23-11-2024 09:06 AM Jerusalem Timing

L’échec de la prise d’Aden: vers les choix stratégiques

L’échec de la prise d’Aden: vers les choix stratégiques

"les émiratis ont déterminé le jour J de leur opération de libération d’Aden le même jour que celui de la signature de l’accord nucléaire entre l’Iran et les 5+1".

Il ne fait aucun doute que la coalition saoudienne a échoué dans ce qu’elle appelle la libération de la ville d’Aden . La preuve , c'est qu' Abed Rabbo Mansour Hadi n'a pas effectué la prière de la fête d’al Fitr à Aden, comme l'ont annoncé les médias pro-saoudiens avant le déclenchement de la bataille..


Or, non seulement ce dernier n’a pas pu se rendre à Aden mais en plus  les autorités yéménites ont confirmé la semaine dernière, que la plupart des régions du sud de la ville sont encore sous le contrôle de l'armée et des «comités populaires», alors que les combats se poursuivent de plus bel autour de l'aéroport,  divisé en deux sections entre les deux belligérants. Autrement dit,   les premiers jours de l’attaque contre Aden, parrainée par les Émirats arabes unis, ont suffi pour montrer que toutes les allégations «de la libération d’ Aden» ne sont que des victoires fictives à but médiatique..


Mais encore..


Dans les récentes négociations qui ont eu lieu dans la  capitale omanaise Mascate, les médiateurs de la coalition saoudienne ont demandé au mouvement Ansarullah d’annoncer « un retrait  médiatique » de la province méridionale d'Aden juste pour sauver la face. Une demande confirmée par des sources proches des négociations secrètes, trois mois après le début de l'agression.


Certes, il ne s’agit pas de  la première concession saoudienne, car  Riyad  est conscient du bourbier dans lequel il s’est embourbé.  Ainsi, l’Arabie a considérablement réduit ses  exigences ces derniers mois, à commencer par l'acceptation de la sortie de l'armée et des forces du mouvement d'Aden, plutôt que de se retirer de toutes les villes yéménites, en échange de l'arrêt de la campagne militaire.


Mais, quand l'Arabie saoudite a constaté que toutes ses demandes étaient rejetées, elle a recouru à sa machine médiatique afin de convaincre l’opinion publique arabe qu’elle a remporté des victoires sur le terrain à Aden , allant jusqu’à annoncer   le retour imminent du président démissionnaire Abed Rabbo Mansour Hadi à Aden pour effectuer la prière de l'Aïd al-Fitr, mais au lieu de cela, ce sont deux ministres qui ont réussi à retourner  à Aden et encore..

L'échec du plan émirati

Au milieu du mois dernier, les médias de la coalition saoudienne ont  annoncé la libération très proche d’Aden,  faisant la propagande d'un plan de libération de la ville : une opération militaire dirigée par une unité militaire d’élite émiratie composée de 60 officiers. Cette force a fait du district d’alBariqa son QG , un district contrôlé par  l'organisation «alQaida» et par les forces salafistes. De même, une unité spéciale saoudienne s’est installée tout prés du siège de l’EAU, chargée de la logistique et de l'intelligence.


Dans un premier temps, les forces émiraties ont opéré en  coordination avec les factions armées, assurant la distribution des armes et de l’argent.  Dans le même temps, un millier de combattants yéménites  formés en Arabie saoudite  ont été transportés à Aden.


L’attaque contre la deuxième plus importante ville yéménite aurait du commencer il y a 20 jours  sauf que  l’une des unités  de reconnaissance émiraties a été démasquée par l'armée yéménite à Dar Saad provoquant la mort de l'un des officiers émiratis.  Les autorités émiraties ont prétendu que cet officier était  tombé sur la frontière yéméno-saoudienne.


Cela dit, les émiratis ont poursuivi leurs préparatifs pour exécuter leur plan d’attaque et ont  fait venir plus de renforts, pour enfin déterminer le jour J de leur opération qui a été prévu le même jour de la signature de l'accord nucléaire entre l'Iran et l'Occident. Ce jour-là, l'un des navires de guerre amarré dans le port d’alBariqa a déchargé 150 véhicules militaires, sans compter 1000 nouveaux combattants yéménites formés en Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis.


Les factions armées pro-coalition étaient prêtes à la bataille, attendant le signal. Et donc, quelques jours avant le début de l’attaque, les takfiristes d’alQaida ont pris d’assaut le siège du gouvernement d’ Aden, et ont égorgé 30 soldats de l'armée yéménite , traînant leurs corps dans les rues d'Aden, puis ils ont remis l’ après-midi le siège gouvernemental aux groupes armés pro-Hadi.


L'attaque a commencé à l'aube mardi dernier, les groupes armés se sont rués contre les positions de l’armée yéménite, soutenus par les chasseurs saoudiens qui ont effectué plus de 200 raids  sans compter les navires de guerre en mer qui ont visé les positions de l'armée et celles des «comités populaires». Au début, l’attaque a réussi à réaliser des percées à  l'aéroport international d'Aden et dans la zone de Khor Maksar et Al-Arish, où les militants ont pris le contrôle de certains quartiers, sans pour autant parvenir à s’installer.

 

L’étape des choix stratégiques du mouvement Ansarullah


Le même après-midi, l'armée a réussi à absorber ce qu’on appelle dans le jargon militaire "le choc". Et donc, elle a contre-attaqué, d’abord en paralysant la progression des groupes armés au point de les forçer à se retirer de certains points stratégiques et ensuite  en les empêchant d’installer des bases ou de garder les positions qu’ils ont gagnées. 

Le deuxième jour, l'armée et  les comités populaires  ont effectué diverses attaques rapides  contre les lieux de regroupements des groupes armés et les ont  expulsé de tous les points vitaux qu'ils avaient réussi à s’emparer via leurs percées..y compris l'aéroport.


A noter, que la participation des forces émiraties dans cette attaque  ne faisait plus aucun doute tout simplement parce que  l'armée et les «comités populaires» ont révélé l'arrestation d'un certain nombre d'entre eux.

L'agence d’information émiratie avait  par ailleurs confirmé, jeudi dernier, la mort d’un soldat des EAU dans la bataille d’Aden : une reconnaissance officielle de la participation des troupes étrangères dans la guerre.


Depuis le déclenchement de la bataille d’Aden, les médias saoudiens ont déclaré que Hadi et son gouvernement «vont effectuer la prière de l'Aïd à Aden». Voire, le  chef du gouvernement sortant yéménite, Khaled Bahah, a affirmé , dans la journée d'avant-hier, « la libération d’Aden » alors que seulement  deux ministres du gouvernement sortant se sont rendus  à la ville, le ministre de l'intérieur et celui du le transport, accompagnés de responsables de la sécurité. Ils ont quitté Riyad pour l'Érythrée d’où ils se sont rendus à Aden, en empruntant la voie maritime .

De leurs côtés,   les médias pro- saoudiens ont prétendu qu’ « Aden était sécurisée après sa libération et qu’elle entamait maintenant le processus de reconstruction », ajoutant que" les batailles de Libération se déroulaient uniquement dans les gouvernorats de Taïz, Lahij, Shabwa et d'Abyan". 

Parallèlement,  l'agence yéménite d’informations Sabaa, a affirmé qu’ hier après-midi l'armée et les « Comités populaires » ont repris le  contrôle de l'aéroport international Aden et ce aprés avoir vaincu les milices d’ Al-Qaïda et celles de  Hadi, soulignant que ces dernières étaient encerclées dans l’une des  portes d’entrée de l'aéroport ...


A vrai dire, les affrontements se poursuivent à Khor Maksar et dans certains quartiers  de Criter et d’ El Arish, voire selon le quotidien libanais alAkhbar  l'aéroport est divisé entre les deux parties qui s’affrontent, sachant que l'armée et les comités travaillent pour reprendre la partie de l’aéroport qui est  sous le contrôle des terroristes.

 

La récente attaque contre  Aden  n’était pas une surprise

Un colonel de l'armée yéménite, sous couvert d'anonymat, a déclaré dans une interview à alAkhbar que la ville d'alTawahi est encore dans les mains de l'armée et des comités et que les forces pro-Hadi  n’ont pas réussi à s’ y infiltrer comme l’ont prétendu certains médias.


Dans le même ordre d’idées, le responsable de la couverture médiatique de la guerre,   Salah al-Izzi, a déclaré à alAkhbar que les groupes armés et les milices pro-Hadi n’ont  réussi à pénétrer que  dans deux zones : Raas-Omran et  l'aéroport et ce grâce  au bombardement intense de la part de la coalition par air et mer.. 

Izzi a souligné que « la majorité des zones à Aden est  soumise au contrôle de l'armée et des comités , voire ils ont progressé à Mansoura et ont pu repousser les attaques contre  alTawahi et Khor-Mkassar. Il a précisé qu'un certain nombre de véhicules militaires qui ont été déchargés par un navire de guerre émirati ont  brulés en plus de la mort d’officiers émiratis et plus de deux cents takfiristes d’ Al-Qaïda. En outre, des sources ont confirmé que l'armée et les comités contrôlent toujours  le palais présidentiel et le commandement militaire de la région.


Dans ce contexte, le porte-parole des Ansarullah, Mohamed Abdel Salam, a indiqué que « la récente attaque contre  Aden  n’était pas une surprise», ajoutant que «les comités et l'armée ont rempli leur mission de devoir légitime, moral et culturel dans leur affrontement contre  les forces ennemies».

Abdul Salam, a déclaré dans un communiqué que « les développements à Aden ont montré que les mercenaires  de la coalition et les miliciens  d'Al-Qaïda ne sont pas  acceptés dans la ville d’ Aden ni ailleurs »  soulignant que «leur attaque est limitée et vulnérable,  et certes ne vaut pas tout ce qui a  été dépensé et préparé et médiatisée pour lui donner de l’importance »..


Abdul Salam a conclu en accusant les Nations Unies d’être impliquée dans  l'agression notamment en entrainant le  Yémen dans le piège de la trêve, alors  que la bataille d’Aden «a été déclenchée au moment où la trêve humanitaire annoncée par l’ONU était toujours en vigueur».