Plusieurs facteurs ont favorisé la victoire de Rifi à Tripoli.
L’ancien Premier ministre Saad Hariri est sorti vaincu du dernier round des élections municipales tenu dimanche au Nord Liban. Alors qu’il se targuait d’être le dirigeant numéro un des « sunnites » à travers le pays, les résultats du scrutin de dimanche ont montré le contraire.
C’est Ashraf Rifi, dirigeant politique originaire de Tripoli et dissident du Courant du Futur, qui l’a remporté sur Hariri, infligeant un fiasco retentissant au courant bleu !
Oui, un fiasco retentissant puisque le Futur s’est allié avec toutes les forces représentatives du Nord avec l’espoir de réaliser une victoire écrasante aux municipales, signe prémonitoire des résultats des élections législatives au Liban.
Ainsi, les candidats aux municipales soutenus par le Courant du Futur, l’ancien ministre Mohammad Safadi, la Jama’a Islamiya, et l’ancien ministre Fayçal Karamé, tous alliés dans une seule liste, n’ont pas tenu bon face à ceux soutenus par Rifi.
Le Futur a cherché à s’allier même avec ses adversaires politiques de longue date, la famille Karamé, pour arracher une victoire « stratégique » dans cette région longtemps abandonnée par Hariri. Mais les choses ont mal tourné !
Primo, la machine électorale du Futur était parmi les plus faibles, rapportent des journalistes sur place. Une faible présence des délégués du courant bleu a été signalée dans les rues de Tripoli, contrairement à ceux de Karamé, Safadi et Rifi.
Une journaliste du quotidien al-Akhbar rapporte les interrogations d’un représentant du Futur dans la machine électorale du parti : « Y a-t-il vraiment des élections aujourd’hui ? ».
"Pas de contacts avec l’électorat, aucune visite effectuée chez les gens, pas de coordination sur le terrain : la machine électorale du Futur s’est fusionnée avec les autres machines électorales alliées, de loin plus actives et plus populaires", estime cette source.
Secundo, pas une bannière ni drapeau du Futur, ni même photo de Saad Hariri ou de son père, ne flotte dans le ciel tripolitain. Ceci suffit à lui seul pour refléter à quel point la popularité de ce courant s’est dégradée ces dernières années.
Dans cette région déchirée pendant de longs mois par les combats fratricides et la montée de l’extrémisme en raison de la proximité géographique avec la Syrie en guerre, le soutien populaire au courant Hariri a connu une chute libre, lui qui était complètement absent de toutes les épreuves qu’a connues la capitale du Nord.
«Ce n’est pas facile de s’adresser à une population avec laquelle nous n’avons pas communiqué depuis des années », admet un élément de la machine électorale du Futur, résumant ainsi la complexité de la situation pour ce parti.
Celui-ci ajoute : « C’est la première fois que les candidats soutenus par Hariri se sentent les plus faibles sur la liste de Tripoli » !
Tertio, Rifi qui avait promis d’infliger une « leçon inoubliable » à Saad Hariri, a déployé des jeunes dans toutes les rues de Tripoli et à l’entrée de chaque bureau de vote. Ses photos sont collées sur chaque mur de la ville.
Il avait effectué un sondage quelques semaines avant les élections. Le résultat montrait qu'il était grand favori pour la victoire. Les adversaires se sont alors moqués de lui.
Passant de l’action sécuritaire à celle politique, celui-ci a réussi à combler la vacance politique née du long voyage de Saad Hariri en France et en Arabie Saoudite.
Malgré cette concurrence, Rifi tient à assurer qu’il n’est pas en guerre avec Saad Hariri. Il se réjouit pourtant d’avoir brisé le fameux slogan de Hariri : « Votez la liste toute entière ! ».
Rifi est donc le vainqueur, et le courant du Futur est devenu du passé dans la capitale du Nord, Tripoli !