Un débat qui a donné l’impression d’un changement de rôle avec un François Hollande qui prenait la stature de l’homme grave, presque un chef d’Etat et un Nicolas Sarkozy en position de challenger.
Les deux finalistes de la présidentielle française, Nicolas Sarkozy et François Hollande, se sont affrontés à distance jeudi soir, interrogés à tour de rôle à la télévision, dans un contexte de montée de la tension entre les deux camps.
A dix jours du second tour, le candidat socialiste, qui adopte un peu plus chaque jour une posture présidentielle, a durci le ton face au président sortant, dont le camp mène une campagne très agressive.
Dans la matinée, Hollande qui pourtant courtise les voix du FN a accusé son rival de faire la « course derrière les thèses et les mots » du parti des Le Pen dans sa quête des voix de l'extrême droite dont il a un besoin vital pour l'emporter le 6 mai.
Par 27% contre près de 29% pour Hollande, le président-candidat axe désormais sa campagne sur des thèmes qui sont les marques de fabrique du FN: immigration, défense des "frontières", dénonciation des "élites".
"Le Front national est un parti autorisé dans la République et qui conteste un certain nombre de valeurs de la République", a estimé jeudi soir François Hollande, tout en réaffirmant son souci de s'adresser à tous les électeurs, y compris à ceux qui ont voté FN.
Dans cette rhétorique de la gauche on peut y entrevoir un certain retour-arrière, du moins officiel du candidat du PS qui s'est vu taxé tout comme son confrère de « lèche-botte » pour amadouer les électeurs du Front National.
François Hollande, qui s'est déclaré "fier d'être français", a ainsi refusé de faire de l'immigration "un sujet d'affrontement": "je ne suis pas dans cette course, folle, et qui conduit généralement les électeurs qui doutent d'aller encore davantage vers le Front national".
Plus tôt dans la journée, Sarkozy s'était dit "persuadé" que les 17,9% de Français qui ont voté au premier tour pour Marine Le Pen n'étaient "pas racistes", mais avaient voulu dire "ça ne peut plus durer, on ne peut plus supporter la façon dont le monde évolue depuis trente ans, on veut conserver notre mode de vie (...) on veut des frontières, on veut la Nation".
Face aux railleries des médias et de beaucoup de français concernant ses ressentes prises de positions, Nicolas Sarkozy a cependant fixé une « limite claire » dit-il, à la droitisation de son
parcours: Aucun désistement d'un candidat de son parti UMP n'aurait lieu en faveur d'un candidat FN mieux placé que lui au second tour des législatives de juin avec tout de même un petit « cas par cas » concernant les circonscriptions.
Sur le plan économique, où bon nombre d'économistes et éditorialistes, largement repris par le clan UMP, ont fustigé le programme du candidat PS, François Hollande s'est défendu.
Décrier car il souhaite une renégociation du traité européen de discipline budgétaire, il déclare que ce " n'est pas l'Allemagne qui va décider pour l'ensemble de l'Europe (...). Beaucoup de pays aujourd'hui attendent la décision de la France, car nous ne sommes pas n'importe quel pays d'Europe, nous sommes un pays leader en Europe et ce que va faire le peuple français va considérablement modifier la donne", a-t-il jugé.
Les deux rivaux ne se sont pas croisés pendant l'émission jeudi soir et ils ont donné l'impression d'avoir échangé leurs rôles: François Hollande, favori, adoptant une posture grave d'homme d'Etat et Nicolas Sarkozy l'attitude plus agressive du challenger.