La Ligue arabe n’a jamais servi les intérêts du Monde arabe et n’a été (n’est) qu’un syndicat de dictateurs et de monarques absolus
Après plusieurs mois d’un silence douteux, alors que depuis cinq ans de nombreux pays arabes vivent des drames sanglants (la Syrie et la Libye bouclent leur cinquième année de chaos) ladite Ligue des Etats arabes, est revenue sur scène [mercredi dernier à Tunis lors de la réunion des ministres de l’Intérieur] en commettant une nouvelle turpitude qui défie l’entendement. Elle a ainsi classé le mouvement chiite libanais, Hezbollah, dans la liste noire des organisations terroristes.
Ce qui est terrible – outre que ce thème n’était pas à l’ordre du jour de la réunion – est le fait que cette décision n’a pas été prise après des débats, mais sur injonction de l’Arabie Saoudite, chef de file des monarchies du Golfe.
En vérité, la Ligue arabe n’arrête plus de s’enfoncer dans l’indignité qui autorisa en 2012, l’expulsion de la Syrie – membre fondateur de cette Ligue – et son remplacement par des rebelles, alliés au groupe jihadiste Jabhat al-Nosra, affilié à Al Qaïda, Ahrar al-Cham et bien d’autres. De plus, ce sont ces rebelles – cautionnés par la Ligue arabe – qui mettent la Syrie à feu et à sang depuis mars 2011.
Ainsi, à l’exception de trois ou quatre pays – dont l’Algérie qui a dit non – il y eut un honteux suivisme, sans autre forme de procès, des ministres arabes qui ne tentèrent d’aucune manière de porter le débat à un autre niveau que celui de l’invective et des représailles.
Voilà donc à quoi a été réduite la Ligue arabe qui, déjà, n’a jamais servi les intérêts du Monde arabe et n’a été (n’est) qu’un syndicat de dictateurs et de monarques absolus. Bien sûr, cela ne change en rien le sort d’un Monde arabe ballotté et pris en tenaille par les évènements sur lesquels il n’a pas de prise, mais en charge par des puissances étrangères, sous l’œil bienveillant, pour ne pas dire approbateur, de ladite Ligue arabe. C’est cette image détestable que renvoie la Ligue arabe, non pas d’elle-même – elle est tellement inconsciente de son inanité pour avoir un «quant-à-soi» – mais plus largement dudit Monde arabe et, singulièrement de ses dirigeants. Ces derniers, fermes, rigoureux et répressifs avec leurs peuples, sont tout miel, pour ne point dire veules, avec les puissances étrangères, notamment occidentales.
Longtemps, l’Egypte a mis sous sa coupe la Ligue, la considérant formellement comme l’annexe de ses affaires étrangères [d’ailleurs, à l’exception de la triste période de Camp David de 1979, entraînant l’expulsion de l’Egypte, tous les secrétaires généraux de l’organisation dite «panarabe» ont été d’anciens chefs de la diplomatie égyptiens] avant l’avènement éphémère du petit Qatar – qui imposa en 2012 la rébellion à la place de l’Etat syrien – et aujourd’hui de l’Arabie Saoudite qui agit en leader régional et prétend diriger la politique du Monde arabe, allant jusqu’à l’engager dans des guerres qui ne sont pas les siennes.
D’ailleurs, la participation de certains membres de la Ligue arabe à la coalition menée par les Etats-Unis ne s’est pas faite sous l’égide de cette dernière et suite à des consultations interarabes, mais séparément.
C’est encore l’Arabie Saoudite qui décida de frapper, en mars 2015, le Yémen causant une tragédie dans le plus pauvre des pays arabes.
En fait, la liste des ratages des enjeux géopolitiques par la Ligue arabe n’est pas exhaustive mais indicative de la vanité d’une organisation qui n’a jamais justifié sa raison d’être alors même qu’elle est la plus ancienne organisation internationale créée dans le monde après la Seconde Guerre Mondiale en mai 1945.
Dès lors, la Ligue arabe n’est-elle qu’une coquille vide, une girouette qui obéit au puissant de l’heure et à des ordres venus d’ailleurs? Cet ailleurs a été Le Caire, Doha, aujourd’hui Riyad, voire de l’étranger?
La Ligue arabe n’avait-elle pas cautionné en 2011 les frappes de l’Otan, de la France et de la Grande-Bretagne contre la Libye d’El Kadhafi? N’est-ce pas sous la pression d’un minuscule Etat, le Qatar, que la Syrie a été poussée hors de ses rangs? C’était à un moment où le Monde arabe tétanisé par lesdits «printemps arabes» avait perdu le sens des choses et ses pays le contrôle de leur destinée. La Ligue arabe, n’avait-elle pas réclamé l’intervention militaire US en Syrie? Comment, cette organisation pouvait-elle poser la problématique de la sécurité du Monde arabe quand elle n’a pas mesuré la portée de son soutien à des rebelles et à des interventions militaires étrangères contre ses pays membres?
En fait, l’Arabie Saoudite allume les feux de la fitna (sédition) entre les musulmans (chiites et sunnites) sans que la Ligue arabe dise halte, «il faut savoir raison garder», avalisant au contraire ces appels à l’explosion (affaire du Hezbollah).
Aussi, que lui reste-t-il d’autorité pour qu’elle puisse jouer son rôle de médiateur, voire d’arbitre, entre ses membres? La Ligue dominée par la «puissance» du moment, obtempère à ses ordres, même si ceux-ci risquent de mener le Monde arabe à l’abîme.
Par Karim Mohsen
Source: L'expression
Une organisation inutile: la Ligue arabe
Après plusieurs mois d’un silence douteux, alors que depuis cinq ans de nombreux pays arabes vivent des drames sanglants (la Syrie et la Libye bouclent leur cinquième année de chaos) ladite Ligue des Etats arabes, est revenue sur scène [mercredi dernier à Tunis lors de la réunion des ministres de l’Intérieur] en commettant une nouvelle turpitude qui défie l’entendement. Elle a ainsi classé le mouvement chiite libanais, Hezbollah, dans la liste noire des organisations terroristes.
Ce qui est terrible – outre que ce thème n’était pas à l’ordre du jour de la réunion – est le fait que cette décision n’a pas été prise après des débats, mais sur injonction de l’Arabie Saoudite, chef de file des monarchies du Golfe.
En vérité, la Ligue arabe n’arrête plus de s’enfoncer dans l’indignité qui autorisa en 2012, l’expulsion de la Syrie – membre fondateur de cette Ligue – et son remplacement par des rebelles, alliés au groupe jihadiste Jabhat al-Nosra, affilié à Al Qaïda, Ahrar al-Cham et bien d’autres. De plus, ce sont ces rebelles – cautionnés par la Ligue arabe – qui mettent la Syrie à feu et à sang depuis mars 2011.
Ainsi, à l’exception de trois ou quatre pays – dont l’Algérie qui a dit non – il y eut un honteux suivisme, sans autre forme de procès, des ministres arabes qui ne tentèrent d’aucune manière de porter le débat à un autre niveau que celui de l’invective et des représailles.
Voilà donc à quoi a été réduite la Ligue arabe qui, déjà, n’a jamais servi les intérêts du Monde arabe et n’a été (n’est) qu’un syndicat de dictateurs et de monarques absolus. Bien sûr, cela ne change en rien le sort d’un Monde arabe ballotté et pris en tenaille par les évènements sur lesquels il n’a pas de prise, mais en charge par des puissances étrangères, sous l’œil bienveillant, pour ne pas dire approbateur, de ladite Ligue arabe. C’est cette image détestable que renvoie la Ligue arabe, non pas d’elle-même – elle est tellement inconsciente de son inanité pour avoir un «quant-à-soi» – mais plus largement dudit Monde arabe et, singulièrement de ses dirigeants. Ces derniers, fermes, rigoureux et répressifs avec leurs peuples, sont tout miel, pour ne point dire veules, avec les puissances étrangères, notamment occidentales.
Longtemps, l’Egypte a mis sous sa coupe la Ligue, la considérant formellement comme l’annexe de ses affaires étrangères [d’ailleurs, à l’exception de la triste période de Camp David de 1979, entraînant l’expulsion de l’Egypte, tous les secrétaires généraux de l’organisation dite «panarabe» ont été d’anciens chefs de la diplomatie égyptiens] avant l’avènement éphémère du petit Qatar – qui imposa en 2012 la rébellion à la place de l’Etat syrien – et aujourd’hui de l’Arabie Saoudite qui agit en leader régional et prétend diriger la politique du Monde arabe, allant jusqu’à l’engager dans des guerres qui ne sont pas les siennes.
D’ailleurs, la participation de certains membres de la Ligue arabe à la coalition menée par les Etats-Unis ne s’est pas faite sous l’égide de cette dernière et suite à des consultations interarabes, mais séparément.
C’est encore l’Arabie Saoudite qui décida de frapper, en mars 2015, le Yémen causant une tragédie dans le plus pauvre des pays arabes.
En fait, la liste des ratages des enjeux géopolitiques par la Ligue arabe n’est pas exhaustive mais indicative de la vanité d’une organisation qui n’a jamais justifié sa raison d’être alors même qu’elle est la plus ancienne organisation internationale créée dans le monde après la Seconde Guerre Mondiale en mai 1945.
Dès lors, la Ligue arabe n’est-elle qu’une coquille vide, une girouette qui obéit au puissant de l’heure et à des ordres venus d’ailleurs? Cet ailleurs a été Le Caire, Doha, aujourd’hui Riyad, voire de l’étranger?
La Ligue arabe n’avait-elle pas cautionné en 2011 les frappes de l’Otan, de la France et de la Grande-Bretagne contre la Libye d’El Kadhafi? N’est-ce pas sous la pression d’un minuscule Etat, le Qatar, que la Syrie a été poussée hors de ses rangs? C’était à un moment où le Monde arabe tétanisé par lesdits «printemps arabes» avait perdu le sens des choses et ses pays le contrôle de leur destinée. La Ligue arabe, n’avait-elle pas réclamé l’intervention militaire US en Syrie? Comment, cette organisation pouvait-elle poser la problématique de la sécurité du Monde arabe quand elle n’a pas mesuré la portée de son soutien à des rebelles et à des interventions militaires étrangères contre ses pays membres?
En fait, l’Arabie Saoudite allume les feux de la fitna (sédition) entre les musulmans (chiites et sunnites) sans que la Ligue arabe dise halte, «il faut savoir raison garder», avalisant au contraire ces appels à l’explosion (affaire du Hezbollah).
Aussi, que lui reste-t-il d’autorité pour qu’elle puisse jouer son rôle de médiateur, voire d’arbitre, entre ses membres? La Ligue dominée par la «puissance» du moment, obtempère à ses ordres, même si ceux-ci risquent de mener le Monde arabe à l’abîme.