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Les Etats-Unis veulent manipuler les réseaux sociaux sur Internet

Les Etats-Unis veulent manipuler les réseaux sociaux sur Internet

L’armée américaine est en train de développer un logiciel qui permettra de manipuler discrètement les médias sociaux par la création de faux profils afin d’influencer les conversations sur Internet et diffuser de la propagande pro

 

L’armée américaine est en train de développer un logiciel qui permettra de manipuler discrètement les médias sociaux par la création de faux profils afin d’influencer les conversations sur Internet et diffuser de la propagande pro-américaine.

Une société californienne s’est vu attribuer un contrat par le Commandement Central (CentCom) des Etats-Unis, qui supervise les opérations militaires au Moyen Orient et en Asie Centrale, pour le développement d’un service décrit comme « un service de gestion de profils en ligne » qui permettra à un employé de l’armée de contrôler jusqu’à 10 identités différentes situées partout dans le monde.

 

Selon des experts de l’Internet, le projet a été comparé aux tentatives de la Chine de contrôler et limiter la liberté d’expression sur Internet. Les critiques affirment qu’il permettra aux militaires US de créer un faux consensus dans les conversations en-ligne, de noyer les opinions indésirables et d’étouffer les commentaires ou articles qui ne correspondent pas à leurs propres objectifs.

 

La découverte que l’armée américaine est en train de développer des faux profils – connus par les usagers des médias sociaux comme des « faux-nez » (sock puppet ou sockpuppet en anglais – traduction proposée par Wikipedia ici http://fr.wikipedia.org/wiki/Faux-nez – NdT) – pourrait par ailleurs encourager d’autres gouvernements, sociétés privées ou organisations non-gouvernementales à faire de même.

 

Le contrat de CentCom stipule que chaque faux profil devra présenter un CV, un historique et des détails convaincants et que jusqu’à 50 contrôleurs devront être capables de gérer des fausses identités depuis leurs postes de travail basés aux Etats-Unis « sans risque d’être découverts par des adversaires sophistiqués ».

 

Le porte-parole de CentCom, le commandant Bill Speaks, a dit « cette technologie permet de mener des activités de blogueurs secrètes sur des sites en langues étrangères pour permettre à CentCom de contrer la propagande extrémiste violente de l’ennemi à l’extérieur des Etats-Unis. »

 

Il a dit qu’aucune des interventions ne s’effectuerait en anglais, car il serait illégal « de s’adresser à un public états-unien » avec une telle technologie, et que toute intervention en anglais dans un média social par CentCom serait toujours clairement identifiée comme telle. Les interventions seraient effectuées notamment en Arabe, Farsi, Ourdou et Pashtoune.

 

Centcom a affirmé que n’étaient pas concernés les sites basés aux Etats-Unis, de langue anglaise ou toute autre langue, et a spécifiquement affirmé que les réseaux Facebook et Twitter n’étaient pas visés. (nous voilà rassurés – remarque perfide du traducteur)

 

Une fois développé, le logiciel permettrait à des employés militaires US, travaillant 24/24h depuis leur poste de travail, de réagir à l’apparition de messages coordonnées publiés dans des blogs, forums et autres lieux d’échanges. Les détails du contrat laissent entendre que les postes seraient basés sur la base aérienne de MacDill prés de Tampa, Floride, et siège du Commandement des Opérations Spéciales des Etats-Unis.

 

Le contrat exige que chaque contrôleur se voie attribuer un « serveur privé virtuel » situé aux Etats-Unis et d’autres qui paraîtraient situés en dehors des Etats-Unis pour donner l’impression que les faux-nez seraient de véritables personnes localisées dans différentes parties du monde.

 

Le contrat exige aussi un « brouillage de trafic », qui intègre l’activité du contrôleur avec celui de gens extérieurs à CentCom de manière à offrir « une excellente couverture et un fort pouvoir de démenti. »

 

Le contrat sur les multiples profils aurait été attribué dans la cadre d’une opération appelée Operation Earnest Voice (OEV) (Opération Voix Sincère), qui a été développé à l’origine en Irak comme une arme de guerre psychologique contre la présence sur Internet de partisans d’Al Qaeda et d’autres unis contre les forces de la coalition (terme qui désigne les forces d’invasion de l’Irak – NdT). Depuis, OEV se serait développé en un programme de 200 millions de dollars et aurait été employé contre les djihadistes au Pakistan, Afghanistan et au Moyen orient.

 

OEV est perçu par le haut commandement militaire US comme un programme vital de lutte contre le terrorisme et l’extrémisme. Devant la commission des forces armées du Sénat américain l’année dernière, le Général David Petraeus, alors commandant du CentCom, a décrit l’opération comme un effort visant à « contrer l’idéologie et la propagande extrémiste et à garantir que des voix crédibles soient entendues dans la région. » Il a dit que l’objectif de l’armée US était d’être « les champions de la vérité ».

 

Le successeur de Petraeus, le Général James Mattis, a déclaré devant la même commission que OEV « soutient toutes les activités visant à contrer le discours de l’ennemi, y compris par des capacités d’intervention sur le Web et la distribution de produits internet ».

 

Centom a confirmé que le contrat de 2,76 millions de dollars a été accordé à Ntrepid, une société créée récemment à Los Angeles. Centcom a refusé de dire si le projet de multiples faux profils était déjà opérationnel ou de parler de toute autre contrat en relation.

 

Personne n’était disponible pour faire un commentaire chez Ntrepid.

 

Dans son rapport à la commission du Sénat, le général Mattis a dit : « OEV cherche à perturber le recrutement et la formation des kamikazes ; à empêcher des sanctuaires à nos adversaires ; à contrer la propagande et idéologie extrémiste. » Il a ajouté que CentCom travaillait « avec nos partenaires de la coalition » pour développer de nouvelles techniques et tactiques que les Etats-Unis pourraient utiliser « pour contrer l’adversaire dans le domaine internet ».

 

Selon un rapport de l’Inspecteur Général du Département de la Défense en Irak (« cour des comptes » – NdT) OEV était gérée par les forces multinationales plutôt que par CentCom.

 

A la question posée sur l’implication éventuelle de l’armée britannique dans OEV, le ministère de la défense britannique a répondu qu’il n’avait trouvé « aucun élément » qui puisse le confirmer. (nous voilà rassurés – remarque perfide du traducteur) Le Ministère de la défense a refusé de dire s’il a été impliqué dans le développement de ce programme, en déclarant : « Nous ne commentons pas nos cyber capacités ».

 

OEV fut abordée l’année dernière lors d’un rassemblement de spécialistes en guerre électronique à Washington DC, où un officier supérieur de CentCom a déclaré aux délégués que son objectif était de « communiquer des messages essentiels et de contrer la propagande de nos ennemis. »

 

La gestion de faux profils par l’armée US pourrait se heurter à des problèmes juridiques si elle devait être employée contre des citoyens états-uniens où nombre de personnes qui se sont livrées à des opérations sous faux-nez ont été mises en accusation.

 

L’année dernière, un avocat de New York qui se faisait passer pour un universitaire fut condamné à une peine de prison pour « usurpation d’identité ».

 

Il n’est pas clair si cette opération viole la loi britannique. Des experts juridiques disent qu’elle violerait la loi Forgery and Counterfeiting Act (Faux et Contrefaçon) de 1981, qui précise qie « une personne se rend coupable de faux par la création d’un faux instrument dans l’intention de l’employer pour induire quelqu’un à le considérer comme authentique, et par ce biais d’amener la personne à accomplir ou ne pas accomplir un acte afin de porter préjudice à elle-même ou à une tierce personne. » Mais ceci ne s’appliquerait que s’il pouvait être prouvé que le site internet ou le réseau social avait souffert d’un « préjudice ».

 

Nick Fielding et Ian Cobain

 17 mars 2011

Cet article a été modifié le 18 mars 2011 pour retirer des références à Facebook et Twitter, insérées lors de la publication initiale et pour ajouter un commentaire de CentCom reçu après publication et qui précise que ces sites ne sont pas visés.

Article original en anglais : http://www.guardian.co.uk/technology/2011/mar/17/us-spy-oper…

Traduction : VD pour le Grand Soir