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Pourquoi le Front national n’est pas un parti républicain

Pourquoi le Front national n’est pas un parti républicain

Le président candidat est-il vraiment convaincu de ce qu’il déclare?

Marine Le PenPendant longtemps, on ne se posait même pas la question de savoir si le FN était ou non républicain. Son leader, Jean-Marie Le Pen, donnait lui-même la réponse : par ses provocations, par ses saillies xénophobes ou antisémites, par ses odes au passé monarchique et chrétien de la France, par son entourage composé de nostalgiques de Vichy, ou de piliers de l’Œuvre française... Le soin qu’il mettait à éviter le mot « République » dans ses discours ne laissait pas d’ambiguïté : le Front national ne s’inscrivait pas dans l’histoire républicaine.

Avec Marine Le Pen, tout devient plus compliqué.

Elle a conservé le nationalisme de son père et sa rhétorique xénophobe, mais n’hésite pas à l’enrouler dans le drapeau républicain. C’est elle qui, en 2006, a poussé son père à prononcer un discours à Valmy, lieu hautement symbolique de la Révolution. Elle qui vante sans relâche la prétendu « laïcité ».

A défaut de le voir disparaître du paysage, on ne peut certes que souhaiter que le FN rejoigne le giron de la République – à la manière du mouvement de l’ex-néo-fasciste Gianfranco Fini, en Italie. Mais en est-on là ? Malheureusement, on en est encore très loin, au grand malheur d’une UMP à la recherche de « compatibilités ».

La moindre des choses, pour commencer, c’est qu’un parti républicain défende les principes fondateurs de la République, à commencer par ceux qu’exprime notre devise nationale : liberté, égalité, fraternité.

 
Liberté ?

Marine Le Pen exalte la liberté, dont elle est, clame-t-elle, « la dernière défenseure ». Mais le programme qu’elle propose ne va pas précisément dans le sens d’une plus grande liberté. Il n’est question que d’ordre, de répression, d’interdiction... Dans le pays rêvé de Marine Le Pen, les magistrats ne pourront pas se syndiquer, les manifestations de soutien à des personnes dans l’illégalité seront interdites (sans-papiers, manifestants arrêtés...), les binationaux devront renoncer à leur autre nationalité, de nombreux citoyens ne pourront plus respecter leurs pratiques religieuse, ne pourront manger ou s'habiller comme ils veulent. Et les journalistes, à en juger par les pratiques actuelles du FN, auraient également du souci à se faire...

La laïcité découle de la liberté : c’est l’assurance de la tolérance religieuse.

Marine Le Pen, elle, défend un drôle de laïcité. « L’Etat doit distinguer entre les religions », déclare-t-elle par exemple à Familles chrétiennes. Ainsi, dans la France de Marine Le Pen, on interdira les prières musulmanes dans les rues mais pas les processions du Saint-Sacrement, parce que les secondes « sont des traditions très anciennes chez nous ».

En réalité, la laïcité sauce chrétienne de Marine Le Pen n’est qu’un moyen pour elle de mieux fustiger l’Islam.

 
Egalité ?

Marine Le Pen bafoue l’idée d’égalité, par la promotion de la « préférence nationale » – qu’elle a rebaptisé « priorité citoyenne » pour que cela sonne plus « républicain ». Certes, la Déclaration des droits de l’homme parle de l’égalité entre « citoyens ». Mais à l’époque de sa rédaction, les étrangers vivant sur le sol français pouvaient très facilement accéder à la citoyenneté.

Avec Marine Le Pen, les aides sociales, les allocations familiales, les logements, les soins, l’éducation seront fournis en priorité à certains habitants: les Français. Cette approche est la négation même de l’esprit d’égalité qui soutient nos principes fondamentaux.

 
Fraternité ?

 
Marine Le Pen ne sait pas ce qu’est la fraternité. Elle distille un discours non-fraternel : un discours de discorde, de rejet de l’autre. Prenez sa proposition de supprimer le droit du sol (qui permet à des étrangers vivant en France de devenir français), pour ne conserver que le droit du sang (un enfant n’est français que si l’un de ses parents au moins est français). Elle reflète une vision ethnique de la nationalité, bien éloignée de nos idéaux. Le droit du sol – qui témoigne de l’ouverture de notre pays, sa générosité, son universalisme – est profondément républicain.

 
Tant que Marine Le Pen n’aura pas renoncé à la préférence nationale, à l’exclusivité du droit du sang, tant qu’elle ne condamnera pas fermement les odes à Brasillach de son père, tant qu’elle dansera avec des néo-nazis à Vienne, tant qu’elle sera obsédée par l’idée d’interdire, de réprimer, de censurer, de priver d’aide, de durcir, d’expulser, de condamner à mort... la république ne pourra jamais être compatible avec les « valeurs » du FN.

 

A partir de rue89