Le TSL est accusé de violer les protocoles conclus, et soupçonné de faire le travail des services de renseignements, et de transmettre des informations à l’entité sioniste.
Le chef du bloc parlementaire du Hezbollah « Fidélité à la résistance » Mohammad Raad a proposé de geler la coopération entre les différents ministères libanais et le tribunal spécial pour le Liban (TSL), jusqu’à la formation d’un nouveau gouvernement qui se chargera de prendre les décisions définitives dans cette affaire.
Lors d’une conférence de presse vendredi, Raad a exposé les données exigées par les enquêteurs du TSL, s’étonnant que le TSL puisse se permettre «de violer délibérément le Liban et de bafouer (les droits des) Libanais par des demandes qui ne peuvent en aucun cas être justifiées par l’enquête sur un crime politique individuel ».
La semaine passée, le bureau de Bellemare avait dépêché une nouvelle requête exigeant les datas de communications cellulaires et par câbles de tous les Libanais, en plus de leurs empreintes.
« Ce sont des demandes suspectes qui portent les empreintes d’un travail d’intelligence et de renseignement sans précédent », a-t-il signalé.
Selon lui, ces demandes ne constituent pas seulement une violation de la souveraineté du Liban, mais une infraction au règlement des procédures et des indices du tribunal, ainsi qu’aux protocoles d’entente conclus avec le Liban et qui l’engagent à coopérer avec lui dans tout ce qui concerne cette affaire.
Le député du Hezbollah a également refusé les tentatives de présenter l’acquiescement à ces demandes comme étant un postulat qui va de soi, et rejeté que soient traités comme des hors la loi et au Droit international ceux qui prennent leur temps avant de répondre.
« Alors que ces demandes sont présentées six ans après le crime, et après la remise au juge de l'acte d’accusation. À un moment où le Liban et la région assistent à des tiraillements, à des changements historiques, ce qui attise le soupçon de politisation entourant l'enquête », précise-t-il.
Raad a averti le peuple libanais contre les risques de tomber victime des tentatives de dénigrement de ses droits et de violation de sa vie privée, quelque soient les raisons invoquées.
Rappelant l’illégitimité de ce tribunal et son inconstitutionnalité expliquées durant des conférences de presse précédentes, il a l’a accusé une nouvelle fois d’être « doté de tous les éléments de l'arbitraire et qui ne respecte pas les hauts critères de la vraie justice », voire d’être « un pont pour imposer des tutelles internationales sur le Liban, sur sa sécurité, sa stabilité et sa souveraineté ».
Raad accuse les requêtes de Bellemare de manquer aux règles et dispositions du protocole d'entente qu'il prétend respecter, car les textes du protocole ne contraignent pas le gouvernement libanais à fournir les renseignements réclamés.
« La coopération n'est requise, à l'article 1 du statut, que dans les questions relatives au mandat du tribunal au sujet des personnes responsables de l'assaut qui a eu lieu le 14 février 2005 et des attaques perpétrées entre le 1er octobre 2004 et le 12 décembre 2005. L'article 16 cite que si le procureur estime qu'une attaque est du ressort du tribunal en vertu de l'article 1, alors même que la justice libanaise en est saisie, il doit demander des informations à son sujet aux autorités libanaises compétentes», explique-t-il.
Pour étayer sa plaidoirie, Raad rappelle la teneur du protocole conclu en 2009 entre Bellemare et le ministère libanais de la Justice, et dans lequel le gouvernement libanais s'engage à affranchir le bureau du procureur de toute intervention dans ses enquêtes au Liban, lui promettant toute aide facilitant son mandat, pièces et documents officiels disponibles.
« Mais cela ne saurait aller, jusqu'à exiger le fichier de tout le peuple libanais sur plus de cinq ans,… , le mandat du procureur portant seulement, sur les responsables du crime du 14 février », rétorque-t-il.
Raad estime que « la souveraineté nationale est foulée aux pieds quand il faut livrer toutes les données, ou les datas, de communications téléphoniques ou d'informations personnelles relatives à de larges franges du peuple libanais. De sorte que c'est un peuple tout entier que l'on accable sous prétexte d'un crime politique individuel. »
Pour lui, il y a atteinte aux libertés publiques que défend la Constitution et aux lois en vigueur qui protègent la confidentialité des communications. Surtout quand il s’agit de réglementer judiciairement la mise éventuelle sur écoutes, alors qu’une telle mesure nécessite en principe une décision judiciaire bien étayée et bien délimitée objectivement et sur les personnes concernées.
Sur ce point, Raad discerne une tentative du TSL d’appliquer arbitrairement la loi : «il ne peut y avoir un mandat ouvert là-dessus, cette loi est une exception aux principes constitutionnels généraux (les droits fondamentaux et les libertés publiques). Et toute exception s’explique par nature de façon exclusive et ne peut admettre l’exhaustivité. Là aussi, le procureur général contrevient au principe comme à l’exception », a-t-il expliqué.
Par la suite Raad a énuméré les centaines de milliers de listes de documents, d'enregistrements ou d'indices recueillis par les enquêteurs internationaux ont jusqu’à présent obtenus :
- les datas de communication cellulaires et SMS des tous les Libanais depuis 2003
- les datas de communications, les cartes téléphoniques publiques, les télécartes et les fichiers de tous les abonnés à la société de communication Ogero.
- les dossiers des étudiants universitaires de toutes les universités entre 2003 et 2006
- les photos et les empreintes digitales et visuelles de tous les arrêtés chez les forces de sécurité
- les empreintes recueillies par la direction des passeports à la Sureté générale
- les fichiers complets des abonnés libanais à la société de l’électricité
- des milliers de fichiers obtenus auprès des directions --- et des questions géographiques, du ministère des finances et de l’économie, de la Banque centrale, des registres commerciaux, du ministère du travail, des hôpitaux, voire même du Casino du Liban !!
« Aujourd’hui, le procureur général veut recueillir les empreintes digitales de 4 millions de Libanais, dont ceux du président de la République, du président de la Chambre et se prédécesseurs ; ceux de tous les premiers ministres actuels et passés, des députés, des ministres ainsi que de leurs épouses et leur enfants et ceux des références religieuses, militaires, voire même des cheikhs, des prêtres et des bonnes sœurs »
« Y a-t-il une seul personne nationaliste et digne qui puisse admettre ceci ?», a-t-il interrogé, rappelant également que le procureur veut obtenir les fichiers de tous ceux qui possèdent des voitures au Liban
« À la lumière de notre longue lutte avec l'ennemi israélien, dont l'étendue de l'infiltration de la scène libanaise, nous comprenons parfaitement l'importance de ces demandes. Ainsi que le volume que prendrait le dévoilement de notre pays et de tout le peuple libanais » a-t-il soupçonné.
Par la suite, Raad a adressé à l’opinion publique libanaise les questions suivantes :
(( Quel besoin l'enquête a-t-elle des datas de tous les Libanais, sur plusieurs longues années, et réactualisés ?
Pourquoi le bureau du procureur insiste-t-il pour les demander après avoir remis l'acte d'accusation au juge de la mise en état ?
Qui garantit qu'il n'y aurait pas de fuites sur les datas comme il y en a eu sur les investigations ?
Qui peut dire que des informations livrées ne sont pas parvenues à l'ennemi israélien ou à d’autres parties, surtout que nous avons discerné certains signes qui montrent qu’il (l’ennemi sioniste) les a reçues.
Est-ce que le peuple libanais est au courant que le TSL et le procureur général comptent parmi leur personnel des employés de différentes nationalités (américain, britannique, allemand, français, australien, pakistanais et kazakhes). Nous sommes au courant des situations de certains d’entre eux, surtout pour les plus actifs dans le bureau de Bellemare. Et nous sommes parfaitement au courant des liens étroits qu’ils entretiennent avec des services de renseignements hostiles à la résistance. Nous savons aussi que les États-Unis ont tenté à travers des accords inconstitutionnels conclus avec certains services au Liban d’obtenir des informations sensibles.
Qui peut garantir que ces informations ne vont pas parvenir à des services de renseignements ennemis ou israéliens, qui vont à leur tour les utiliser pour semer la discorde entre les Libanais, pour fabriquer des histoires ou faire chanter des responsables ou certaines parties ??))
Le parlementaire du Hezbollah a signalé que jusqu’à présent le bureau du procureur général n’a pas répondu à la question de savoir si la commission d’enquête ou le TSL ont transmis des informations à l’ennemi sioniste.
« Nous sommes bien conscients des retombées d’un tel aveu de la part du tribunal », a-t-il signifié.
Avant de conclure, Raad met en garde que le Liban se trouve exposé plus que jamais à la plus grande opération de tutelle et de piratage qu’il n’ait jamais connu, au cours de laquelle seront bafouées toutes les normes de la justice, des libertés publiques et des droits de l’homme.
S’adressant à tous les libres, nationalistes et honorables de ce pays, de par leurs responsabilités dans les ministères, les directions, aux responsables et aux citoyens, Raad leur a demandé de ne pas acquiescer les demandes du TSL .