Craintes de la sortie de la Grèce de la zone euro. Les banques fermées jusqu’au 6 juillet, retraits limités à 60 euros/jour.
Après le refus des créanciers de prolonger l'aide financière au-delà du 30 juin, le Premier ministre grec Alexis Tsipras a annoncé dimanche soir la fermeture des banques et l'instauration d'un contrôle des capitaux, tandis que les marchés asiatiques se repliaient lundi, plombés par les craintes de voir Athènes sortir de la zone euro.
A la mi-journée, Tokyo perdait 1,78%, Sydney cédait 1,81%, Séoul 1,45%, Taipei 1,90% et Hong Kong 1,76%.
Les Bourses continentales chinoises, qui avaient subi une dégringolade spectaculaire vendredi --plus de 7%--, ont quant à elles connu un bref sursaut avant de repartir à la baisse.
En Grèce, les retraits aux guichets automatiques seront jusqu'au 6 juillet limités à 60 euros par jour, selon un arrêté sur le contrôle des capitaux publié au journal officiel grec dans la nuit de dimanche à lundi.
Le texte, signé par le président de la République Prokopis Pavlopoulos et M. Tsipras, fait état "du caractère d'extrême urgence et de la nécessité imprévue de protéger le système financier grec et l'économie grecque en raison du manque de liquidité entraîné par la décision de l'Eurogroupe du 27 juin de refuser l'extension de l'accord de prêt à la Grèce".
La Bourse d'Athènes devait aussi rester fermée, au moins lundi, selon une source proche du dossier.
Les touristes séjournant en Grèce -- le tourisme est un moteur vital de l'économie -- et toute personne possédant une carte de crédit émise dans un pays étranger, ne seront pas concernés par les mesures de limitation des retraits, a indiqué le gouvernement.
Tirant les conséquences de l'émoi provoqué par son annonce de référendum, M. Tsipras était apparu dimanche soir à la télévision pour notamment inviter la population à garder son sang-froid.
M. Tsipras a expliqué que le refus de l'Eurogroupe (les ministres des Finances de la zone euro), samedi, de prolonger le programme d'assistance à son pays au-delà du 30 juin "a conduit la BCE à ne pas augmenter la liquidité des banques grecques et a contraint la Banque de Grèce à activer les mesures de fermeture provisoire des banques et de limitation des retraits bancaires".
Le Premier ministre, omettant de citer parmi les causes de cet émoi sa soudaine annonce, dans la nuit de vendredi à samedi, d'un référendum, a assuré d'un ton ferme que "les dépôts des citoyens dans les banques grecques sont absolument garantis", tout comme le versement des salaires et des retraites.
Demande d'une prolongation du programme d'aide
Alexis Tsipras a également dit avoir reformulé dimanche auprès de l'UE et de la BCE la demande de la Grèce d'une prolongation du programme d'aide dont elle bénéficie.
Cette fois, la requête a été adressée au "président du Conseil européen et aux 18 dirigeants des Etats membres de la zone euro, ainsi qu'aux présidents de la BCE, de la Commission et du Parlement européen.
"J'attends leur réponse immédiate à cette requête démocratique de base", a-t-il ajouté dans son allocution télévisée. "Ce sont les seuls qui peuvent le plus rapidement possible, et même ce soir, renverser la décision de l'Eurogroupe et donner la possibilité à la BCE de rétablir le flux des liquidités des banques", a-t-il déclaré.
Signaux positifs des créanciers
La mise en place d'un contrôle des capitaux avait été redoutée tout le week-end, et les distributeurs de billets grecs ont été mis à sec.
Hors de Grèce également, la préoccupation du +cash+ se faisait plus pressante. Plusieurs pays, dont l'Allemagne, ont encouragé leurs ressortissants qui se rendent en Grèce pour les vacances à partir avec beaucoup d'argent liquide.
Cependant, les créanciers ont envoyé dimanche des signaux positifs.
D'abord, la Banque centrale européenne, qui a donné un répit à la Grèce en maintenant intact le plafond de fourniture de liquidités d'urgence aux banques grecques, alors qu'on craignait qu'elle leur coupe les vivres.
Le Commissaire européen Pierre Moscovici a aussi répété sur Twitter le mantra de la Commission : "la porte est toujours ouverte" pour négocier.
Son patron Jean-Claude Juncker a, quant à lui, tweeté le texte de la proposition des créanciers "pour l'information du peuple grec", laissant entendre en creux que, si les électeurs approuvent ces propositions, il sera encore temps de s'entendre.
M. Juncker doit donner une conférence de presse lundi à 10H45 GMT.
Le Premier ministre français Manuel Valls a exhorté les Grecs à "revenir à la table des négociations" et appelé à "tout faire" pour que la Grèce reste dans l'euro.
Quant au FMI, il a fait savoir qu'il restait prêt à "apporter son aide".
De son côté, le ministre grec des Finances Yanis Varoufakis a estimé dimanche qu'il appartenait maintenant "aux institutions (UE, FMI et BCE) de montrer leur bonne volonté" tout en se disant ouvert à de nouvelles négociations pour parvenir à un compromis in extremis.
Mais les marchés financiers, souvent prompts à des réactions très volatiles, risquent de mal prendre ces nouveaux rebondissements et la journée de lundi pourrait être mouvementée.
"Si vous me demandez si (les marchés) sont prêts à ce qui est en train de se passer en Grèce, je vous réponds que non : ils ne prévoient, dans leurs évaluations, aucun risque", a déclaré dans un entretien avec La Stampa publié dimanche l'économiste de l'OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) Catherine Mann.
L'annonce du contrôle des capitaux n'a pas assommé les Grecs, qui s'y attendaient. Yiannis Grivas, enseignant, qui avait pris la précaution de retirer son salaire de 940 euros vendredi "n'avait pas peur d'un contrôle des capitaux", car "il ne retire jamais plus de 50 euros par jour...".
Avec AFP