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Les mensonges de Bush-Cheney pour attaquer l’Irak, son pétrole, et pour Israël

Les mensonges de Bush-Cheney pour attaquer l’Irak, son pétrole, et pour Israël

Un organisme de recherche néoconservateur et pro-Israël baptisé du nom de « Projet pour le Nouveau Siècle Américain » (PNAC), avait élaboré un projet pour renverser le gouvernement irakien, et cela dès septembre 2000.

Nous [les États-Unis d’Amérique] avons dépensé $2 milliards de dollars, perdu des milliers de vies. … De toute évidence, ce fut une erreur … George W. Bush a fait une erreur. Nous pouvons faire des erreurs. Mais celle-là fut toute une beauté. Nous n’aurions jamais dû aller en Irak. Nous avons déstabilisé le Moyen-Orient …

—Ils [Le président George W. Bush et le vice-président Dick Cheney] ont menti … Ils ont dit qu’il y avait des armes de destruction massive. Il n’y en avait pas. Et ils savaient qu’il n’y en avait pas. Il n’y avait pas d’armes de destruction massive.

Donald Trump (1946- ), propos tenus au cours d’un débat présidentiel du parti républicain sur la chaîne CBS, le samedi 13 février, 2016.
[George W. Bush] veut renverser le régime de Saddam Hussein, par une action militaire, en prétextant une conjonction entre le terrorisme et les armes de destruction massive (ADM).

—Mais les renseignements et les faits sont trafiqués de manière à justifier une politique préétablie.

Richard Dearlove (1945- ), Chef des Services secrets britanniques (MI6), (observation tirée du rapport intitulé ‘Downing Street memo’, le 23 juillet, 2002).

Il ne fait aucun doute que Saddam Hussein possède aujourd’hui des armes de destruction massive. Il ne fait aucun doute qu’il les a stockées afin de s’en servir contre nos amis, contre nos alliés, et contre nous.

Dick Cheney (1941- ), déclaration faite au congrès national des vétérans américains, le 26 août, 2002.

Présenter, comme on l’a fait, l’existence hypothétique d’armes de destruction massive comme une menace pour les États-Unis constitue, à mon avis, une tentative de tromper sciemment le peuple américain.

Général Hugh Shelton (1942- ), ancien Chef des armées américaines de 1997 à 2001, (opinion émise dans ses mémoires intitulées « Sans hésitation: l’odyssée d’un guerrier américain », 2010).

Nous [les États-Unis d’Amérique] sommes allés en guerre non seulement contre l’Irak et pas seulement contre des groupes d’insurgés, mais aussi contre une grande partie du monde arabe, contre des dizaines et des dizaines de millions de personnes … Ce fut une erreur stratégique de proportions monumentales de croire que cette guerre allait être confinée à l’Irak … [Cette guerre en Irak] est en passe de devenir le plus grand désastre stratégique de toute notre histoire.

Général William E. Odom (1932-2008), commentaire émis devant le Comité des relations étrangères du Sénat américain, le 18 janvier, 2007.

Le candidat républicain aux élections présidentielles américaines, Donald Trump, a rendu un grand service à la vérité et aux historiens de l’avenir en déclarant publiquement, le samedi 13 février, 2016, ce que la plupart des gens savaient déjà, à savoir que la guerre d’agression des États-Unis contre l’Irak, en mars 2003, était non seulement illégale au regard du droit international; elle fut aussi un grand exercice de propagande trompeuse et reposait sur des documents truqués, sur une série de mensonges et sur des falsifications.

Pour ma part, j’ai publié un livre au début de 2003, lequel détaillait la façon dont le gouvernement de George W, Bush et de Dick Cheney avait monté un casus belli sous de faux prétextes contre l’Irak, avec l’aide de néoconservateurs pro-israéliens œuvrant dans les échelons supérieurs du gouvernement étasunien.

La maison d’édition ‘Les Intouchables’ de Montréal publia une première édition du livre en février 2003, sous le titre de « Pourquoi Bush veut la guerre ». Cette dernière fut suivie, en 2004, d’une version en langue anglaise publiée aux États-Unis sous le titre de « The New American Empire ». En 2005, l’éditeur français l’Harmattan publia une version européenne intitulée « Le nouvel empire américain ». La maison ‘Nova Publishing’ de Ankara, en Turquie, publia par après une traduction en langue turque intitulée ‘Yeni Amerikan Imparatorlu›u’.

Les machinations et les truquages derrière la guerre désastreuse contre l’Irak, laquelle a littéralement fait des centaines de milliers de morts et créé des millions de réfugiés, et laquelle a complètement déstabilisé l’ensemble du Moyen-Orient, constituent donc un sujet que j’ai étudié depuis plusieurs années.

On ne sera guère surpris que j’aie accueilli la sortie de M. Trump avec satisfaction lorsque ce dernier décida d’ouvrir les yeux du public étasunien sur la réalité de la guerre en Irak, même si les personnes impliquées dans cette travestie coupable n’ont pas été inculpées, et encore moins condamnées, pour leur négligence et leur duplicité, sinon pour leur trahison, en vertu des articles de la Charte de Nuremberg et de la Charte des Nations Unies. Pire peut-être encore, aucune enquête publique sérieuse de cet épisode sordide du début du 21ème siècle n’a été conduite pour éclaircir comment le gouvernement du duo Bush-Cheney a planifié une attaque militaire préméditée contre l’Irak dans le but de provoquer un « changement de régime politique » dans ce dernier pays.

Par conséquent, il serait peut-être utile de résumer la triste liste des événements qui ont conduit à ce que le général américain William Odom a qualifié du « plus grand désastre stratégique de l’histoire des États-Unis ». Nous pouvons aussi dire que cette guerre illégale a été une grande catastrophe pour les populations du Moyen-Orient, et elle pourrait aussi se révéler être un désastre pour l’Europe et le monde dans son ensemble, surtout si le chaos actuel dans cette partie du monde devait conduire à une troisième guerre mondiale.

1- UN EXERCICE DE DÉCEPTION: Quand George W. Bush prit le pouvoir en janvier 2001, son secrétaire au Trésor, Paul H. O’Neill (1935- ), l’ancien PDG d’Alcoa, rappelle que le projet de renverser le gouvernement irakien de Saddam Hussein fut soulevé par Bush dès la première réunion du cabinet de la nouvelle administration. Dans la biographie de M. O’Neill, sous la plume du journaliste Ron Suskind et intitulé “The Price of Loyalty”, (Le prix de la loyauté), il y est indiqué que George W. Bush avait pleinement l’intention d’envahir l’Irak et faisait tout en son possible pour trouver une excuse afin de lancer une guerre préventive contre Saddam Hussein. Comme l’écrit M. Suskind, il circulait même un document du Pentagone, daté du 5 Mars 2001 et intitulé « Candidats potentiels étrangers pour des contrats dans les champs pétroliers Irakiens », lequel contenait une carte géographique des zones pétrolifères à développer en Irak. Bien sûr, on s’était bien gardé de faire allusion à un tel plan détaillé dans le cadre de la campagne électorale de l’an 2000, et encore moins d’en débattre.

Cependant, un organisme de recherche néoconservateur et pro-Israël baptisé du nom de « Projet pour le Nouveau Siècle Américain » (PNAC), avait élaboré un projet pour renverser le gouvernement irakien, et cela dès septembre 2000. Le double objectif de base visait à sécuriser l’accès aux réserves pétrolières de l’Irak et à supprimer un ennemi potentiel de l’état d’Israël.

Ce groupe de réflexion, fondé par William Kristol et Robert Kagan, était principalement dirigé par le vice-président Dick Cheney; par le secrétaire de la défense Donald Rumsfeld; par Paul Wolfowitz, (l’adjoint de Rumsfeld au ministère de la défense); par le frère cadet Jeb Bush de George W. Bush, alors gouverneur de la Floride; et par Lewis Libby, l’adjoint de Cheney.

Son mémorandum sur l’Irak portait le titre de « Reconstruire les Défenses de l’Amérique: Stratégies, Forces et Ressources pour un Nouveau Siècle ». Il y était clairement indiqué que: « En fait, les États-Unis cherchent depuis des décennies à jouer un rôle plus durable dans la sécurité régionale du Golfe [Persique]. Alors que le conflit non réglé avec l’Iraq lui donne une justification immédiate, le besoin d’une présence militaire américaine significative dans le Golfe va au-delà de la question du renversement du régime de Saddam Hussein ». Ce fut ce projet que l’administration nouvellement élue de Bush-Cheney décida de faire sien, en secret, huit mois avant les attaques terroristes de 9/11.

Il est aussi pertinent et nécessaire de mentionner que le document de la PNAC sur l’Irak, mentionné ci haut, suivait à la trace un autre rapport, rédigé en 1996 pour le gouvernement israélien de Benjamin Netanyahu et intitulé « A Clean Break : A New Strategy for Securing the Realm ». Ce document indiquait ceci : « Israël peut modeler son environnement stratégique en coopération avec la Turquie et la Jordanie, en affaiblissant, en endiguant et même en repoussant la Syrie. Afin de contrecarrer les ambitions régionales de la Syrie, les efforts pourraient viser à expulser Saddam Hussein du pouvoir, un objectif stratégique en soi important pour Israël. »

En 2001, l’administration Bush-Cheney semblait avoir fait sienne la stratégie proposée au gouvernement israélien quelques années auparavant.

2- POSSIBLE NÉGLIGENCE: Dans quelle mesure le gouvernement de Bush-Cheney a été négligent en ne prenant pas les mesures nécessaires pour empêcher les attaques terroristes de 9/11? C’est là une question légitime étant donné que la Maison Blanche de George W. Bush avait reçu, le lundi 6 août 2001, soit 36 jours avant les attaques terroristes, un rapport confidentiel de la CIA intitulé « Ben Laden est déterminé à frapper les Etats-Unis ». Bush était alors en vacances d’un mois dans son ranch de Crawford, au Texas, et aucune alerte ou mesure spéciale ne furent lancées ou prises afin d’avertir les autorités pertinentes du danger.

3- UN GOUVERNEMENT PARALLÈLE : Dès le début, la nouvelle administration de Bush-Cheney créa un organisme bureaucratique spécial pour la collecte de renseignements, pour faire de la propagande et pour coordonner les préparatifs de guerre. Ce fut le bureau du Pentagone baptisé du nom de ‘Office de Planification Spéciale’ (OPS), lequel fut placé sous la supervision directe de Paul Wolfowitz (photo à droite), le secrétaire adjoint à la Défense.

Tel que rapporté par le renommé journaliste Seymour Hersh, le nouvel organisme avait été conçu avec comme but de contourner la C.I.A. et la propre agence de renseignements du Pentagon, la D.I.A., et devait servir de source principale de renseignements pour le Président Bush concernant la possession possible par l’Irak d’armes de destruction massive et la relation éventuelle de ce dernier pays avec le réseau terroriste al Qaïda. La nouvelle agence avait aussi comme mission de trouver des arguments ou des prétextes pour que les États-Unis puissent se lancer en guerre contre l’Irak. Douglas Feith, un sous-secrétaire à la Défense, dirigeait l’organisme quasi secret, assisté de William Luti, un ancien officier de la marine et un ex-collaborateur du vice-président Dick Cheney.

Un fait important qui aurait dû faire l’objet d’une enquête, mais qui ne l’a pas été, était la facilité avec laquelle certains généraux israéliens avaient libre accès à l’OPS, tel que cela fut rapporté par la lieutenant-colonel Karen Kwiatkowski, une spécialiste du Moyen-Orient et une haut gradée de la ‘Air Force’ US, affectée à l’agence.

4- UNE PROPAGANDE DE GUERRE : Suite aux évènements du 11 septembre 2001, peu d’Étatsuniens pensaient accuser l’Irak d’avoir été derrière les attaques terroristes, car aucun des 19 terroristes impliqués avait quelque rapport que ce soit avec l’Irak. En fait, les 19 pirates de l’air dans les attentats du 11 septembre étaient affiliés au groupe terroriste al-Qaïda et 15 sur 19 étaient des citoyens de l’Arabie Saoudite, 2 étaient des citoyens des Émirats arabes unis et les 2 autres venaient de l’Egypte et du Liban. Aucun d’entre eux ne venaient de l’Irak. De plus, leurs camps d’entraînement étaient situés en Afghanistan.

Voilà pourquoi, dans les sondages faits dans la foulée du 11 septembre 2001, seulement 3 pour cent des Étasuniens mentionnaient l’Irak ou Saddam Hussein comme responsables possibles des attentats. Il fallait donc, de toute évidence, changer cette perception si le gouvernement de Bush-Cheney voulait se lancer à tout prix en guerre contre l’Irak. C’est alors que fut lancée une campagne concertée pour soulever, dans l’esprit du public, le mythe des armes de destruction massive supposément cachées en Irak et les liens présumés que Saddam Hussein était sensé entretenir avec le réseau al-Qaïda, le tout avec le concours actif des médias néo-conservateurs américains.

Ainsi, en septembre 2003, la propagande avait tellement bien réussi que, selon un sondage du journal Washington Post, 69 pour cent des Étasuniens en étaient venu à croire que Saddam Hussein avait été personnellement impliqué dans les attaques menées par al-Qaïda, même si il n’y avait aucune preuve d’un tel lien entre les deux. Telle est la force de la propagande gouvernementale lorsque les médias collaborent dans l’exercice de désinformation.

L’histoire enregistrera que les États-Unis n’ont pas usé de représailles contre l’Arabie Saoudite, un pays qui avait beaucoup à voir avec les attaques terroristes du 11-Septembre, mais qu’il l’a fait avec violence contre l’Irak, un pays qui n’avait eu rien à voir avec les attentats. Ce fut un exemple remarquable de propagande de guerre, laquelle servit à monter un dossier falsifié contre l’Irak pour attaquer et envahir ce pays, sans égard à la vérité factuelle.

Tous ces faits sont bien documentés et corroborés. Les futurs historiens auront donc de nombreuses sources pour établir la vérité historique.

Conclusion

En alertant la population américaine sur la tricherie du gouvernement de Bush-Cheney pour aller à la guerre contre l’Irak, le candidat présidentiel Donald Trump a rendu un grand service à son pays. Il est irréfutable que la guerre que les Etats-Unis ont lancé au Moyen-Orient a causé beaucoup de destruction et beaucoup de misère en Irak et dans l’ensemble du Moyen-Orient. Et les séquelles de la catastrophe initiale se poursuivent encore aujourd’hui, treize ans après l’invasion militaire étasunienne de l’Irak en 2003.

Un événement comparable dans l’histoire récente où un pays fortement armé a envahi militairement un autre pays plus faible a été la décision du chancelier allemand Adolf Hitler d’envahir la Pologne le 1er septembre 1939, plongeant alors l’Europe dans le chaos pour de nombreuses années. Il faut espérer que le chaos actuel au Moyen-Orient, avec des opérations militaires menées par un si grand nombre de pays, tant en Irak qu’en Syrie, ne débouchera sur une catastrophe encore plus grande.

Rodrigue Tremblay, professeur émérite d’économie à l’Université de Montréal.

Source: Mondialisation