23-11-2024 11:23 PM Jerusalem Timing

Syrie: Inefficaces les frappes russes?

Syrie: Inefficaces les frappes russes?

Il n’y a en réalité à ce jour plus aucun front sur lequel l’Armée syrienne recule, au contraire les forces loyalistes avancent et sont sur une dynamique victorieuse sur presque la totalité du territoire du pays.

Il y a quelques jours, une vidéo en langue russe extrêmement agressive et signée par l’Etat islamique est apparue sur la toile.
La vidéo intervient à un moment assez sensible et complexe des relations entre la Russie et l’organisation terroriste, après l’accident d’avion dans le Sinaï qui a couté la vie à 224 ressortissants russes, un accident qui pourrait être un attentat comme l’a revendiqué l’Etat Islamique, mais aussi alors que sur le terrain, l’opération militaire russe semble commencer à porter ses fruits.

Pourtant contrairement à ce qu’annonce en effet la presse française dans son immense majorité, après un mois et demi d’intervention et quelques 2.000 frappes, les dynamiques sur le terrain ont été totalement inversées et ce grâce à la coordination entre les frappes aériennes russes et l’action militaire au sol.

Une forme de coordination qui jusque-là n’existait qu’entre la coalition et les forces kurdes, expliquant sans doute en partie leurs nombreux succès militaires.

Il n’y a en réalité à ce jour plus aucun front sur lequel l’Armée syrienne recule, au contraire les forces loyalistes avancent et sont sur une dynamique victorieuse sur presque la totalité du territoire du pays.

Au sud du pays, le front est désormais figé et l’armée de l’air russe y a procédé à ses premières frappes.

Autour de Damas, les loyalistes continuent de réduire le rebellistan de la Ghouta orientale.

Dans le centre-est du pays les loyalistes resserrent l’étau sur Palmyre, se préparant ainsi à vraisemblablement rouvrir l’axe reliant Damas à Deir-Ezzor.

Au nord du pays, dans la zone d’Alep, les loyalistes ont brisé le siège héroïque de la base de Kuweires qui durait depuis 35 mois (!), la base étant défendue par quelques centaines d’hommes isolés en plein territoire de l’EI et finalement libérée par le Colonel Suheil Al-Hassan, l’un des hommes forts du conflit Syrien.

Les troupes loyalistes ont repris le contrôle de dizaines de villes au sud de la capitale économique et de près de 500 kilomètres carrés de territoire en un mois, prenant le contrôle de l’axe stratégique M5 qui relie Hama à Alep. Si cette dynamique se prolonge vers le sud, les troupes syriennes pourraient rentrer dans la province d’Idleb par le nord afin d’y libérer des enclaves pro-pouvoir encerclées. La province avait été perdue par le pouvoir Syrien on s’en souvient au mois de juin 2015.

Au centre-nord du pays, dans la province d’Idleb, le front stagne au sud de la province mais les loyalistes ne reculent plus pour la première fois depuis 18 mois tandis qu’ils enregistrent des succès dans la région de Lattaquié, se rapprochant de la frontière turque. L’objectif du régime semble de tenter de prendre en étau les rebelles qui selon les estimations russes auraient concentré jusqu’à 15.000 combattants dans la province.

Plus près de la frontière irakienne, quelques 2.500 combattants loyalistes défendent une partie de la ville et surtout l’aéroport militaire de Deir Ezzor (l’un des fiefs du Djihadisme français en Syrie) en étant totalement encerclé par plusieurs milliers de combattants de l’EI. Peu médiatisé en Occident, la bataille pour Deir Ezzor est l’un des fronts les plus terribles de Syrie. Les troupes loyalistes y sont dirigées par le général druze Issam Zahreddine qui est en train de devenir une légende en Syrie.

Plus à l’est mais côté irakien cette fois, la prise de Sinjar par les forces kurdes coupe l’axe Hassaké / Mossoul utilisé par l’EI pour communiquer entre les deux pays. L’impossibilité physique pour l’EI d’envoyer des renforts, ne fut-ce que quelques centaines d’hommes, pourrait laisser penser que l’organisation connait ses premières difficultés logistiques pour maintenir le niveau de son engagement militaire sur de multiples fronts, notamment quand au nombre de combattants disponibles.

Mais il est vrai que depuis le début de l’intervention russe, une nouvelle équation règne en Syrie: les frappes russes ne font pas qu’appuyer les opérations au sol des loyalistes ni peu à peu détruire la boucle logistique des insurgés, elle les empêche de déplacer massivement hommes et matériel comme ce fut le cas pour l’invasion de Palmyre, lorsque l’EI fit traverser le désert syrien à plus d‘un millier de combattants sans que la coalition occidentale n’intervienne.

Pour cette raison, les loyalistes sont dans une logique de reconquête du territoire syrien qui commence par la prise de contrôle de grands axes, afin d’empêcher les rebelles de pouvoir alimenter en renforts les fronts sous pression de l’Armée syrienne et de ses alliés.

Piétinant en Irak et en Syrie, l’EI cherche donc à déstabiliser d’autres territoires comme par exemple le Liban, la France et sans nul doute demain la Russie. Dans ce dernier cas, il est probable que l’EI ne cherche à déstabiliser la fédération de Russie par son tendon d’Achille qu’est le turbulent Caucase, en tentant probablement d’y rallumer un Djihad antirusse qui avait mis le feu à la région en 1995 et en 1999.

Au même moment, le président de la république russe de Tchétchénie Ramzan Kadyrov vient lui de demander à Vladimir Poutine la possibilité d’envoyer ses troupes d’élites combattre l’EI au sol et à appeler à l’unité des musulmans contre la barbarie de l’EI.

Alors que la Russie est en pleine intensification de sa campagne militaire en Syrie nul doute que nous ne sommes qu’au prélude de la guerre entre Moscou et l’Etat Islamique, une guerre qui pourrait dans les prochains mois connaitre de nombreux rebondissements.