Unis, de nombreux anciens commandants, parmi les mieux entraînés du pays, avaient rejoint les rangs des rebelles jihadistes.
   
En 2014, les Etats-Unis ont déployé des milliers de conseillers militaires pour aider l'armée irakienne.
Mais transformer ce qui était encore décrit il y a peu comme une "armée de check-points", moquée et composée de hordes de soldats, en une force plus efficace et professionnelle ne peut pas être réalisé en une nuit, ou même en quelques mois, estiment des experts.
   
La célèbre "Division Dorée", entraînée par les Américains, s'était démarquée depuis l'offensive jihadiste, enregistrant des succès sur plusieurs fronts. Mais elle est épuisée, et selon des informations, elle s'est repliée comme les autres unités à Ramadi.
   
 Régime faible, armée faible

Les tactiques extrêmement agressives de l'EI, dont les attaques suicide avec des camions blindés piégés, ont aussi influé sur le comportement des soldats.
   
L'expert irakien Ahmed Ali a affirmé que les critiques de M. Carter étaient "surprenantes" mais il a admis que la liste des désagréments dont pâtit l'armée est longue.
   
"Des problèmes logistiques, un commandement faible, manque de coordination entre unités, déficit en terme de renseignements et difficulté à sécuriser les lignes d'approvisionnement", cite-t-il.
   
A Ramadi, certaines forces se sont retrouvées soudainement encerclées par l'EI, alors que des unités paniquées se sont retirées sans avertir les autres, ont raconté des combattants à l'AFP.
   
Pour Sarmad Al-Taei, éditorialiste au journal indépendant Al-Mada, les performances de l'armée reflètent la faiblesse des dirigeants. "Personne n'a confiance dans l'administration politique, ni ses opposants ni même ses partisans".
   
Il compare l'armée au secteur public, pléthorique et inefficace. "Les Hachd sont comme le secteur privé, qui fonctionne toujours mieux. Ils sont soutenus par l'Iran, un Etat fort et organisé (...) Les armées idéologiques ont toujours été le substitut naturel des armées faibles et vaincues".