Quatre mois après la fin de l’opération, l’organisation ne s’est pas encore souciée des civils tués lors de ses frappes, dénonce Amnesty.
Plus de quatre mois après la fin de l'opération militaire de l'Otan en Libye, aucune enquête n'a été menée par l'Organisation concernant les victimes civiles dues à ses frappes dénonçait Amnesty International, lundi, dans un rapport intitulé "Libye : les victimes oubliées des frappes de l'Otan".
Amnesty, dont les équipes ont recensé sur place 55 victimes civiles identifiées, dont 16 enfants et 14 femmes tuées dans le cadre de frappes aériennes à Tripoli, Zlitan, Majer, Syrte et Brega, note que nombre de ces pertes sont dues "à des frappes aériennes lancées contre des logements privés, où Amnesty International, pas plus que d'autres, n'a découvert d'éléments prouvant qu'ils étaient utilisés à des fins militaires au moment de l'attaque".
Un bilan d'ailleurs très proche de celui de la Commission internationale d’enquête sur la Libye dans son rapport final rendu au Conseil des droits de l'homme des Nations unies. La commission conclu en effet dans ce dernier que "sur vingt raids de l’Otan examinés, la Commission a recensé cinq raids durant lesquels 60 civils au total avaient été tués et 55 autres blessés".
Pas d'investigations
L'ONG insiste sur le fait que "l'Otan n'a pas mené les investigations nécessaires, ni même tenté d'entrer en contact avec les survivants et les familles des victimes".
"Il est profondément décevant que les victimes qui ont survécu et les familles des personnes tuées par les frappes aériennes de l'OTAN ne sachent toujours pas ce qui s'est passé ni qui était responsable", souligne Donatella Rovera, conseillère principale sur la réaction aux crises à Amnesty International.
Celle-ci, qui a passé de longues semaines en Libye, d'abord à Bengazi lors du pilonnage par les troupes de Kadhafi et par la suite dans d'autres villes du pays, rappelle que "les dirigeants de l'OTAN ont mis en avant à plusieurs reprises leur détermination à protéger les civils" et indique qu'à ce titre "ils ne sauraient aujourd'hui balayer d'un revers de main la mort de nombreux d'entre eux en se contentant de vagues déclarations de regret, sans enquêter dûment sur ces funestes événements."
C'est pourquoi Amnesty insiste sur le fait que "les enquêtes doivent déterminer si les pertes en vies humaines au sein de la population civile sont la conséquence de violations du droit international et, le cas échéant, les responsables présumés doivent être déférés à la justice".
Dans sa dernière réponse adressée à Amnesty International le 13 mars, l'OTAN a affirmé qu'il "regrette vivement tous les dommages qui ont pu être induits par ces frappes aériennes", mais "n'a pas reçu de mandat pour mener une action en Libye lorsque l'opération Unified Protector s'est achevée le 31 octobre 2011", et que la "responsabilité première" de conduire des enquêtes revient aux autorités libyennes.
Refus d'assumer les responsabilités
Mais pour Donatella Rovera, "la réponse de l'OTAN équivaut à un refus d'assumer la responsabilité de ses actes. Elle donne aux victimes et à leurs familles le sentiment qu'elles ne sont pas prises en compte et n'ont aucunement accès à la justice."
C'est pourquoi Amnesty appelle l'Otan et le Conseil national de transition à "veiller à ce que des enquêtes indépendantes, impartiales et approfondies soient menées dans les meilleurs délais sur toutes les allégations de graves violations du droit international et à ce que leurs conclusions soient rendues publiques. Lorsqu'il existe suffisamment de preuves recevables, les suspects doivent être poursuivis."
Soure: Nouvel obs