Le gouvernement d’union s’est autoproclamé en fonction le 12 mars sur la base d’un communiqué de soutien.
Les autorités libyennes non reconnues basées à Tripoli ont cédé le pouvoir mardi soir au gouvernement d'union nationale qui, appuyé par l'ONU et la communauté internationale, veut se poser comme une force de rassemblement pour sortir le pays du chaos.
Cette annonce a coïncidé avec la visite dans la capitale libyenne de
l'émissaire de l'ONU Martin Kobler qui tentait de convaincre ces derniers jours
les autorités basées à Tripoli de laisser s'installer le gouvernement du
Premier ministre désigné Fayez al-Sarraj.
Depuis son arrivée à Tripoli mercredi dernier, Sarraj et son équipe
étaient cantonnés dans la base navale de la capitale.
"Nous vous informons que nous cessons d'exercer nos fonctions exécutives,
présidentielles et ministérielles", a annoncé le gouvernement de Khalifa Ghweil
siégeant à Tripoli, dans un communiqué reçu par l'AFP et publié sur le site de
son ministère de la Justice.
Et de justifier sa décision, prise "au vu des développements politiques à
Tripoli", par la volonté de "mettre fin à l'effusion de sang et éviter la
partition" du pays. Il souligne à l'occasion qu'il n'était "désormais plus
responsable (...) de ce qui pourrait arriver dans l'avenir".
Le gouvernement Ghweil était soutenu par la coalition de milices Fajr
Libya, qui avait pris le contrôle de Tripoli en août 2014, poussant les
autorités reconnues par la communauté internationale à s'installer dans l'est
du pays.
Ce pays riche en pétrole, livré aux milices depuis la chute de Mouammar
Kadhafi en 2011, a sombré encore un peu plus dans le chaos avec ces deux
autorités rivales se disputant le pouvoir.
Le groupe terroriste wahhabite Daech a notamment tiré partie de ces profondes
divisions pour s'implanter dans le pays où il contrôle aujourd'hui la ville de
Syrte, à l'est de Tripoli.
Soutien de l'ONU
La communauté internationale, inquiète de cette instabilité en Libye, par
où transitent des milliers de migrants vers l'Europe, oeuvre depuis des mois à
l'établissement d'une autorité unique et représentative.
Le gouvernement d'union nationale est ainsi le fruit d'un accord politique
signé fin décembre au Maroc sous l'égide des Nations unies par certains députés
des deux Parlements rivaux.
"De retour d'une intense journée à Tripoli, je vois l'information du
gouvernement de Tripoli qui cède le pouvoir" au gouvernement d'union.
"Maintenant, les mots doivent être suivis par des actes", a tweeté en soirée
Kobler.
Plus tôt dans la journée, il avait rencontré Sarraj pour l'assurer du
soutien de l'ONU.
L'entretien entre le Premier ministre et M. Kobler a porté sur "les moyens
d'appuyer l'action" du gouvernement d'union et du Conseil présidentiel, un
organe représentant les différentes factions libyennes qui a piloté la
formation de l'exécutif, a indiqué à l'AFP un conseiller de Kobler qui a
préféré garder l'anonymat.
"Nous voulons montrer le soutien de l'ONU et de la communauté
internationale au Premier ministre Sarraj et aux membres du Conseil
présidentiel", a dit M. Kobler à l'AFP.
"J'encourage chacun à coopérer en vue d'un transfert du pouvoir immédiat et
pacifique. L'ONU se tient prêt à fournir toute l'aide nécessaire à cette fin",
avait-il ajouté.
Outre sa rencontre avec le Premier ministre désigné, Kobler s'est
entretenu avec des responsables municipaux à la mairie de Tripoli.
Retour des ambassades ?
Depuis son arrivée mercredi à Tripoli, le gouvernement d'union a reçu le
soutien d'institutions clés comme la Banque centrale et la compagnie nationale
pétrolière ainsi que celui de municipalités de villes de l'ouest et du sud
libyens.
A l'étranger, la Tunisie voisine a annoncé lundi sa décision de rouvrir son
ambassade à Tripoli, fermée en 2014 quand la ville était tombée aux mains de
Fajr Libya.
Les pays européens avaient fait de même face au chaos grandissant mais
mardi la France a également dit étudier un retour.
"La question du retour de nos ambassades est, évidemment, d'actualité", a
déclaré mardi le ministre français des Affaires étrangères Jean-Marc Ayrault.
"Il reste beaucoup de questions sur le niveau de soutien populaire dont
bénéficie le gouvernement d'union nationale que ce soit à Tripoli ou dans
l'Est", note toutefois une analyse du cabinet de consultants Soufan Group
spécialisé dans le renseignement.
Les autorités basées dans l'est du pays, qui avaient rejeté jusqu'à présent
le gouvernement d'union nationale, n'avaient pas réagi dans l'immédiat à la
décision des autorités rivales de Tripoli.
Pour être officiellement investi, le gouvernement d'union aurait dû obtenir
la confiance du Parlement de l'Est, basé à Tobrouk. Mais ce vote n'a jamais eu
lieu faute de quorum.
Le gouvernement d'union s'est alors autoproclamé en fonction le 12 mars sur
la base d'un communiqué de soutien publié par une centaine de parlementaires de
Tobrouk (sur 198).
Avec AFP