C’est le deuxième discours du dirigeant libyen depuis l’éclatement du soulèvement.
Le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi a estimé jeudi dans un message audio diffusé par la télévision que les manifestants servaient les intérêts du chef d'Al-Qaïda Oussama Ben Laden, affirmant en outre ne pas pouvoir quitter le pouvoir, celui-ci n'étant selon lui que moral.
Au dixième jour d'une révolte sans précédent dans le pays, le colonel s'adressait plus particulièrement aux habitants de la ville de Zawiyah (60 km à l'ouest de Tripoli) où, selon l'agence officielle Jana, des "terroristes" ont égorgé plusieurs soldats selon la "méthode (de l'ancien chef terroriste d'Al-Qaïda en Irak), Abou Moussab Al-Zarqaoui".
"Ces gens n'ont pas de vraies revendications, leurs revendications sont celles de Ben Laden", a affirmé le colonel Kadhafi.
Il a présenté ses "condoléances aux familles de quatre personnes des forces de sécurité tuées" à Zawiyah. "Je me demande si Ben Laden va aider à indemniser les familles" des victimes, a-t-il ajouté.
Il a en outre accusé Ben Laden et Al-Qaïda de manipuler les jeunes en leur donnant notamment des "pilules hallucinogènes".
"Ils profitent du jeune âge de ces gens parce que légalement, ils ne sont pas passibles de sanctions", a-t-il dit.
Il a exhorté les habitants d'arrêter les partisans du chef d'Al-Qaïda et de les traîner devant la justice.
A ceux qui l'appellent à quitter le pouvoir, qu'il détient depuis 42 ans, le colonel Kadhafi a indiqué que son pouvoir était seulement moral.
"Je n'ai pas le pouvoir de faire des lois ou de faire appliquer la loi. La reine d'Angleterre n'a pas cette autorité. C'est exactement mon cas", a-t-il dit.
"La situation est différente de l'Egypte ou la Tunisie. Ici, l'autorité est entre vos mains, les mains du peuple. Vous pouvez changer l'autorité comme vous voulez", a-t-il ajouté.
Le colonel Kadhafi est arrivé au pouvoir en renversant le vieux roi Idriss le 1er septembre 1969. En 1977, il avait proclamé la "Jamahiriya", la définissant comme un "Etat des masses" qui gouvernent par le biais de comités populaires élus, et attribué le seul titre de "Guide de la révolution".
"Mouammar Kadhafi n'a pas de poste officiel pour qu'il en démissionne. Mouammar Kadhafi est le chef de la révolution, synonyme de sacrifices jusqu'à la fin des jours", avait-il déjà affirmé mardi lors d'un discours télévisé adressé à la nation.
Dix personnes ont été tuées et des dizaines d'autres blessées jeudi dans l'assaut donné par les forces de sécurité contre Zawiyah, selon un bilan provisoire publié par un journal libyen.
Mardi, dans son premier discours public depuis le début de l'insurrection le 15 février, le colonel libyen avait juré de réprimer dans le sang les protestataires.
Mouammar Kadhafi était de plus en plus isolé jeudi, confronté à une opposition maîtresse de l'est du pays et sommé par l'Occident de stopper le bain de sang, la communauté internationale disant craindre une catastrophe humanitaire due à l'exode.
Les opposants semblent contrôler la région allant de la frontière égyptienne jusqu'à la localité d'Ajdabiya plus à l'ouest, en passant par Tobrouk, Derna et Benghazi, épicentre de la contestation à 1.000 km à l'est de Tripoli.
Au moins 300 personnes ont été tuées dans les affrontements entre manifestants et forces de l'ordre ou partisans du régime selon des sources officielles. Mais des organisations de défense des droits de l'Homme parlent d'un bilan plus élevé.