C’est Dr Afridi qui avait aidé la CIA à localiser le lieu de résidence de Ben Laden.
L'avocat du médecin pakistanais emprisonné après avoir aidé la CIA à traquer Oussama Ben Laden a accusé jeudi les autorités de laisser délibérément son client croupir en détention sans jugement, après un nouveau report d'audience dans cette affaire très sensible.
Le docteur Shakeel Afridi avait été arrêté au Pakistan en 2011, peu après la mort de Ben Laden, tué dans un raid nocturne clandestin de forces spéciales américaines à Abbottabad, dans le nord du pays.
Le médecin y avait auparavant mené pour les Américains, qui soupçonnaient la présence sur place du chef d'Al-Qaïda et de sa famille, une fausse campagne de vaccination contre l'hépatite pour tenter de prélever leur ADN et en avoir ainsi confirmation.
En 2012, Shakeel Afridi a été condamné en première instance à 33 ans de prison, non pour cette campagne mais pour ses "liens" présumés avec un groupe islamiste armé, une accusation jugée par beaucoup factice et politiquement instrumentalisée pour le punir d'avoir secrètement aidé les Etats-Unis.
Sa peine a été ramenée en 2014 à 23 ans de prison, mais l'accusé a fait appel en mars dernier, réclamant sa libération sous caution, une nouvelle enquête et un nouveau procès.
Or depuis mars, selon son avocat, Qamar Nadeem Afridi, 16 audiences sur cette affaire ont eu lieu mais aucune procédure n'a avancé, l'administration du district de Khyber, où s'était tenu le premier procès, n'ayant toujours pas transmis le dossier au tribunal.
"Hier (mercredi) encore, le juge a de nouveau demandé en vain le dossier. Il a fixé la prochaine audience au 16 octobre", a expliqué à l'AFP l'avocat.
"Ou l'administration de Khyber fait traîner les choses pour laisser croupir le Dr Afridi en prison, ou ils ont perdu le dossier", a-t-il ajouté.
Interrogé par l'AFP, un responsable de l'administration de Khyber a sous couvert d'anonymat indiqué que des "complications juridiques" avaient jusqu'ici empêché la transmission du dossier, en promettant que cela serait fait dès que possible.
Le raid clandestin américain à Abbottabad et la mort de Ben Laden ont été une énorme source d'embarras pour le Pakistan, et notamment sa puissante armée, accusée au mieux d'incompétence et au pire d'avoir joué double jeu avec Al-Qaïda en aidant à cacher son chef.
Plusieurs parlementaires américains ont depuis appelé Washington à réduire son importante aide civile et militaire au Pakistan si celui-ci ne libérait pas le Dr Afridi.
La fausse campagne anti-hépatite de la CIA a renforcé l'opposition des extrémistes et autres conservateurs islamistes aux campagnes de vaccinations, accusées d'être des couvertures pour des activités d'espionnage de l'étranger.
Depuis la fin 2012, les attaques contre des employés des services de santé, notamment ceux vaccinant les enfants contre la polio, ont fait au moins 78 morts au Pakistan.