23-11-2024 03:02 AM Jerusalem Timing

Deir Ezzor: quand la «coalition» bombarde l’armée syrienne, erreur ou test?

Deir Ezzor: quand la «coalition» bombarde l’armée syrienne, erreur ou test?

Les S-400 déployés en Syrie dans le collimateur de la Coalition internationale.

Une information aussi surprenante que révélatrice est tombée: les forces de la coalition ont bombardé un dépôt d’armes et un camp d’entraînement appartenant à l’armée syrienne dans la région de Deir Ezzor, tuant 4 soldats syriens, faisant 13 blessés et détruisant 2 chars.
Damas a envoyé une note de protestation à l’ONU. La coalition a démenti, elle aurait frappé à 55 km de là.

Erreur ou provocation?

Les deux scénarios ont leur place. Comme l’écrit RT:
« Lundi matin, Damas a déclaré que quatre avions de combat de la coalition occidentale avaient largué 9 bombes sur un camp de l’armée syrienne dans la province de Deir Ezzor. Le ministère syrien des Affaires étrangères a précisé qu’il condamnait sans réserve «l’agression de la coalition qui contrevenait aux buts et principes de la Charte de l’ONU en violant l’espace aérien de la Syrie» et qu’il enverrait une note de protestation contre la coalition occidentale au Conseil de sécurité. »

Pour sa part, le Pentagone dément, affirmant n’avoir touché aucune infrastructure de l’armée syrienne. Lors des quatre sorties  effectuées par l’aviation de la coalition dans la région de Deir Ezzor, seules les installations pétrolières contrôlées par Daesh auraient été prises pour cible. Le Pentagone rappelant – très sérieusement – qu’il dispose d’un système de tir très précis permettant d’éviter les erreurs de cibles. Toutefois une enquête va être ouverte.

Il faut préciser que Deir Ezzor est une petite enclave contrôlée par l’armée régulière syrienne au beau milieu d’une zone, pétrolifère, entièrement contrôlée par les terroristes, à la frontière de l’Irak.

La thèse de l’accident

Vue la localisation de la base, il est possible que la coalition ait commis une erreur. Rappelons que, indépendamment des affirmations du Pentagone, les « erreurs regrettables » deviennent légion, notamment au Yémen, où les mariages sont bombardés, les hôpitaux etc.

C’est notamment cette thèse qui retient l’attention de Colonnel Cassad. Même s’il a quelques doutes …

Autrement dit, le bombardement de positions civiles n’est plus une surprise. En revanche, bombarder les positions militaires serait une première. Et ce qui est intéressant est que cela ne peut signifier une déclaration de guerre. C’est la « coalition » qui bombarde, la «coalition» qui commet des erreurs. Pas des Etats. Comme si cette «coalition » était une structure désétatisée, supranationale, désincarnée et donc irresponsable.

La thèse de l’acte volontaire

Cette explication retient plus particulièrement l’attention des analystes en Russie. Il faut dire que la région est très riche en pétrole et qu’elle est massivement contrôlée par les terroristes, à l’exception de cette petite zone. Or, comme nous l’avons vu, le trafic de pétrole est une question sacrée au nom de laquelle beaucoup d’avions tombent. Dans le silence assourdissant des pays démocratiques de l’OTAN.
De plus, certains analystes estiment qu’il est difficile de parler d’un accident, puisque les positions de l’armée syrienne sont bien connues.
Alors pourquoi bombarder justement cet endroit?

La cible est très intéressante sur plusieurs points. Elle est importante, mais pas trop. L’attaque a permis aux groupes terroristes de relancer l’attaque, tout en restant une cible reculée, perdue dans une zone instable, laissant toujours ouverte la porte de l’erreur. Donc, c’est une cible qui ne conduit pas à une confrontation directe, mais permet de faire passer un message.

En l’occurrence, il peut être intéressant de se rappeler que la Russie, suite aux tirs contre son bombardier SU 24 par la Turquie en territoire syrien, a pris la décision de développer en Syrie des systèmes de protection aérienne S-400. Ils sont censés couvrir une large zone, notamment l’Irak ou la Turquie. Mais la puissance de leur efficacité protectrice baisse évidemment avec la distance. On la coupe en deux zones, plus efficace au centre, moins dans le 2e cercle.

Or, la zone touchée est à la limite entre le 2e cercle et la fin de zone d’efficacité. Toucher cet endroit permet en passant de tester la réactivité et l’efficacité du système S-400, sans prendre trop de risques. Parallèlement, cela envoie deux messages. Le premier à la Russie montrant que l’effet dissuasif du dispositif russe mis en place est relatif. Le second à la Syrie lui intimant de réfléchir à la fiabilité de ses alliés et à la force de ses « adversaires ».

Reste à voir comment la Russie réagira à cette nouvelle provocation.

 

Par Karine Bechet-Golovko
Source : Russie Politics