30-04-2024 05:10 PM Jerusalem Timing

L’Allemagne veut profiter du Brexit pour faire avancer la défense européenne

L’Allemagne veut profiter du Brexit pour faire avancer la défense européenne

Berlin se fixe comme objectif de long terme une "union" européenne de la Défense, que le Royaume-Uni a toujours freiné

Longtemps critiquée pour se contenter de la "politique du chéquier", l'Allemagne s'est fixée mercredi pour objectif de jouer un rôle militaire accru dans le monde et entend profiter du Brexit pour faire avancer la défense commune de l'Union européenne.
   
"Nous n'oublierons jamais d'où nous venons mais précisément, du fait des leçons de l'histoire, on voit aussi que l'inaction peut être coupable", a souligné la ministre de la Défense, Ursula von der Leyen, lors de la présentation d'un "Livre blanc" fixant les nouvelles directives de l'armée allemande.
   
Ce document de 83 pages - le dernier datait de 2006 - constitue une feuille de route pour la Bundeswehr pour les prochaines années, en insistant sur le rôle de premier plan qu'elle doit désormais assumer sur la scène internationale.
   
Première puissance économique européenne mais longtemps dépeinte en "nain politique" traumatisé par la Seconde guerre mondiale, l'Allemagne "est de plus en plus perçue comme un acteur central en Europe". Elle a désormais "la responsabilité de contribuer à façonner l'ordre mondial de manière active", souligne le document.
   
  'Le monde a changé'
 
"Le monde a changé et le rôle de l'Allemagne dans le monde a changé (...) Nous ne nous faisons pas plus grands ni plus petits que nous sommes. Nous sommes prêts à prendre des responsabilités (et) à diriger", à la mesure de ce que faire le pays, a insisté Mme von der Leyen.
   
Ce volontarisme parachève le changement de paradigme en Allemagne amorcé il y a une vingtaine d'années, lorsque la Bundeswehr a été autorisée, en 1994, à participer aux opérations multilatérales de maintien de la paix, après des décennies de réticences liées au bellicisme nazi. Cinq ans plus tard, l'armée allemande était pour la première fois depuis 1945 militairement engagée à l'étranger, au Kosovo, sous mandat de l'Otan.
   
Depuis, l'Allemagne, avec un peu plus de 177.000 militaires, déploie ses troupes sur de nombreux théâtres (Mali, Kosovo, Afghanistan). Récemment, le pays a même livré pour la première fois des armes à un groupe impliqué dans un conflit : les Peshmergas kurdes d'Irak, en lutte contre le groupe Etat islamique. Et la Bundeswehr va connaître sa première hausse d'effectifs depuis la fin de la Guerre froide.
   
Cette montée en puissance s'inscrit clairement dans un cadre atlantique et européen. Berlin se fixe comme objectif de long terme une "union" européenne de la Défense, lointain héritage du précédent projet avorté dans les années 1950, et entend profiter du départ programmé de l'UE du Royaume-Uni, qui a toujours freiné les avancées dans ce domaine, pour enfin progresser.
   
"Nous avons longtemps pris des précautions à l'égard du Royaume-Uni", a dit la ministre, en estimant que le refus de Londres avait "paralysé" l'évolution de l'Europe de la Défense. "Cela n'est pas bon car les Européens attendent à juste titre (des avancées) de l'UE sur ces grandes questions", a-t-elle ajouté.

"Cette possibilité est désormais là", à la suite du vote des Britanniques en faveur d'une sortie du bloc, a-t-elle ajouté, le jour même où Theresa May doit devenir la nouvelle Première ministre et mettre en œuvre le Brexit.
   
Le "Livre blanc" propose entre autres que la Bundeswehr recrute aussi parmi les ressortissants de l'UE, ce que refuse le syndicat des soldats allemands
   

 'Défi' russe
   
Dans le sillage du sommet de l'Otan, le nouveau cadre de l'armée allemande juge par ailleurs que la Russie constitue l'une des principales menaces. Elle est susceptible à terme de "représenter un défi pour la sécurité" en Europe, dit le document.
   
Hasard de calendrier ou pas, il a été adopté le jour même où représentants de l'Alliance atlantique et de la Russie se retrouvent à Bruxelles, après le sommet de Varsovie où l'Otan a décidé de déployer jusqu'à 4.000 soldats à l'Est face à la menace russe.
   
"La Russie semble prête à aller aux limites des obligations internationales actuelles" et cette attitude "exige des réponses des pays concernés, mais aussi de l'UE et de l'Otan", insiste le Livre blanc.