Le Haut Commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme, dénonce une politique marquée par la "xénophobie" et l’"hostilité aux musulmans".
Des milliers de migrants ont continué d'affluer jeudi en Croatie, où les autorités se disent débordées et ont décidé de fermer "jusqu'à nouvel ordre" sept des huit passages frontaliers avec la Serbie.
Plus de 11.000 migrants sont entrés sur le sol croate par la Serbie depuis mercredi matin, a indiqué jeudi soir le ministère croate de l'Intérieur.
Dans la journée, Zagreb déclarait s'attendre à un afflux de plus de 20.000 personnes dans les deux prochaines semaines et redouter une situation "hors de contrôle".
Conséquence immédiate: le ministère de l'Intérieur a annoncé la fermeture "jusqu'à nouvel ordre" des postes-frontières de Tovarnik, Ilok, Ilok 2, Principovac, Principovac 2, Batina et Erdut.
Cette décision maintient la pression sur l'Union européenne, dont les dirigeants se retrouvent la semaine prochaine pour tenter de surmonter leurs divisions face à cette crise.
La Croatie est la nouvelle route vers l'Europe occidentale après le verrouillage de la frontière serbo-hongroise, théâtre mercredi d'affrontements entre migrants excédés et forces de l'ordre.
Les migrants se dirigent ensuite vers la Slovénie, où quelque 150 migrants ont pu finalement entrer en train dans la nuit de jeudi à vendredi, après avoir été sous la menace d'une expulsion vers Zagreb.
Plus au sud, jeudi matin, la petite gare de Tovarnik, ville croate proche de la frontière serbe, et ses environs étaient envahis par les migrants qui cherchaient à monter dans des trains pour rejoindre Zagreb et poursuivre leur voyage.
"Il y a entre 4.000 et 5.000 personnes ici. Les trains arrivent mais ils ne peuvent pas prendre tous ces gens", a assuré un porte-parole du Haut Commissariat aux réfugiés (HCR) Jan Kapic.
Xénophobie" et hostilité aux musulmans
Parmi eux, des centaines ont forcé un barrage policier, se dispersant dans la ville. Certains ont fait le choix de marcher vers Zagreb, à quelque 300 km à l'ouest.
D'autres campaient finalement dans les environs en attendant un prochain transport.
A une dizaine de minutes de là, dans la gare d'Ilaca, quelques centaines de migrants sont montés dans un train bondé vers Zagreb.
Des villageoises leur avaient apporté du pain et des confitures maison, ainsi que de l'eau et des produits pour bébés. "Il y a 20 ans, c'était nous qui étions pris dans une guerre et qui avions besoin d'aide", commentait un vieux monsieur, venu lui aussi les bras chargés.
Le Premier ministre croate, Zoran Milanovic, a réaffirmé que Zagreb voulait laisser passer les migrants vers d'autres pays.
La présidente croate Kolinda Grabar-Kitarovic a estimé que "les choses sont dans une certaine mesure en train d'échapper à tout contrôle".
Une réunion du Conseil de sécurité nationale croate est prévue vendredi à Zagreb.
A la frontière serbo-hongroise, au poste-frontière de Horgos-Röszke, environ 300 migrants ont encore attendu jeudi sous un soleil de plomb.
La tension est toutefois retombée après les violences de la veille, qui ont fait des blessés parmi les migrants et la police.
Le Haut Commissaire de l'ONU aux droits de l'Homme, Zeid Ra'ad Al Hussein, s'est indigné des actions "choquantes" des autorités hongroises, dénonçant une politique marquée par la "xénophobie" et l'"hostilité aux musulmans".
'Abattre les murs'
Après la frontière serbe, le Premier ministre hongrois Viktor Orban a annoncé qu'il envisageait maintenant de faire construire des barrières aux frontières avec la Roumanie et la Croatie.
L'Union européenne "est née pour abattre les murs, pas pour les construire", a réagi le chef du gouvernement italien Matteo Renzi, dans une critique transparente de la Hongrie.
Un sommet de l'UE aura lieu le 23 septembre à Bruxelles, au lendemain d'une rencontre des ministres de l'Intérieur, a annoncé jeudi le président du Conseil européen, Donald Tusk.
Le président français, François Hollande, a mis en garde contre les "dangers" qui menaceraient l'espace Schengen si un accord n'était pas trouvé sur l'accueil des réfugiés.
Selon lui, "on serait alors obligé de rétablir des postes de douane, de contrôle, également dans les moyens de transport".
Il a également estimé que le sommet de l'UE devait aider la Turquie à garder les réfugiés sur son sol.
La chancelière allemande Angela Merkel et son homologue autrichien Werner Faymann avaient demandé la tenue rapide d'un sommet pour s'entendre sur une répartition contraignante de 120.000 réfugiés et aider à résoudre la plus grande crise migratoire sur le continent depuis 1945.
Mais d'autres pays, notamment ceux de l'Est comme la Slovaquie et la Hongrie, continuent de s'opposer fermement à tout quota imposé de migrants.
En réaction, une centaine d'hommes politiques et intellectuels d'Europe centrale ont signé une lettre ouverte pour appeler "les autorités et les citoyens" de leurs pays à la solidarité avec les migrants.
Destination rêvée par la plupart des candidats à l'exil, l'Allemagne a enregistré 9.100 arrivées sur son territoire mercredi, contre 6.000 la veille, preuve que le flux est loin d'être stoppé.
Le Danemark a annoncé qu'il acceptait finalement d'accueillir, sur la base du volontariat, 1.000 des 120.000 réfugiés que l'UE veut répartir pour soulager les pays où ils se concentrent.
Et le Portugal s'est dit prêt à accueillir "au moins 2.000 réfugiés" supplémentaires, ce qui porterait leur nombre à 3.500 environ.
Quelque 500.000 personnes fuyant la guerre ou la misère, et venant principalement du Moyen-Orient et d'Afrique, sont déjà arrivées dans l'UE cette année, après de longs et périlleux voyages.
Avec AFP