Au total, le programme du futur bombardier pourrait coûter jusqu’à 73 milliards de dollars.
Le Pentagone s'apprête à annoncer le constructeur retenu pour son bombardier du futur, successeur du célèbre B-52, et pour l'instant entouré du plus grand secret.
Deux concurrents sont sur les rangs, Northrop Grumman et une alliance de Boeing et Lockheed Martin, pour décrocher un contrat de plusieurs dizaines de milliards de dollars.
La décision, qui était attendue pour septembre, sera annoncée "bientôt", répètent les responsables du Pentagone, qui sont jusqu'à maintenant restés très discrets sur le cahier des charges de l'appareil.
Car dans cet avion "tout est classifié, à part le prix unitaire" de 550 millions de dollars fixé en 2010, a plaisanté cette semaine le responsable des contrats d'acquisition de l'US Air Force, William LaPlante.
L'appareil est appelé à remplacer les bombardiers B-52 et B-1, à partir du milieu de la décennie 2020, indique l'US Air Force qui prévoit d'en acheter entre 80 et 100.
Furtif et peu bruyant
Furtif et bardé de capteurs et de calculateurs, capable d'emporter la bombe nucléaire, l'avion doit pouvoir se glisser dans les espaces aériens les mieux protégés.
Notamment dans ceux de pays comme la Russie et la Chine, qui ont lourdement investi pour se doter de systèmes de missiles et de radars ultra-perfectionnés, afin d'empêcher tout avion ennemi de s'approcher de leur territoire.
Pour l'analyste spécialisé dans l'aviation Richard Aboulafia, l'appareil ressemblera probablement à une aile volante, une forme adaptée à la furtivité et déjà utilisée dans le bombardier B-2 (construit à une vingtaine d'exemplaires par Northrop, et opérationnel depuis le début des années 1990).
L'avion pourra voler à très haute altitude, mais probablement pas à vitesse supersonique, selon M. Aboulafia, notamment pour des raisons d'autonomie - la vitesse demande beaucoup de carburant.
Ses caractéristiques seront de "ne pas faire beaucoup de bruit, de ne pas créer une signature radar, et bien sûr d'avoir tous ces dispositifs de guerre électronique qui permettent de brouiller l'ennemi s'il essaie de vous viser", a résumé Richard Aboulafia pour l'AFP.
Le Pentagone a également demandé de pouvoir disposer à terme d'une version sans pilote. Mais pas forcément pour des missions de bombardement, selon Richard Aboulafia.
Les avions sans pilote peuvent être hackés, et doivent pouvoir être détruits si un ennemi prend le contrôle, souligne-t-il.
"Les pilotes représentent l'assurance la moins chère" contre ces risques, explique-t-il.
Selon beaucoup d'experts, le bombardier est en réalité déjà assez avancé dans son développement, grâce à des budgets secrets du Pentagone.
Architecture ouverte
Le Pentagone a demandé, comme pour le F-22 Raptor, une "architecture ouverte", qui permettra de rajouter facilement des nouveaux équipements au fur et à mesure du cycle de vie de l'avion.
"On se trompe toujours quand on essaie de prévoir les menaces" de demain, donc autant prévoir dès le début de pouvoir adapter l'appareil en cours de route, a souligné William LaPlante.
Au total, le programme du futur bombardier pourrait coûter jusqu'à 73 milliards de dollars, coût de développement inclus, selon le CSBA, un groupe de réflexion de Washington spécialisé les programmes de défense.
Il s'agit du sixième programme d'armement le plus cher en cours au Pentagone, loin derrière celui de l'avion de combat F-35 (près de 400 milliards de dollars), et derrière également le bouclier anti-missiles, les sous-marins des classes Virginia et Ohio, et les navires de combat DDG-51.
L'alliance Boeing-Lockheed est le géant de la compétition, tandis que Northrop Grumman fait plus figure de petit Poucet, toutes proportions gardées.
Boeing et Lockheed représentaient ensemble près de 15% du budget d'acquisition du Pentagone en 2014, contre 3,25% pour Northrop, selon les chiffres de la société d'études BGA-Aeroweb.
Peut-être pour mieux se faire entendre, Northrop s'est offert quelques dizaines de secondes de publicité pendant le dernier Superbowl, montrant brièvement un avion type aile volante, dissimulé sous un voile.
"Construire des avions d'un genre encore jamais vu, voilà ce que nous faisons", soulignait la voix off.