Les médecins ont subi les pires sévices corporels et souffrent de séquelles psychiques importantes
Le docteur bahreïni Ibrahim Aradi a affirmé que le personnel médical était visé par les forces de l’ordre dès les premiers jours des protestations pacifiques réclamant des réformes.
Dans une interview accordée au quotidien libanais Assafir, Dr. Aradi a rappelé la position professionnelle prise par le cadre médical bahreïni à la suite des agressions militaires des forces de sécurité contre les manifestants, dont 600 ont été blessés par les balles à fragmentation prohibées aux premiers jours des attaques. Ceci a poussé les médecins à se répartir en groupes pour pouvoir soigner les blessés.
Opérant à l’hôpital Salmaniya avant de devenir réfugié politique en Europe, Dr. Aradi s’est attardé dans son interview sur les souffrances des médecins qui ont soigné les manifestations :
« Les forces de sécurité ne voulaient pas qu’on soignait les blessés, ils ont alors agressé les médecins qui ont été arrêtés, emprisonnés et jugés par les tribunaux militaires. Je ne peux décrire ce qui s’est passé aux médecins. Qu’ils soient hommes ou femmes, ils ont subi les pires sévices sexuels et les tortures, surtout après l’intervention du bouclier d’alJazira », raconte-il, citant l’exemple du Dr. Sadek elAkari, conseiller de la chirurgie générale, qui a été farouchement battu à l’intérieur de la tente médical. « Il souffre jusqu‘à aujourd’hui de fractures des os et des séquelles psychologiques importantes », a-t-il dit.
“Les médecins torturés prennent des anti-dépresseurs, et ont des tendances suicidaires. Sachant que si le cadre médical n’avait pas pris de position pareille, la communauté internationale et le monde arabe auraient été surpris par le nombre de victimes », a poursuivi Dr. Ibrahim Aradi, tout en rappelant que ce cadre médical ne s’était pas ingéré dans le processus politique que pour réclamer la démission du ministre de la santé pour avoir empêché l’arrivée des ambulances à la place de la Perle.
Interrogé sur la nature des blessures infligées aux blessés, Dr. Aradi a indiqué que les balles utilisées étaient des balles à fragmentation, ou celles utilisées pour la chasse aux oiseaux. « La plupart des blessés sont touchés à l’abdomen ou à la tête, à courte distance. Le martyr Ahmad Farhan avait le crâne complètement ouvert, alors que le martyr Reda Mohammad avait été blessé par les tirs de l’armée, sans que l’on ne puisse le secourir. Ironie du sort, le médecin a été jugé pour avoir tenté de soigner le martyr alors que les meurtriers ont été à l’abri de tout procès. D’autres ont été asphyxiés par des gaz toxiques, qui faisaient trembler la victime, ce qui nous laisse nous demander sur la nature de ces gaz utilisés ».
Et de poursuivre : « A l’entrée du bouclier d’alJazira à Bahreïn, les forces sécuritaires ont pris d’assaut l’hôpital Salmaniya et transporté tous les blessés au sixième étage : celui qui était opéré à la jambe, fut frappé à la jambe. Celui qui était blessé à la nuque fut battu à la nuque. Le peuple bahreïni n’oubliera jamais le communiqué gouvernemental qui avait annoncé que la place de la Perle et l’hôpital ont été purifiés, comme s’il parlait de microbes ! ».
Dr. Aradi a quitté le pays le 14 avril dernier après une campagne diffamatoire : « Ils ont diffusé des vidéos me montrant en compagnie d’une de mes collègues. Le régime a porté atteinte à mon honneur, à ma famille et à ma profession sans aucun indice à travers les médias confessionnels qui continuent de m’attaquer jusqu’à présent. Ils me recherchent partout dans le pays, et ils ont attaqué ma maison ».
Dr. Aradi a enfin qualifié le soulèvement à Bahreïn de la « révolution opprimée » qui est soumis à un blackout médiatique prémédité. Mais grâce aux efforts des Bahreinïs et des organisations des droits de l’homme, les choses s’améliorent et la cause du Bahreïn se fait connaitre de plus en plus.