Damas n’a affiché aucune position hostile à cette nouvelle décision russo-américaine.
Le Conseil de sécurité de l'ONU doit décider vendredi de former un groupe d'experts pour identifier les responsables de récentes attaques chimiques au chlore en Syrie.
Plusieurs pays occidentaux, dont les Etats-Unis, la France et la Grande Bretagne s’emploient pour accuser le pouvoir syrien de ces attaques, ignorant catégoriquement celles commises par les rebelles syriens.
Pourtant l’Onu avait par la voix de Carla Del Ponte assuré que ces derniers ont plusieurs fois eu recours à des armements chimiques, notamment à Khan al-Aassal, dans la province d’Alep, au nord du pays.
Les autorités syriennes soupçonnent une tentative de la part de parties rebelles de réaliser une attaque chimique « fake », sous faux drapeau, et de la leur attribuer pour justifier une attaque militaire contre le pays qu’ils convoitent tant pour parvenir au pouvoir.
Selon l’AFP, la Russie devrait approuver une résolution en ce sens, et le vote est prévu pour 10H00 locales (14H00 GMT). Damas n'a affiché aucune position hostile à cette nouvelle décision russo-américaine.
Ce texte est le résultat de près de cinq mois de négociations, bouclées mercredi lors d'une rencontre en Malaisie entre ministres des Affaires étrangères russe et américain, John Kerry et Sergueï Lavrov.
Washington, Londres et Paris accusent l'armée syrienne d'avoir mené une série d'attaques au gaz de chlore, notamment dans la province d'Idleb (nord-ouest). Mais selon Moscou, il n'existe pas de preuve irréfutable de la culpabilité de Damas.
Force est de constater que ces trois capitales n’évoquent jamais les attaques perpétrées contre les militaires syriens réguliers ou les régions loyalistes.
Dès décembre 2013, révèle le célèbre journaliste d'investigation Seymour Hersh, la CIA avait alerté le gouvernement américain sur la possession depuis le début de l'année 2013 par les miliciens de la branche d’Al-Qaïda le front Al-Nosra d'armes chimiques au gaz sarin.
La Syrie a détruit tout son arsenal chimique, aux termes d'un accord américano-russe de septembre 2013 et au total 1.300 m3 de produits toxiques, dont du gaz sarin, ont été sortis du pays et détruits.
C’est une attaque chimique perpétrée contre la Ghouta orientale, à l’est de Damas, en aout 2013, le jour même de l’arrivée de l’équipe onusienne pour enquêter sur le recours aux armes chimiques et attribuée au gouvernement syrien qui a été exploitée pour imposer à la Syrie cet accord.
Depuis, signale l’AFP, l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) a conclu l'an dernier que du gaz de chlore avait été "systématiquement" utilisé comme arme chimique dans le conflit syrien, notamment en janvier 2015 dans trois villages syriens, à Idlib et Hama.
Le chlore est un produit toxique facilement accessible qui provoque des asphyxies.
Là aussi, c’est l’armée syrienne qui est mise dans le collimateur. Alors que le rapport de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OPCW, en anglais) ne se prononce pas sur l'origine des tirs, ni l'identité du coupable entre le gouvernement syrien et les rebelles islamistes (The Guardian, 7 janvier 2015), il indique que le chlore a été largué par hélicoptère sur des zones tenues par l'opposition syrienne, alors que seule l'armée syrienne possède des hélicoptères dans le pays.
Mais l'organisation ne s'est pas prononcée pas sur la responsabilité de ces attaques, car elle n'est pas habilitée à le faire.
Sachant qu’il a été question dans les medias d’accusations de la part du gouvernement du Kurdistan irakien contre la milice wahhabite takfiriste Daesh (Etat islamique) d’avoir utilisé du gaz de chlore contre les combattants peshmergas aussi bien dans la ville kurde syrienne de Kobani (Aïn al-Arab) , au nord de la Syrie que dans des régions irakiennes.
Selon la résolution, ce "mécanisme conjoint d'enquête" sera composé d'experts de l'ONU et de l'OIAC et formé dans un délai de 20 jours.
La mission durera un an, avec la possibilité pour le Conseil de la prolonger par une nouvelle résolution, et devra rendre un premier rapport dans les 90 jours après le début de son enquête.
Les experts seront chargés "d'identifier dans toute la mesure du possible les individus, entités, groupes et gouvernements" qui ont organisé, parrainé ou commis ces attaques.
Le gouvernement syrien sera tenu de "coopérer pleinement" avec eux en leur fournissant "toute information pertinente" et en leur permettant d'accéder aux sites des attaques, de recueillir des échantillons et d'interroger des témoins.
Il s'agit de profiter de l'expertise de l'OIAC, qui avait déjà mené une longue enquête de terrain sur un massacre au gaz sarin ayant fait 1.400 morts en août 2013 près de Damas, mais qui n’avait pu identifier les parties qui l’ont perpétré.
Enquête difficile
Selon l’AFP l’enquête sera difficile, car les enquêteurs risquent d'avoir beaucoup de mal à circuler en sécurité dans un pays en guerre et à trouver des indices probants, plusieurs mois après les faits.
De plus, Moscou peut encore contester leurs conclusions ou s'opposer à la prolongation de l'enquête après un an.
Toujours selon l’AFP, « même si la culpabilité du régime est établie, il faudra pour le sanctionner faire adopter une nouvelle résolution, que la Russie pourra bloquer ».
Or le contraire est vrai aussi. Si la culpabilité des rebelles est établie, les pays occidentaux pourraient très bien bloquer l’adoption d’une résolution aussi.
D'après l'AFP, certains diplomates du Conseil voient néanmoins dans le vote positif de Moscou un signe encourageant. Ils espèrent qu'il facilitera l'adoption de deux autres initiatives en discussion: une résolution française condamnant les largages de barils d'explosifs sur les civils et une déclaration de soutien au médiateur de l'ONU Staffan de Mistura, qui vient de proposer un nouveau plan de paix.
Force est de constater que le largage des bombonnes à gaz bourrées d’explosifs par les rebelles sur la population syrienne que ce soit à Alep, à Damas ou ailleurs n’est jamais soulevé pour être condamné.