Le Venezuela, qui possède les plus grandes réserves pétrolières du monde, a vu son économie s’effondrer ces derniers mois au même rythme que les cours du brut.
La crise institutionnelle qui agite le Venezuela depuis l’arrivée de l’opposition aux manettes de l’Assemblée nationale a tourné mardi à la paralysie, le Parlement choisissant de suspendre ses travaux après la décision de la Cour suprême la veille d’invalider toute action du pouvoir législatif.
Invoquant un quorum insuffisant, le président de l’Assemblée nationale, le député antichaviste Henry Ramos Allup, a suspendu les travaux jusqu’à mercredi.
Selon des sources parlementaires, l’opposition était mardi en train de consulter ses juristes pour faire face à la décision de la Cour suprême de justice (TSJ), qu’elle considère acquise au chavisme.
Bras de fer
En pleine crise institutionnelle, le Parlement vénézuélien avait dans un premier temps durci son bras de fer avec le gouvernement chaviste en maintenant sa session mardi, malgré la décision du TSJ la veille d’invalider toute action du pouvoir législatif.
Lundi, l’affrontement entre les pouvoirs législatif et judiciaire a pris une nouvelle dimension lorsque le TSJ a annoncé que toutes les décisions du Parlement seraient invalides, car trois députés antichavistes avaient été investis la semaine dernière malgré leur suspension par la Cour Suprême.
En conséquence, le TSJ considérera comme nuls les actes de l’Assemblée nationale passés et à venir, tant que les trois députés de l’opposition en question demeureront investis.
Deux jours après son arrivée aux manettes de la nouvelle Assemblée le 5 janvier, l’opposition vénézuélienne avait défié le pouvoir chaviste en investissant les trois députés antichavistes suspendus par la justice, revendiquant ainsi la majorité des deux tiers qui lui confère de larges pouvoirs.
En effet, avec 112 députés et non plus 109 (sur 167) au Parlement monocaméral, l’opposition passe de la majorité des trois cinquièmes à celle des deux tiers, avec laquelle elle peut convoquer un référendum, mettre en place une assemblée constituante, voire entraîner, via une réduction de la durée de son mandat, le départ anticipé du président.
Vers une vacance
« Les 112 députés [de l’opposition] vont continuer à travailler, cette décision du TSJ est impossible à respecter. En tant que députés, nous sommes protégés par la Constitution », a déclaré le député antichaviste Simon Calzadilla, vice-président de l’Assemblée.
En écho à ce dialogue de sourds, le numéro deux du régime chaviste et ancien président du Parlement, Diosdado Cabello, a répondu que l’Assemblée devenait un lieu « de débat et plus de décision ».
« Nous allons vers une vacance [du pouvoir législatif], car si l’Assemblée est hors la loi, personne ne va la reconnaître comme telle. Les citoyens et les autres pouvoirs ne sont pas obligés de reconnaître l’Assemblée nationale », a-t-il déclaré, estimant néanmoins que « l’État n’allait, en rien, être paralysé ».
Le TSJ, la plus haute autorité judiciaire du pays, est un acteur clé de la bataille institutionnelle qui s’est ouverte entre le Parlement d’opposition et le pouvoir chaviste. Les nominations de juges y sont d’autant plus sensibles.
Le pouvoir chaviste a nommé 34 nouveaux juges (13 titulaires et 21 suppléants) au TSJ fin décembre. De son côté, l’opposition a mis en place lundi une commission pour enquêter sur ces nominations.
Et Washington…
Signe de la tension croissante et de ses conséquences sur toute la région, les États-Unis ont appelé lundi soir les pays du continent à prendre la parole pour « défendre les valeurs démocratiques » au Venezuela. Concernant la situation sur place, « le dialogue est la meilleure façon de faire face aux sérieux défis qui attendent les Vénézuéliens », a déclaré un représentant du Département d’État.
Pénuries au quotidien et inflation galopante (200 % selon les experts) suscitent un mécontentement populaire qui a profité à l’opposition.
Le Venezuela, qui possède les plus grandes réserves pétrolières du monde, a vu son économie s’effondrer ces derniers mois au même rythme que les cours du brut.
L’opposition se donne « six mois » pour faire partir par la voie constitutionnelle le président Nicolas Maduro, auquel l’armée a réitéré son « soutien inconditionnel » la semaine dernière.