Selon un entretien retranscrit par Silvia Cattori (journal de France culture du 20 octobre à 18h00), l’ex-ambassadeur de France en Libye met en cause le rôle des Occidentaux dans la chute du régime Kadhafi!
Dans le flot des commentaires consensuels évoquant la mort d’un "tyran sanguinaire", une voix libre, soudain, tranche : celle de l’ancien ambassadeur de France Christian Graeff (à Tripoli de 1982 à 1985) interrogé au journal de la radio publique France culture.
En effet, selon un entretien retranscrit par Silvia Cattori (journal de France culture du 20 octobre à 18h00), l'ex-ambassadeur de France en Libye met en cause le rôle des Occidentaux dans la chute du régime Kadhafi!
Christian Graeff se demande " Quand l’OTAN a-t-elle déjà tué un chef d’État ? ", ajoutant " Voilà. C’est ma question. Je fouille dans ma mémoire. Je ne trouve pas la réponse. Pour moi, il y a un assassinat politique. Il y a des responsabilités internationales en cause. L’épilogue sera long. (..) Mais pour ce dont je puis juger, je suis sûr qu’il y a là matière à œuvre de justice. Parce qu’on a entendu tellement de mensonges. Il y a eu tellement de sophistication dans la médiatisation de la guerre emmenée par l’OTAN en Libye au-delà, bien au-delà - oh combien au-delà - de la résolution 1973 des Nations unies, que les questions sortiront. Personne au monde n’est en état de les étouffer, ni en Europe ni aux États-Unis, encore moins en Israël".
A la question si les États-Unis, la Grande Bretagne et la France ont envoyé des hommes au sol par exemple , Christian Graeff répond que selon ses propres sources " les interventions armées de l’Alliance, de l’OTAN, ont été considérables".
Et d'ironiser: "Et les simulacres, n’est-ce pas, la couverture que l’on a cherché misérablement avec le Qatar et d’autres Émirats ou monarchies traditionnelles arabes sont dérisoires. C’est une rigolade".
Enfin, le diplomate français estime que le mandat de l’ONU a été outrepassé . "Tout le monde le sait… on a fait une pirouette, on a cru tromper son monde et puis … on ne dupe pas en démocratie les esprits libres. Les esprits serfs c’est autre chose. Les médias sont au centre du débat. Dans ce débat national, dans ce débat culturel, civilisationnel, qui trompe qui ?" conclut-il.
Dans le même ordre d'idée, pour Eric David, spécialiste du droit international, le bombardement de la colonne où se trouvait l’ancien dictateur libyen outrepassait le mandat de l’Onu.
Interrogé par TF1 News , sur si la mort de Mouammar Kadhafi - objet d’un mandat d’arrêt lancé par la Cour pénale internationale pour crimes contre l’humanité- est-elle un échec pour le droit international , Eric David répond:
"D’un point de vue uniquement juridique, ce n’est ni un échec ni un succès, c’est un fait. La question relève en effet plus du politique que du juridique. Tout dépend surtout des circonstances exactes de la mort . Si Kadhafi est mort lors d’un échange de coups de feu, a priori il n’ya rien d’illégal dès lors qu’il s’agirait de conséquences inhérentes à un combat. En revanche, s’il a été abattu froidement comme Oussama ben Laden, là, il est clair qu’il s’agirait d’une "exécution extrajudiciaire, donc une violation des droits humains les plus élémentaires et donc du droit international. Dans ce cas, on pourrait dire qu’il s’agit d’un échec pour le droit international puisque celui-ci n’admet pas que des gens soient exécutés sans autre forme de procès".
Mais encore..
Pour ce spécialiste du droit international, le fait que l'OTAN ait bombardé le convoi de Kadhafi "est une violation flagrante du droit international", car " l’Otan n’a pas respecté le mandat donné par l’Onu".
Toutefois, M.David fait remarquer que "ni les l’Assemblée générale des Nations unies ni le Conseil de sécurité ne s’étaient vraiment levés pour dénoncer les bombardements précédents. Or ceux-ci allaient déjà plus loin que ce qu’autorisaient les résolutions 1970 et 1973".
Source : Bellacio