Le nombre des tués étonne plus d’un. Il est question d’un nouveau gaz lacrymogène qui tue. Alors que le New York Times parlent des appéhensions de l’administration américaine.
Pas question pour les manifestants Égyptiens de lâcher du lest. Malgré le nombre stupéfiant des tués et des blessés !
Après la chute du raïs, le peuple veut la chute du mouchir, le maréchal, en allusion au président du Conseil suprême des forces armées (CSFA)
Alors que se tenait la réunion entre ce dernier avec plusieurs forces politiques pour mettre un terme à la crise dans le pays, des dizaines de milliers se sont rassemblés réclamant la remise immédiate du pouvoir à une autorité civile, conspuant et le conseil militaire qu'ils accusent de rééditer la politique de répression en vigueur sous le régime Moubarak.
Ils n’ont pas attendu l’heure prévue pour la manifestation massive organisée par les mouvements égyptiens à l'origine du soulèvement, dont la Coalition des jeunes de la révolution et le mouvement du 6 avril, prévu à 16H00 (14H00 GMT) pour réclamer la fin du pouvoir militaire et la formation d'un "gouvernement de salut national".
Le maréchal Tantaoui, ministre de la Défense pendant vingt ans sous Hosni Moubarak, et la hiérarchie militaire sont accusés par les manifestants de chercher à s'incruster et de perpétuer le système répressif de l'ex-président, poussé au départ après 30 ans à la tête de l'Egypte.
Manifestation de mardi : abstention des Frères musulmans et des salafistes
Fait marquant : les Frères musulmans et les Salafistes se sont abstenus d’y participer.
Dans un communiqué, les salafistes, soupçonnés d’être financés par l’Arabie Saoudite ont refusé les revendications des manifestants : « le fait de réclamer le départ du CSFA et du gouvernement actuel à ce moment aussi embarrassant va plonger le pays dans les troubles et le chaos et constitue une menace à l’entité de l’état égyptien et à toute la société », cite le texte, publié dans le journal égyptien AlAHram.
Sur la place Tahrir, les slogans sont tout le contraire :
« Nous avons renversé seulement Moubarak, mais son régime et la junte militaire sont encore là", affirme Hossam el-Hamalawy, un militant de gauche, ajoutant: "Ce qui ce passe, c'est la suite la révolution".
"Les salauds qui nous dirigeaient avant sont toujours en place. Je ne vois aucune différence entre aujourd'hui et le 25 janvier", date du début du soulèvement populaire, dénonce Mohammad Anwar, un employé de 31 ans.
Depuis l’éclatement des affrontements samedi, ce sont 28 manifestants qui ont été tués selon les agences de presse, et 33 selon la presse égyptienne. Alors que le nombre des blessés dépassent les 1900. Dans la nuit de lundi à mardi, deux personnes ont été tuées à Ismaïliya, selon des sources médicales dans un hôpital de cette ville sur la mer Rouge. Ailleurs dans le pays, police et manifestants s'opposaient à Alexandrie et Qena (centre), et Suez, sur la mer Rouge, et el-Arich dans le Sinaï.
Pour sa part, le ministère de l'Intérieur parle de 112 blessés parmi les membres des Forces de l’ordre, atteints par « des cocktails Molotov et des fusils de chasse » tirés par les manifestants.
Son communiqué fait aussi état de "116 émeutiers arrêtés au Caire, 46 à Alexandrie et 29 à Suez".
Sur cette question le quotidien égyptien Al Ahram rapporte, citant un responsable du ministère de l’intérieur, que 3 étrangers ont été arrêtés alors qu’ils participaient aux jets de ces cocktails contre les forces de l’ordre chargées de protéger le bâtiment du ministère en question.
AlAHram : l’accord d’accalmie avortée par une rumeur
Le journal affirme qu’un accord conclu dans la nuit de lundi à mardi pour mettre fin aux affrontements entre les forces de l’ordre et de l’armée d’un côté et les manifestants de l’autre a été sabordé par des rumeurs.
Comportant trois points : laisser la place Tahrir aux manifestants, à condition que leur contestation reste pacifique, et qu’ils ne s’approchent pas du bâtiment du ministère de l’intérieur, a peine a-t-il commencé à être mis en exécution qu’une information ou rumeur a circulé parmi les manifestants faisant état que les forces de l’ordre se préparent pour prendre d’assaut la place Tahrir. Et les affrontements ont repris de nouveau.
L’architecte de cet accord, cheikh Mozher Chahine avait auparavant mis en garde contre la présence de sbires du régime déchu qui œuvrent pour le faire avorter. En sortant de la mosquée, il a fait l’objet d’une agression.
Un gaz lacrymogène américain qui tue : Le CR
Pour sa part le quotidien libanais arabophone AsSafir, s’est arrêté sur les raisons de la mort des manifestants ayant succombé pour avoir inhalé des gaz lacrymogènes, signalant que leur nombre est stupéfiant.
« Jamais autant de personnes ne sont mortes pour cette raison », remarque le journal, rapportant que les forces de l’ordre ont utilisé une nouvelle marque de gaz, irrémédiables avec les moyens médicaux traditionnels : le CR
D’après les centres de recherches américains militaires, ce genre de bombes fabriquées aux Etats-Unis ne devraient pas être utilisées contre les humains et sont classées parmi les armes chimiques.
Certains centres estiment que le CR est cancérigène, alors que d’autres précisent que son impact dix fois plus nuisible que les gaz lacrymogènes courants altère les canaux des larmes des yeux, peut provoquer une cécité temporaire et gâter le système nerveux voire provoquer une paralysie soudaine. Le fait d’inhaler une grande quantité de ce gaz provoque la mort, conclut AsSafir.
Démission du gouvernement ou pas : le CSFA dans la ligne de mire
Lundi, le gouvernement a présenté sa démission au CSFA, mais la télévision publique a affirmé que l'armée l’a refusée, alors que le ministre de l'Information Osama Haikel, cité par la Mena, a déclaré que l'armée ne s'était pas encore prononcée.
Mais les manifestants gardent toujours l'oeil sur le CSFA
Sur la place Tahrir, les dizaines de milliers de manifestants scandaient toujours "Le peuple veut la chute du maréchal" Hussein Tantaoui, à la tête du conseil militaire et dirigeant de facto de l'Egypte.
"C'est bien. Maintenant c'est le CSFA qui doit démissionner et répondre de ses actes devant nous", a réagi Tarek Sabri, un enseignant de 35 ans.
"Nous avons besoin d'un gouvernement qui a de véritables pouvoirs. Aucun gouvernement sous l'égide du CSFA n'a de valeur", a renchéri Mohammed al-Hita, militant de 24 ans.
Dernière information dans ce dossier: le président du CSFA le maréchal HusseinTantaoui va s'adresser à la nation durant la nuit de ce mardi.
Le CSFA : promesses non tenues (Amnesty)
Selon Amnesty Internationale (AI), le CSFA n'a pas tenu ses promesses et certaines violations des droits de l'Homme commises depuis qu'il est au pouvoir sont pires que sous le régime de l'ancien président Hosni Moubarak.
"En jugeant des milliers de civils devant des tribunaux militaires, en réprimant des manifestations pacifiques, en élargissant le champ d'application de la loi sur l'état d'urgence en vigueur sous M. Moubarak, le CSFA a perpétué un système répressif contre lequel les manifestants du 25-Janvier ont combattu si ardemment pour parvenir à s'en débarrasser", affirme Philip Luther, directeur par intérim d'AI pour le Moyen-Orient.
"Ceux qui ont défié ou critiqué le conseil militaire - les manifestants, les journalistes, les blogueurs, les grévistes - ont fait l'objet d'une répression impitoyable, dans une tentative de les faire taire", poursuit-il dans un communiqué.
"Le bilan sur le respect des droits humains montre qu'après neuf mois de pouvoir en Egypte, le CSFA a étouffé les objectifs et les aspirations de la révolution du 25-Janvier", dénonce M. Luther.
Applaudie par la population pour ne pas avoir réprimé la révolte contre M. Moubarak et chargée d'engager le processus de démocratisation, l'armée fait désormais l'objet de vives critiques, accusée de multiplier les procès envers les civils et soupçonnée de vouloir se maintenir au pouvoir.
L'ONG assure que dans le domaine de la justice, le pouvoir militaire a fait "empirer" la situation. Elle affirme que 12.000 civils ont été jugés devant des tribunaux militaires au cours des neuf derniers mois, notamment pour des "violences mineures" ou pour "outrage envers l'armé".
Amnesty cite le cas du blogueur Maikel Nabil, enfermé pour 45 jours dans un hôpital psychiatrique après avoir entamé une grève de la faim pour protester contre sa condamnation à trois ans de prison.
"Après avoir entamé une grève de la faim en août, les autorités pénitentiaires lui ont retiré des médicaments vitaux pour son cœur", rappelle l'organisation, qui souligne également les tentatives du conseil militaire pour étouffer les articles défavorables à son égard.
Au lieu de protéger les manifestants, les forces de l'ordre, notamment l'armée, ont "violemment réprimé plusieurs manifestations, faisant plusieurs morts et des blessés".
L'ONG accuse également le conseil militaire de promettre des enquêtes afin d'écarter toute critique, notamment sur la poursuite de la pratique de la torture en prison.
Elle rappelle que 28 personnes ont été tuées lors d'une manifestation de chrétiens coptes d'Egypte le 9 octobre, citant des sources médicales qui ont fait état de victimes touchées par balles ou écrasées par des véhicules blindés.
"Au lieu d'ordonner une enquête indépendante, l'armée a annoncé qu'elle mènerait elle-même l'enquête et a rapidement fait taire toute critique", affirme le rapport.
Entre le CSFA et les USA: des liens tenus en secret
Force est de constater que depuis la reprise des manifestations, les déclarations américaines se font plutôt rares.
Dans une chronique, le quotidien américain New York Times voit dans les affrontements "le prélude d’un conflit chaotique et long pour le pouvoir, lequel porte en lui a fortiori des résultats non prévisibles et un défi majeur aux décideurs de la politique américaine".
Interrogé par le journal, le directeur exécutif du « projet démocratique pour le Proche orient », Stephen McInerney partage ces appréhensions et considère que « les gens à la place Tahrir voient que l’administration américaine soutient le CSFA ».
McInerney et Brian Catolis du Centre du progrès américain ont été désignés par la Maison Blanche pour suivre la situation égyptienne et donner leurs évaluations et conseils.
Dans leur rapport, les deux experts estiment que « le destin de la révolution égyptienne est douteux, car il n’est pas clair que le conseil militaire va céder le pouvoir », constatant qu’il « a reporté la suspension de l’état d’urgence, et qu’il a œuvré pour préserver les privilèges des officiers de l’armée ».
Selon un expert américain dans la question de l’armée égyptienne de l’université Georges Town, Paul Sulivan, « l’administration américaine et l’armée égyptienne sont en contact quotidien ininterrompu, officiel et non officiel ».
« Mais l’armée reste très discrète sur cette relation, ce qui est certes bien, car nous ne devrions pas faire sentir les Egyptiens que nous nous ingérons pour résoudre leur crise, ils ne seraient pas du tout satisfaits », conclut-t-il. Sulivan avait auparavant signalé que " les liens personnels entre les hauts-officeirs américains et égyptiens accordent beaucoup d'hégémonie à Washington".
L’armée au-dessus de tous
Sachant que les manifestations ont repris de plus bel en Egypte depuis vendredi dernier sur fond de la charte des principes fondamentaux de la constitution, rédigée par le vice-Premier ministre égyptien Ali Salmi.
Comprenant des principes obligatoires et non consultatifs, cette charte place l’armée au-dessus de tous les pouvoirs. Elle y est présentée comme étant le gardien de l’état, a l’instar de l’exemple turc qui régnait avant 2002.
En fonction de ce texte, elle est placée au-dessus du parlement dans la Constitution et au Budget et détient le droit de réviser et de surveiller les principes fondamentaux de la Constitution prochaine. De plus pas question que le parlement supervise ses dépenses militaires qui se devraient de surcroit être déterminées dans leur ensemble et non dans leurs détails.
Il lui reviendrait les décisions de guerre et de paix, car le président de l’état ne peut les prendre sans son consentement.