Le pays s’engage, mine de rien, dans un bras de fer qui risque de prendre en otage la transition.. Les manifestations ne sont pas de simples rassemblements, et le bilan des morts ne cesse de hausser!!
35 morts et prés de 2000 blessés. C’est le bilan provisoire des affrontements de ces trois derniers jours, en Egypte, selon le ministère de la santé égyptien. Au Caire, tout comme à l’intérieur du pays, les Egyptiens sont sortis nombreux pour protester, selon eux, contre la trop forte présence de l’armée dans la gestion des affaires du pays. Cette manifestation a été réprimée dans le sang par les forces de l’ordre.
Les autorités affirment que la police n'a pas ouvert le feu sur les manifestants mais ces derniers ont brandi des cartouches, des douilles et des grenades vides de gaz lacrymogènes.
"Le peuple veut la chute du régime", ont scandé des milliers de manifestants avant et après la charge de la police, appuyée par des militaires qui étaient jusqu'à présent restés en retrait.
D'autres slogans visaient directement le maréchal Hussein Tantaoui, qui fut pendant vingt ans le ministre de la Défense de Moubarak et dirige le Conseil suprême des forces armées (CSFA), à la tête de l'Egypte depuis le renversement du "raïs".
Face à de tels évenements, le ministre égyptien de la Culture, Emad Abou Ghazi, a présenté sa démission pour protester contre la réaction du gouvernement face aux violences entre manifestants et forces de l'ordre, a rapporté l'agence officielle égyptienne Mena.
"J'ai présenté ma démission pour protester contre la manière avec laquelle le gouvernement a traité les derniers événements sur la place Tahrir" au Caire, a-t-il dit après les affrontements meurtriers entre les forces de l'ordre et des manifestants réclamant la fin du pouvoir militaire.
Le ministre a précisé qu'il ne reviendrait pas sur sa démission, présentéedimanche soir en Conseil des ministres
Bref..
Un scénario inattendu et inquiétant à seulement 9 jours des élections législatives, une étape décisive de cette révolution qui doit aboutir à la mise en place d’une Constitution, ouvrant ainsi l’horizon d’une nouvelle république !
Les organisateurs de cette marche, s’ils voulaient faire une démonstration de force, l’ont réussie.
Mais en face non plus, les autorités de la transition, notamment l’armée, n’ont pas voulu se laisser conter. Le pays s’engage, mine de rien, dans un bras de fer qui risque de prendre en otage la transition..
Si le calme ne revient pas rapidement, le risque d’un report est grand et ce serait alors créer les conditions d’une reprise en main de la situation par l’armée, principale cible des protestataires de la semaine dernière. La crise de confiance est manifeste, et c’est à l’armée de donner des assurances au peuple quant à sa mue afin de s’adapter au nouveau contexte.
Au lieu de cela, elle a voulu préserver ses prérogatives héritées de l’ancien régime, en exigeant le droit de gérer ses propres affaires et son budget. C’est une question délicate, importante pour l’Egypte en tant que puissance sous-régionale.
Mal posée, elle prend des allures de chantage politique. L’armée, principal pilier de l’ancien régime, sait qu’elle a des comptes à rendre au peuple, du moins certains de ses chefs. C’est ce qui explique que, d’une certaine façon, elle veuille avoir le contrôle du processus actuel afin de ne pas pâtir de la fougue des jeunes révolutionnaires. Malheureusement, on la soupçonne de ne pas être neutre et de continuer à faire le jeu de l’ancien régime sous le pavillon du PND.
Les Frères musulmans, dont le parti Liberté et justice fait figure de favori des élections, ont condamné l'intervention des forces de sécurité au Caire même si eux-mêmes s'étaient auparavant retiré de la place Tahrir. "Cela rappelle les pratiques du ministère de l'Intérieur de l'ancien régime", disent-ils dans un communiqué.
Mohamed ElBaradeï et Abdallah al Achaal, tous deux candidats potentiels à l'élection présidentielle, ont dénoncé les violences contre les manifestants et réclamé la formation d'un gouvernement de salut national, a rapporté l'agence de presse Mena.
Par la voix de Catherine Ashton, sa représentante diplomatique, l'Union européenne a invité les autorités égyptiennes à mettre fin aux violences contre les manifestants et à garantir le bon déroulement de la transition vers la démocratie.
Catherine Ashton a fait part de sa "profonde préoccupation" et a demandé le respect des droits de l'homme dans les opérations de maintien de l'ordre.
Les manifestations de ces derniers jours montrent que les Egyptiens, islamistes ou pas, n’ont pas baissé la garde, qu’ils entendent veiller sur leur révolution comme du lait sur le feu. Malheureusement, l’armée qui devait être un rempart contre toutes les déviations de cette révolution, risque d’être la nouvelle cible des révolutionnaires, parce qu’elle n’aura pas su se mouvoir entre ses propres intérêts et les aspirations du peuple.
Manifestement, la révolution coince quelque part.
Une partie de la solution est dans les mains de l’armée, pour que la révolution n’ait pas un goût d’inachevé.