La surveillance et la censure dans le Royaume wahhabite: une atteinte flagrante à la liberté d’expression
Les autorités sécuritaires saoudiennes ont bloqué vendredi le site d'informations iranien Farsnews sur le réseau internet de l'Arabie-saoudite, a rapporté Farsnews.
En effet, dés que l'on tente d'accéder au site Farsnews, l'internaute est averti que le site en question a été bloqué pour avoir enfreint les règlements et les lois du ministère saoudien de la Culture et de l'information .
Ce n'est pas la première fois que les autorités saoudiennes bloquent le site Farsnews sous de faux prétextes.
La surveillance et la censure dans le Royaume wahhabite: une atteinte flagrante à la liberté d'expression
Il faut rappeler que depuis les soulèvements populaires dans les pays arabes en 2011, la surveillance et la censure dans le Royaume wahhabite, se sont intensifiées réduisant à une peau de chagrin le seul espace de liberté pour les opinions et informations non officielles.
A titre d'exemple, la plateforme de vidéos YouTube a été bloqué en décembre 2013 . Six mois plus tôt, l’accès au service Viber avait été coupé.
A Riyad, les principaux Ennemis d’Internet sont la Commission en charge des communications et des technologies de l’information et l’Unité des services d’Internet. Loin de s’en cacher, elles assument leur choix de censure et revendiquent le blocage d’environ 400 000 sites.
Depuis octobre 2006, la Commission des communications et des technologies de l’information (Communications and Information Technology Commission, CITC) est chargée de la régulation et du criblage d’Internet dans le pays. Des milliers de sites sont ainsi censurés.
Fin 2013, un article publié dans le quotidien de référence Al-Hayat (installé à Londres) annonce que l’Autorité des médias audiovisuels va créer un nouvel organe de censure, chargé de surveiller et de censurer le contenu vidéo de certains sites Internet, notamment sur YouTube. Autre disposition dans l’air : les Saoudiens souhaitant partager des vidéos sur Internet devraient obtenir au préalable une autorisation de ce nouvel organe et se plier aux termes et conditions de la production de contenus. Seules les utilisations de YouTube qui « conviennent à la culture, aux valeurs et traditions » saoudiennes seraient autorisées. Il n’a pas été précisé si la censure portait sur les vidéos postées depuis l’Arabie Saoudite ou sur l’ensemble du contenu de YouTube. Le Président de l’Autorité a critiqué l’article, mais il n’a pas pour autant démenti l’information…
Pour verrouiller le tout, la société gouvernementale Saudi Telecom Company (STC) a longtemps été le seul opérateur de télécommunications du pays (mobile et Internet), avant que le marché ne s’ouvre. Mais les sociétés privées bénéficient toutes de licences de la STC. Sans parler de la surveillance des cybercafés, qui doivent être équipés de caméras cachées et tenir le registre précis de leurs clients en relevant leur identité.
Le nombre de sites d’information interdits en hausse
Parmi les sites d’information interdits : celui de l’Arab Network for Human Rights Information (ANHRI), les sites gulfissues.net, saudiinstitute.org, saudiaffairs.net, etc. Le site de l’ONG Amnesty International a été bloqué après avoir rendu public un projet de loi antiterroriste destiné à réprimer plus durement les critiques de la famille royale. D’autres sites ont été bloqués en réaction aux révolutions arabes.
Les forums et les réseaux sociaux font également l’objet d’une surveillance renforcée. Les sites participatifs sont tout particulièrement visés. newarabia.org, un forum de discussions politiques, est inaccessible dans le pays. La plateforme blogger.com, initialement bloquée dans son intégralité, fait désormais l’objet d’une censure ciblée de son contenu.
En juin 2013, la CITC avait annoncé avoir coupé l’accès au service Viber – qui permet d’effectuer gratuitement des appels téléphoniques – pour ses « manquements aux règlements saoudiens ». La volonté des autorités de s’en prendre à YouTube en décembre dernier intervient après le succès de la campagne de mobilisation pour le droit des femmes à conduire en Arabie Saoudite et la fameuse parodie de la chanson de Bob Marley No women no drive par l’humoriste Hisham Fageeh.
En février 2014, l’ONG de défense des droits de l’homme ANHRI a rapporté la fermeture d’une dizaine de sites Internet « opposés aux valeurs du régime saoudien », ainsi que celle de 41 sites Internet, au motif qu’ils n’avaient pas respecté la législation relative aux médias électroniques.
Prison et coups de fouet
Détentions et procés arbitraires des blogueurs et des journalistes
Les blogueurs qui osent aborder des sujets sensibles s’exposent aux représailles. Le 29 juillet 2013, la Cour criminelle de Jeddah a ainsi condamné Raef Badawi à sept ans de prison ferme et 600 coups de fouets. Fondateur du site Internet de débat social et politique Libéraux saoudiens (censuré depuis), Raef Badawi a été arrêté le 17 juin 2012 et détenu à la prison de Briman à Jeddah. Il est accusé d’avoir « créé et modéré un site Internet diffusant des propos qui offensent la religion, les figures religieuses officielles, dont la Commission pour la promotion de la vertu et la prévention du vice, et d’avoir enfreint les règles fondamentales de la sharia ». Le juge Al-harbi a rallongé la peine initiale de trois mois pour « désobéissance parentale».
Le 27 octobre 2013, Tariq Al-Moubarak, chroniqueur pour Asharq al-Awsat, quotidien saoudien basé lui aussi à Londres, a été arrêté après la publication de plusieurs de ses articles sur des sujets sensibles en Arabie Saoudite. Dans l’un d’eux, paru dans la version papier du journal le 6 octobre et intitulé « Il est temps de changer la place de la femme dans le monde arabe », il critiquait entre autres choses l’interdiction de conduire imposée aux femmes de son pays. Dans un autre article publié le 26 octobre, «Quand la mafia menace… », il dénonçait la terreur qui règne dans les sociétés arabes et empêche les individus de jouir pleinement de leurs libertés fondamentales. Il a été relâché huit jours plus tard.
Fin octobre 2013, Waleed Abu Al-Khair, avocat et défenseur des droits de l’homme – il est notamment l’avocat de Raef Badawi -, a été condamné à trois mois de prison ferme pour avoir signé, en 2011, une pétition critiquant les lourdes peines infligées à seize réformateurs saoudiens.