23-11-2024 07:40 AM Jerusalem Timing

Dans ses bastions irakiens, le PKK fustige les raids turcs

Dans ses bastions irakiens, le PKK fustige les raids turcs

En une semaine, l’armée turque a fait état de dizaines de frappes aériennes contre des objectifs du PKK, mais n’en a mentionné que trois contre l’EI.

"La Turquie nous a déclaré la guerre", soutient un responsable du PKK, en pointant du doigt un cratère creusé par l'une des nombreuses frappes aériennes menées depuis six jours par l'armée turque contre les positions de ce groupe rebelle turc dans le Kurdistan irakien.

"Les raids ont touché notre village à plusieurs endroits", confirme Rassoul
Abdallah Faki, un habitant du village d'Inzi situé aux pieds des montagnes de
Qandil.

"Nos fermes ont été endommagées ou ont brûlé", explique ce père de sept
enfants vêtu d'un traditionnel "sarouel" kurde. Un de ses ânes a été blessé et
porte un bandage entourant son flanc.

  Depuis le 24 juillet, des F-16 turcs visent des cibles du Parti des
travailleurs du Kurdistan (PKK) en Irak et du groupe Etat islamique
(EI) en Syrie, dans le cadre de la "guerre contre le terrorisme" engagée par le
président Recep Tayyip Erdogan après l'attentat du 20 juillet à Suruç qui a
fait 32 morts.

  Cette offensive a conduit le groupe indépendantiste kurde turc à rompre la
trêve qu'il respectait depuis 2013, après avoir combattu pendant trois
décennies pour un Etat kurde. Le conflit a déjà fait 40.000 morts depuis 1984.

 L'ensemble de la branche militaire du PKK se trouve dans des camps situés
dans le Kurdistan irakien. La région de Qandil et la ville de Dohuk, qui abrite
un camp de l'organisation, ont été les principales cibles des avions
bombardiers de la Turquie, qui considère le PKK comme un groupe "terroriste".

 Mais à Inzi, Faqi, 40 ans, se désole de ces raids qui les visent alors
qu'"il n'y a pas de membres du PKK dans (son) village". "Ils sont nichés plus
haut", assure-t-il.

Dans un camp de fortune installé dans les montagnes, le responsable du PKK,
Zagros Hiwa, se montre sévère vis-à-vis d'Ankara. "Nous nous sommes engagés à respecter le cessez-le-feu jusqu'au dernier moment mais la Turquie n'en a pas fait de même", soutient-il.

"Maintenant nous allons nous protéger et suivre notre stratégie",
ajoute-t-il sans plus de détails, alors qu'un portrait d'Abdullah Ocalan, le
fondateur du PKK emprisonné -et avec qui Ankara menait des négociations de
paix--, surplombe la vallée.
   
La guerre contre l'EI, un prétexte
   
Lors des six jours de raids, "au moins cinq rebelles du PKK ont été tués et
quatre blessés", indique Hiwa, membre de la direction politique du PKK.
D'autres sources ont fait état de civils blessés au nord de Dohuk.
   Dans l'une des bases du PKK à Qandil, seuls quelques bâtiments ont été
endommagés de même que le cimetière des combattants.

Pour des "raisons de sécurité",  Hiwa refuse de conduire les journalistes
vers la base politique du PKK située dans les hauteurs de Qandil, rendant
difficile le constat réel de l'ampleur des dommages causés par les raids turcs.

  Longtemps accusée de complaisance à l'égard des jihadistes, qui se sont
emparés de pans entiers de la Syrie et de l'Irak, la Turquie est aujourd'hui
soupçonnée d'intensifier sa guerre contre les rebelles kurdes sous couvert de
sa lutte contre l'EI, selon des analystes.

Pour Hiwa, il n'y a pas de doute: "la Turquie instrumentalise l'Otan et
la guerre de la communauté internationale contre l'EI pour attaquer le PKK et
les Kurdes en général qui sont la principale force qui combat les jihadistes".

  En une semaine, l'armée turque a ainsi fait état de dizaines de frappes
aériennes contre des objectifs du PKK, mais n'en a mentionné que trois contre
l'EI.

  Jeudi, une trentaine de F-16 ont mené une nouvelle série de raids contre
les positions des rebelles kurdes dans le nord de l'Irak, selon les chaînes
d'information turques NTV et CNN-Turquie.

Ces raids ont été lancés en représailles à l'attaque plus tôt dans la
journée d'un convoi militaire dans le sud-est du pays, dans laquelle trois
soldats ont été tués, a précisé NTV.

Mais, malgré la peur, la plupart des habitants du village d'Inzi "resteront
jusqu'au bout", affirme Rasul Abdullah Faqi.