L’une des raisons de la résistance iranienne est l’absence d’ambassade américaine qui puisse servir une base pour les activités d’espionnage.
Des responsables de renseignements américains et israéliens sont unanimes pour affirmer que l’Iran constitue l’une des cibles d’intelligence les plus difficiles.
« L’Iran est de loin une cible d’intelligence des plus difficiles, même plus difficile que la Corée du Nord », a confié un responsable d’intelligence américain ayant requis l’anonymat au quotidien américain New York Times.
"En grande partie, c'est parce que leur système est tellement confus, ce qui a pour effet de rendre difficile de déterminer qui parle avec autorité sur quoi », poursuit-il
Et d’expliquer : « de plus nous ne sommes pas présents sur le terrain, nous n’avons pas d’homme sur le terrain pour déceler les changements, ce qui pose un problème ».
Plus c'est petit, moins c'est détectable
Citant des sources américaines, le journal précise de difficultés inhérentes au sujet lui-même : le fait de détecter des signes sur la reprise d’un programme d’armement en Iran est une tache beaucoup plus difficile que pour en déceler sur le développement des activités balistiques, lesquelles nécessitent d’importants investissements dans les usines.
« Les réacteurs sont plus faciles à suivre que les installations d'enrichissement, mais de toute évidence tout ce qui implique beaucoup de construction est plus facile à suivre que le travail scientifique et intellectuel», a déclaré Jeffrey T. Richelson, l'auteur du livre "Espionnage sur la bombe," qui relate l’histoire des Etats-Unis dans le renseignement nucléaire.
«À certaines étapes, il est très difficile de suivre le travail des armes à moins que quelqu'un ne bavarde et que des communications ne puissent être interceptées », ajoute-t-il.
Informations classées: espionnage électronique
Autre sources de difficulté, signalé par le journal: l'ensemble des preuves collectées par les agences d'espionnage ne sont pas claires, parce que la plupart de leurs conclusions sont classés et les responsables du renseignement disent avoir jeté tout ce qu'ils ont sur le programme iranien.
Raison pour laquelle l’Agence nationale de sécurité s’est mise à espionner les conversations téléphoniques de responsables iraniens et effectuer d'autres formes de surveillance électronique. Alors que le « National Geospatial-Intelligence Agency » analyse des images radar et des images numériques de sites nucléaires. Des analystes extérieurs croient sincèrement que des drones high-tech rôdent autour des sites nucléaires iraniens et que l'un d’entre eux a profondément pénétré l'année dernière à l'intérieur du territoire iranien, bien que les officiels américains aient dit avoir perdu son contrôle en Afghanistan. (S’alignant à la position officielle de Téhéran).
Entre temps, ajoute le quotidien américain, des capteurs au sol clandestins, qui peuvent détecter les signaux électromagnétiques ou des émissions radioactives liées à l'activité nucléaire secrète, sont placés à proximité de suspects installations iraniennes. Les Etats-Unis s’appuient aussi fortement sur les informations recueillies par les inspecteurs de l'Agence internationale d'énergie atomique qui visitent les sites iraniens.
Des erreurs opérationnelles et l'absence d'ambassade
A la foi d'anciens membres du renseignement américain, la journal évoque aussi comme source de difficulté des erreurs opérationnelles commises par la CIA, dont entre autre le fait d’avoir en 2004 mis tout un réseau d'agents iraniens en danger suite à une erreur technique commise par un agent de l'Agence.
Mais la lacune la plus cruciale n'en demeure pas moins selon leurs aveux l’absence d’ambassade américaine en Iran qui puisse servir de base d’opérations et qui a condamné à la cécité les services de renseignements américains dans ce pays. Sans compter qu'il en découle l'absence d'éléments humains pour capter les changements perçus sur le terrain et la difficulté d'en recruter .
Et les pièges iraniens?
Et quand bien même ces agents sont recrutés, une autre source de problème resurgit : celle de la fiabilité des informations qu'ils fournissent.
Le journal signale qu’en 2005, une commission présidentielle qui a examiné les échecs d'avant-guerre de l'intelligence sur le supposé programme irakien d'armements ont alerté les renseignements américains chargés de l'Iran que les informations prises des espions sont peu précieuses.
Comme exemple, le quotidien évoque le revers subi par la C.I.A. dans ses efforts de questionner les exilés iraniens et de recruter des scientifiques nucléaires. Entre autre « l'étrange affaire de Shahram Amiri, un scientifique iranien qui, apparemment, avait fait défection aux Etats-Unis en 2009, puis est rentré en Iran en 2010, après avoir prétendu avoir été enlevé par la CIA », selon les termes du New York Times.
A cet égard, le journal constate une similitude de cette affaire avec celle de « Vitaly Yurchenko, une officier du KGB (services des renseignements de l’ex Union soviétique) qui a fait défection aux Etats-Unis en 1985 et retourna à l'Union soviétique plus tard cette année, affirmant qu'il avait été drogué et enlevé par la CIA ».
Comme M. Yurchenko, le cas de M. Amiri a provoqué un débat au sein de l'agence quant à savoir s’il était un transfuge authentique, et si les informations qu'il a fournies pouvaient faire être fiables.
Israël, les "Moudjahidines" et les Kurdes
Concernant les activités d’espionnage des Israéliens sur l’Iran, tout en confirmant l’échange de coopération entre eux et les Américains le journal révèle aussi que le Mossad partage avec eux aussi la même évaluation.
Il écrit que leurs informations reposent en partie sur l’organisation des Iraniens exilés « Les Moudjahidines du peuple » qui est basé en Irak ( accusés par l’Iran d’avoir perpétré dans les années 80 des dizaines d’attentats terroristes en Iran, qui ont couté la vie à de centaines d’Iraniens, dont d’éminents penseurs et dirigeants de la révolution). Les Israéliens ont aussi développé des liens étroits dans la région semi-autonome du Kurdistan dans le nord de l'Irak, et ils sont soupçonnés d'utiliser des agents kurdes qui peuvent se déplacer tout au long de la frontière avec l’Iran.
Le spectre du revers irakien
Mais rapporte le journal, « les responsables du renseignement américain se méfient cependant de s'appuyer sur des informations à partir d'un groupe d'opposition comme le MEK, (les Moudjahidines) en particulier après leur expérience en Irak lorsqu’ils se sont fondés sur des informations erronées fournies par le Congrès national irakien, un groupe d'exilés dirigé par Ahmad Chalabi.
« je doute fort de toutes les informations que nous offre les Moudjahidines Khalk », a confié David A. Kay, qui a dirigé les efforts infructueux de la CIA de trouver le programme d'armes en Irak.