"La christianophobie, qui existe, qui est réelle, passe complètement inaperçue, comme si on avait affaire à un phénomène banal".
"Tout sera fait pour protéger nos églises", a déclaré François Hollande après l'attentat de Saint-Etienne-du-Rouvray. La France a-t-elle réellement les moyens de protéger toutes ses paroisses, alors que le territoire français compte plus de 50.000 lieux de culte?
On compte en France quelques 45.000 églises catholiques et 3.000 temples protestants. 700 écoles juives et synagogues et plus de 1.000 des 2.500 mosquées de l'Hexagone font déjà l'objet de mesures de protection dans le cadre de l'opération Sentinelle. 1.200 églises bénéficient aussi d'une protection. Pour autant, il apparaît impossible de protéger toutes les paroisses.
Pour Samir Amghar, de l'European Foundation for Democracy de Bruxelles, auteur de l'ouvrage "Le Salafisme d'aujourd'hui", ce n'est qu'une déclaration pour rassurer la population.
"Les forces de l'ordre et de sécurité en France ne sont pas extensibles à l'infini. Non seulement ces forces doivent protéger les lieux stratégiques dans la capitale: aéroports, gares, etc., où il peut y avoir des attentats, mais ils doivent également protéger les lieux de culte dont le nombre s'élève à 50.000 sur le territoire français. Vous ne pouvez pas mettre un gendarme ou un soldat à tous les lieux de culte", a indiqué à Sputnik M.Amghar.
En 2015, selon le ministère de l'Intérieur, on dénombre 810 atteintes ou profanations de lieux de culte et cimetières chrétiens, un chiffre en progression de 20 %. C'est un peu plus que les agressions antisémites (806, en baisse de 5 %) et nettement plus que les actes antimusulmans (429), même s'il est vrai que ces derniers ont triplé en un an.
Selon Samir Amghar, il y a une mobilisation très forte de la classe politique lorsque les lieux de culte juifs sont touchés, dans une moindre mesure lorsque les mosquées sont touchées, il y a une quasi absence de mobilisation lorsque les lieux de culte chrétiens sont touchés.
"La christianophobie, qui existe, qui est réelle, passe complètement inaperçue, comme si on avait affaire à un phénomène banal. Cela ne surprend plus, une église taguée. Cela ne surprend plus de voir un crucifix brisé. Pourquoi? Parce que vous êtes dans une société hyper-sécularisée qui a fondé une partie de son existence politique sur une forme d'anticléricalisme", a-t-il fait valoir.
Charles De Meyer, président de l'Association "SOS Chrétiens d'Orient", partage le même point de vue sur le phénomène de christianophobie qui existe dans l'Hexagone.
"En France, la conjonctions des facteurs, c'est depuis longtemps une discrimination, une véritable christianophobie d'Etat", a souligné M.De Meyer.
Selon lui, la réaffirmation du rôle de l'Eglise et du christianisme est la seule solution pour combattre la barbarie islamiste.
On se rappelle que le Pape François a proposé à chaque paroisse d'"adopter une famille de migrants", François Hollande a pour sa part promis au Pape de protéger les chrétiens. Mais qui doit-on protéger, et contre qui?
Charles De Meyer note qu'en France, la migration officielle est très importante, les chiffres s'élèvent facilement à 300.000 personnes arrivant dans l'Hexagone chaque année, ce qui empêche de conserver l'identité française. Cependant, il ne faut pas oublier les gens qui vraiment dans le besoin, qui sont forcés de quitter leur territoire.
"Les Français doivent d'abord défendre les gens ici, les paroisses — leurs familles. Pour ce qui est des réfugiés, il faut arrêter de mentir, aujourd'hui la France ne peut pas les accueillir, elle ne sait plus le faire, elle n'a plus les éléments pour le faire, elle doit laisser à d'autres pays la charge de le faire, et surtout elle doit tout faire pour cesser les guerres au Proche-Orient qui déracinent ces gens, qui seraient bien plus heureux chez eux", a expliqué M.De Meyer.
En guise de conclusion, Samir Amghar a fait remarquer qu'il faut éviter d'inscrire cette guerre contre la barbarie islamiste dans une sorte de guerre religieuse et de répondre d'une façon symétrique à ce que fait Daech. L'Etat islamique, en commettant un attentat dans une église, veut inscrire son combat dans le combat religieux. Lorsque l'acte est porté dans un lieu de culte, lorsque les attentats sont commis dans un lieu de rassemblement très symbolique, le 14 juillet, ils signifient la volonté d'en découdre avec les valeurs européennes.
"Il faut s'opposer aux idées de Daech, mais de façon à éviter que les sociétés occidentales se fractionnent. Le Président de la République dit: +Je suis là pour protéger tous les chrétiens+ Oui. Mais, avant tout, il doit protéger l'ensemble des citoyens quelle que ça soit leur confession et les athées", a conclu M.Amghar.