Washington dénonce les frappes mais ne condamne par la coalition. Un crime de guerre, selon Amnesty.
A peine deux jours après le bombardement saoudien ayant tué dix enfants dans une école dans la province yéménite de Saada (nord), l’aviation de la coalition dirigée par l’Arabie saoudite a visé un hôpital, également dans le nord du pays. Ce pilonnage a causé le martyre de onze personnes.
Neuf personnes ont été tuées sur le coup lundi après-midi et deux autres patients ont perdu la vie pendant leur transfert vers un autre hôpital, a annoncé dans un communiqué Médecins sans frontières (MSF), accusant la coalition d’être responsable de cette frappe.
Situé dans la province de Hajja, l'hôpital d'Abs, où travaille une équipe de MSF depuis juillet 2015, a été en partie détruit et tous les patients et membres du personnel soignant survivants ont été évacués, a ajouté l'organisation.
Elle a souligné que la localisation exacte de cet établissement était bien connue de la coalition.
"Il s'agit d'un hôpital rural qui était très rempli au moment de la frappe, même s'il est difficile de dire combien de patients s'y trouvaient", a expliqué à l'AFP Teresa Sancristoval, responsable de l'ONG pour les opérations d'urgence au Yémen, selon laquelle "un électricien de MSF" figure parmi les morts.
C'est "la quatrième attaque" contre un site de MSF "en moins de 12 mois", a-t-elle relevé.
Un crime de guerre, selon Amnesty
"Cibler intentionnellement des installations médicales est une grave violation du droit humanitaire qui pourrait constituer un crime de guerre", a de son côté estimé l'ONG Amnesty International, réclamant une enquête.
Des sources militaires proches du président démissionnaire Abed Rabbo Mansour Hadi ont prétendu que des véhicules militaires avaient transféré de la ville d’Harad des blessés d’Ansarullah à l'hôpital d'Abs, laissant entendre que les raids avaient visé l'établissement pour cette raison.
Abs se trouve à la lisière de la ville d'Harad, à la frontière avec l'Arabie saoudite.
Fréquemment cible de la coalition, Harad est aussi le théâtre de combats acharnés entre mercenaires de la coalition appuyés par des soldats de la coalition et les combattants de l’armée et d’Ansarullah.
Les raids aériens et les combats terrestres avaient repris de plus belle mardi au Yémen, trois jours après l'échec des pourparlers de paix au Koweït entre la délégation nationale et celle soutenue par Ryad.
Washington dénonce les frappes mais ne condamne par la coalition
En réaction, les Etats-Unis ont dénoncé lundi les raids ayant visé l’hôpital, mais sans condamner explicitement la coalition pilotée par l'Arabie saoudite et que Washington soutient.
"Nous sommes profondément préoccupés par des informations concernant une frappe sur un hôpital dans le nord du Yémen (...) Les frappes sur des infrastructures humanitaires, notamment des hôpitaux, sont particulièrement inquiétantes", a protesté la porte-parole du département d'Etat Elizabeth Trudeau.
Sans vouloir confirmer de source officielle américaine ce raid, sa cible et les victimes, la diplomate a indiqué que les Etats-Unis "condamneraient bien entendu n'importe quel bombardement d'hôpital".
Et en se gardant de montrer du doigt la coalition, Mme Trudeau a appelé "toutes les parties à cesser immédiatement les hostilités".
Interrogée sur l'éventuelle responsabilité de la coalition, la porte-parole de la diplomatie américaine s'est bornée à préciser que les Etats-Unis restaient "en contact étroit avec les Saoudiens" sur le sujet.
La coalition arabe ouvre une enquête
Quant à la coalition, elle a annoncé comme d’habitude l'ouverture d'une enquête.
Une équipe d'investigation de la coalition est "au courant des informations sur un raid aérien contre un hôpital à Hajja (...) et a de toute urgence lancé une enquête indépendante", a annoncé tard lundi l'équipe d'évaluation des incidents qui regroupe des enquêteurs membres des pays de cette coalition.
Après avoir obtenu "plus d'informations de la part de MSF", l'équipe annoncera ses conclusions, a-t-elle ajouté dans un communiqué relayé par l'agence de presse officielle saoudienne (SPA).
De nouvelles frappes contre Sanaa
Entre-temps, l’aviation saoudienne a mené mardi matin 10 raids contre la capitale Sanaa.
Le correspondant de la chaine yéménite AlMassirah, deux femmes et deux enfants ont été tués et 17 autres blessés dans deux raids contre des domiciles dans la région de Bani Hareth.
Une source sécuritaire citée par l’agence yéménite Khabar a fait état de cinq frappes contre un bâtiment militaire de l’armée, au nord-est de la ville.
Quatre autres raids ont visé le mont Attan, et une frappe a visé la base Daylami, au nord de la capitale.
Et puis, dans la région de Naham, l’aviation saoudienne a visé des secouristes, faisant 10 martyrs et 20 blessés.