Les responsables des différents courants politiques se sont réunis mercredi mais sans faire d’annonce, si ce n’est celle d’une nouvelle réunion de "dialogue" le 16 septembre.
Les acteurs de la société civile au Liban ont accueilli jeudi avec réserve le plan du gouvernement pour mettre fin à la crise des déchets qui a provoqué d'importantes manifestations anti-corruption.
Ce plan a été annoncé en milieu de nuit au terme d'une réunion marathon de plus de six heures du Conseil des ministres, alors que se déroulait une nouvelle manifestation populaire dans le centre de Beyrouth.
Il prévoit la réhabilitation de deux déchetteries pour que la responsabilité du traitement des déchets soit ensuite transférée aux municipalités sur l'ensemble du territoire libanais.
Le problème des ordures, qui dure depuis plus d'un mois, a été le déclencheur d'une mobilisation citoyenne inédite: des dizaines de milliers de personnes sont descendues dans la rue pour exprimer leur ras-le-bol de l'impuissance et la corruption de la classe politique.
Cette crise a éclaté après la fermeture à la mi-juillet de la principale déchetterie du Liban, à Naamé, au sud de Beyrouth, provoquant l'accumulation des ordures dans les rues de la capitale et de ses environs.
Face aux atermoiements du gouvernement pour solutionner le problème, des campagnes citoyennes ont vu le jour, la plus importante d'entre elle étant baptisée "Vous puez" à l'adresse des hommes politiques.
'Solutions partielles'
La première initiative du plan présenté par le ministre de l'Environnement Akram Chehayeb sera de rouvrir la déchetterie de Naamé pendant une semaine seulement. Y devront être rapidement déversées les montagnes d'ordures qui se sont accumulées dans Beyrouth et ses faubourgs.
Mais cette proposition pourrait susciter des oppositions, des résidents vivant aux abords du site ayant fait savoir qu'ils ne toléreraient sa réouverture.
Le plan prévoit aussi le réaménagement de deux déchetteries, l'une à Masnaa (est), près de la frontière avec la Syrie, l'autre à Akkar, une région pauvre du nord du Liban.
Celles-ci sont déjà utilisées comme des déchetteries locales, mais le gouvernement compte les réhabiliter pour qu'elles reçoivent les ordures de Beyrouth et du Mont-Liban (centre) qui, contrairement aux autres régions ne disposent pas de décharges.
Une campagne, intitulée "Akkar n'est pas un dépotoir", a d'ores et déjà rejeté cette initiative.
Les deux déchetteries devront être fermées d'ici 18 mois, lorsque les municipalités de chaque région seront en principe capables de traiter leurs propres déchets. Jusqu'à présent, elles se contentaient de jeter les ordures dans des décharges, sans les traiter.
Le plan ne détaille toutefois pas le mode de gestion des déchets qui sera adopté par ces municipalités.
Les militants de "Vous puez", qui doivent encore réagir officiellement à ce plan, ont d'ores et déjà douté du sérieux du gouvernement.
"Nous approuvons le transfert des responsabilités aux municipalités mais ce point n'est pas détaillé de manière claire et transparente", a déclaré à l'AFP Lucien Bourjeily, membre de la campagne "Vous puez". "Ce sont des solutions partielles".
Même des membres la commission ad hoc présidée par le ministre de l'Environnement se sont montrés prudents. "Après 18 mois, si les municipalités ne sont pas prêtes, les ordures seront de nouveau dans la rue", a prévenu l'un d'eux, Bassam Kantar.
Dialogue reporté
La contestation provoquée par la crise des déchets a pris une dimension politique centrée sur l'incapacité du gouvernement, miné par les divisions, à prendre des décisions, sur la vacance du poste de président de la République depuis plus d'un an et sur la décision controversée du Parlement de proroger son propre mandat à deux reprises en l'absence d'élections depuis 2009.
Les responsables des différents courants politiques se sont réunis mercredi mais sans faire d'annonce, si ce n'est celle d'une nouvelle réunion de "dialogue" le 16 septembre.
Ils se sont réunis dans un Parlement en état de siège, protégé par des centaines de policiers, après avoir été accueillis par des manifestants jetant des oeufs sur leurs convois et scandant "Voleurs, voleurs, dehors!".
Des milliers de Libanais ont ensuite manifesté dans le centre-ville.
Les militants renvoient dos à dos l'ensemble des formations politiques, leur reprochant de se partager entre elles les ressources d'un pays qui souffre toujours de pénuries d'électricité et d'eau 25 ans après la fin de la guerre civile.