A Herzlia, des dirigeants sécuritaires et militaires israéliens, ont voulu fêter la fin de la menace existentielle.Mais...
Jamais Israël ne s’est senti dans une aussi bonne position stratégique. Selon ce qu’affichent ses dirigeants militaires et sécuritaires, réunis en grande pompes dans le cadre de leur rencontre sécuritaire annuelle organisée à Herzlia.
La raison principale de cet engouement est que ces dirigeants estiment que la conjoncture régionale actuelle sert les intérêts de leur entité.
Celle surtout que les armées arabes sont démantelées, ou affaiblies par les groupuscules wahhabites takfiriste issus d’Al-Qaïda. Cette évaluation concerne l’armée syrienne en particulier.
L’analyste militaire Alone Ben David qui s’expliquait pour la 10ème chaine israélienne en est persuadé : « Sur le plan stratégique, la Syrie est en train de se disloquer et il n’y a plus d’armée forte sur nos frontières, d’autant que nous considérions dans le passé l’armée syrienne comme une menace existentielle. Il n'y a plus de menace existentielle ».
Le danger classique balayé
Le discours prononcé par le ministre israélien de la guerre Moshé Yaalone verse dans la même approche.
Le danger classique a bel et bien été balayé, estime-t-il en expliquant que les ennemis d’Israël « ont désespéré des moyens terroristes alors que le danger d’une invasion de la part des armées arabes n’existe plus ».
« Et nous avons trouvé une solution pour faire face aux instruments du terrorisme et des roquettes, même si elle n’est pas absolue », poursuit-il en allusion sans doute au Dôme d’acier.
L'intérêt d’Israël dans l’instabilité régionale
Autre source de sa satisfaction : elle réside dans « l’instabilité chronique », telle qu’il l’a décrite, et qui « va accompagner le Moyen Orient dans les prochaines années, on ne sait jusqu'à quand ».
Cette instabilité qui tourne d’après lui autour de la scission entre chiites et sunnites, qu’il explique dans les termes suivants. « La question se résume en un conflit d’hégémonie régional entre sunnites et chiites, dans lequel l’Iran conduit le camp chiite radical et soutient Assad en Syrie et les Houthis au Yémen, les chiites au Bahreïn et le Hezbollah ».
Quant au camp sunnite, il le perçoit comme étant « divisé entre le camp des Frères Musulmans soutenus par le Qatar et qui participent dans la coalition qui attaque Daesh en Syrie, et les Houthis dont la pensée s’oppose au camp sunnite arabe ».
Aucune allusion ni de près ni de loin ni à l’Arabie saoudite, ni à la Turquie, ni à Israël non plus. L’effort pour occulter ces acteurs plus que flagrants serai-il l’indice de leur parfaite complicité.
« Pas de compromis, de mon vivant »
Autre indice de cette assurance israélienne : pas besoin de faire des concessions sur l’Etat palestinien.
Alors que les dirigeants saoudiens s’attellent à persuader leurs homologues israéliens d’accepter le plan de paix qu’ils ont sponsorisé, (lequel renonce aux territoires Palestiniens de 1948 et se contente de ceux de 1967 pour l’État palestinien (avec toutes les modifications exigées par les Israéliens), Yaalone n’a de cure de déclarer qu’il ne s’attend pas à de compromis de son vivant et qu’il compte vivre longtemps (sic).
Il semble persuadé qu’il n’a pas besoin de faire cette concession à l’Arabie pour vaincre son amitié, car elle lui est acquise dès lors qu’elle a décidé que c’est l’Iran son ennemi numéro un.
Et pour se disculper, rien de plus facile pour Yaalone d’accuser l’Autorité palestinienne d’être responsable de l’échec des négociations depuis 15 ans. Ses prédécesseurs avaient fait le même coup pour le défunt Yasser Arafat.
La satisfaction dans la division des palestiniens
Justement la satisfaction de Yaalone se trouve amplifiée lorsqu’il parle de la situation des Palestiniens.
Concernant la Bande de Gaza, elle « dépend désormais totalement de l’Etat d’Israël. La route de l’Égypte étant fermée, même les tunnels, et la seule issue de Gaza vers le monde étant à travers nos chemins ».
Pas du tout attristé ou inquiété que Daesh entre en jeu dans cette région, pour rivaliser avec le Hamas, il se ravit à rappeler que la division inter palestinienne entre le Hamas dans la bande de Gaza et l’autorité palestinienne en « Judée et Samarie », en allusion à la Cisjordanie est leur décision.
« Nous ne voulons pas qu’ils votent à la Knesset », conclut-il dans ce qui devrait être un message adressé aux Palestiniens de 1948 qui ont obtenu 10% des vois durant le dernier suffrage.
Syrie: le Nosra, Daesh, Iran, le Hezbollah
Sur le front syrien, il voit la situation de la façon suivante : « Les éléments du front al-Nosra vont nettoyer la région des combattants de Daesh. Parce qu’ils ne sont pas d’accord sur le futur de la Syrie. »
D’après lui, « la politique d’Israël concernant ce qui se passe dans la région est de ne pas intervenir ». Une allégation qui ne saurait passer, sachant que tout le monde, y compris les Nations Unies, connaissent parfaitement les liens étroits avec le Nosra et Cie, et dont il parle comme un salvateur !
Mais il voit aussi que c’est l’Iran qui est l’élément maitre en Syrie, et non plus Bachar al-Assad, tandis que le Hezbollah se trouve sur le front de guerre « noyé dans les combats », selon ses allégations, « et perdant plus de 1000 de ses combattants », selon ses chiffres.
En revanche, sur l’accord nucléaire avec l’Iran, la note de Yaalone semble moins optimiste, mais aussi alarmiste. Le qualifiant de « vraiment mauvais », posant un point d’interrogation sur l’éventualité de sa signature le 30 juin prochain, et regrettant que « le protagoniste occidental y soit très impliqué», il se plait à voir qu’il permettra à l’Iran d’être « à la limite du nucléaire,…, pour progresser et fabriquer la bombe atomique un an après en avoir pris la décision ».
L’industrie militaire de l’Iran dans le collimateur
Force est de constater durant le Herzlia de cette année : le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a trouvé une nouvelle accusation pour force la pression sur l’Iran, évitant pour la première fois de mettre en garde contre son programme nucléaire.
« L’Iran dispose dans le domaine de l’industrie militaire de 50 mille personnes qui fabriquent des armements sophistiqués et précis, qui pourraient poser problème : des sous-marins, des satellites, et toutes sortes d’armements », a-t-il déploré.
Qualifiant le rythme du travail iranien dans ce domaine de très rapide, il a signalé que Téhéran n’a toutefois pas assez de fond pour le développer davantage, raison de plus de ne pas conclure d’accord avec lui , car il lui procurerait « beaucoup d’argent , sa caisse serait pleine peut-être par des centaines de milliard de dollars ce qui va alimenter ses actions agressives », d’après ses termes.
Oui, mais les roquettes du Hezbollah
Parmi les intervenants de Herzlia qui ont vanté la stabilité retrouvée, figure le directeur du département de sécurité politique au ministère israélien de la guerre, Amos Gilad selon lequel la situation sécuritaire « n’a pas été aussi bonne depuis bien des années », excluant l’éventualité d’un « été chaud », cette année. « Car les facteurs de dissuasion l’emportent sur les éléments de menaces», selon ses propos.
N’empêche que Gilad n’a pas fini de compter les missiles et roquettes chez le Hezbollah, 100 mille d'après lui, ce qui le rend « la seule menace stratégique » d’Israël au Moyen Orient.
A Herzlia cette année, des dirigeants sécuritaires et militaires israéliens, ont voulu fêter la fin de la menace existentielle. A la veille de la guerre 2006 contre le Liban, ils étaient persuadés de la même chose.