Des files de camions remplis de pétrole visibles "jusqu’à l’horizon", se dirigeant "jour et nuit vers la Turquie", assure Poutine.
La Russie avait informé les Etats-Unis de la mission du bombardier russe, qui ne pouvait pas ignorer sa nationalité contrairement à ce qu'affirme Ankara, a affirmé jeudi soir le président russe Vladimir Poutine.
"Les Etats-Unis, qui dirigent une coalition dont fait partie la Turquie, connaissaient le lieu et le moment du passage de nos avions, et c'est précisément à cet endroit et à ce moment que nous avons été frappés", a-t-il précisé lors d'une conférence de presse.
Il a par ailleurs "exclu" que l'aviation turque n'ait pas pu identifier à quel pays appartenait le Su-24 comme l'a affirmé Ankara: "C'est absurde, ce sont des prétextes".
Le pétrole du sang
Des files de camions remplis de pétrole visibles "jusqu'à l'horizon", se dirigeant "jour et nuit vers la Turquie": le président russe a ainsi accusé jeudi soir la Turquie de ne rien faire pour arrêter la contrebande à sa frontière avec Daesh.
"Il s'agit de livraisons pétrolières en quantités industrielles à partir des territoires syriens usurpés par les terroristes. Il s'agit précisément de ces territoires, et pas d'autres. Nous voyons à partir des airs où vont ces véhicules. Jour et nuit, elles vont en Turquie", a laissé tomber le leader russe.
M. Poutine a également révoqué en doute l'option selon laquelle le pétrole des terroristes serait ensuite détruit en Turquie.
"Si les autorités turques y raffinent le pétrole, puis le détruisent, aucune fumée n'est visible lors de sa destruction. Je répète, il s'agit de quantités industrielles", a souligné le dirigeant russe.
"Admettons que la haute administration politique turque n'en sache rien. Difficile d'y croire, mais théoriquement c'est possible. Si la haute administration politique n'en sait rien, qu'elle le sache. J'admets qu'il puisse y avoir de la corruption, de la collusion – il faut qu'on arrange cela", a affirmé Vladimir Poutine.
Le président russe a toutefois mis en évidence le fait que l'argent du pétrole gagné par les terroristes servait à financer des attentats. Aussi, M. Poutine a-t-il évoqué les meurtres de Paris et l'explosion à bord de l'avion russe Airbus А321 en Egypte.
"Je peux croire que le gouvernement turc n'est pas au courant. Mais ça ne veut pas dire qu'ils ne doivent pas arrêter" ce trafic, a poursuivi le président russe, assurant que ces camions ne transportaient "pas seulement du pétrole mais du sang", car "les terroristes achètent des armes avec cet argent".
"A ce sujet, il existe une résolution spéciale du Conseil onusien de sécurité interdisant d'acheter du pétrole aux terroristes. Dans ces tonneaux qui transportent le pétrole, il n'y a pas que du pétrole, mais il y a également du sang de nos citoyens, car les terroristes achètent avec cet argent des armes, des minutions de guerre et organisent par la suite des actions sanglantes", a conclu Vladimir Poutine.
"Nous avons l'impression que les dirigeants turcs conduisent sciemment les relations russo-turques dans l'impasse", avait plus tôt fustigé Vladimir Poutine, qui a, lors de sa conférence de presse avec François Hollande, jugé "absurdes" les affirmations d'Ankara assurant ne pas avoir su que le Su-24 abattu était russe.
Jets de pierre contre l'ambassade de Turquie
Les manifestations de colère se sont aussi multipliées: jets de pierre contre l'ambassade de Turquie à Moscou et d'oeufs contre le consulat turc à Saint-Pétersbourg, projet de loi pour pénaliser la négation du génocide arménien et, selon des médias turcs, visiteurs turcs refoulés à l'aéroport de Moscou.
Ankara a convoqué dans la soirée l'ambassadeur russe pour dénoncer les violences qui ont visé son ambassade et s'inquiéter des "attaques physiques" dont seraient victimes ses représentations et ses entreprises en Russie.