La super puissance américaine compte un véritable Tiers-monde sur son territoire, dont des millions de sans-Abris qu’elle tente de reloger. Le projet est toutefois menacé par l’aggravation du déficit.
Au milieu du terrible hiver dernier, après 13 ans passés dans les rues de Washington, Maureen Brosnaham a enfin obtenu un petit studio, au loyer abordable, avec une salle de bains... et un bail à durée illimitée.
"On se dit toujours que les choses vont s'améliorer. Pour moi, c'est ce qui s'est passé", dit Maureen, installée depuis un an avec 15 autres anciennes sans-abri dans un immeuble géré par l'association Open Arms Housing.
"ça m'a pris un an pour que je m'en rende compte, et maintenant +Je suis à l'intérieur+... Je ne dois plus aller dans une église pour prendre une douche".
Des milliers de sans-abri de la côte Est des Etats-Unis sont relogés depuis l'année dernière dans le cadre d'une nouvelle approche baptisée "Un logement d'abord" ("Housing first"), expérimentée par des associations avec le soutien du gouvernement fédéral.
Objectif: sortir de la rue les personnes les plus vulnérables --drogués, malades, handicapés-- et les installer dans leurs propres appartements.
Seule une partie du loyer est à leur charge, à hauteur du tiers de leurs revenus, souvent constitués d'allocations.
Le programme permet de court-circuiter les longues procédures et listes d'attente sur lesquelles butaient les sans-abri. Un casier judiciaire, l'alcoolisme ou la consommation de drogue les excluaient d'office des programmes fédéraux.
Pourtant, reloger les sans-abri sans conditions préalables revient moins cher, selon les associations à l'initiative du projet, que de les traiter dans l'urgence et dans la rue. Avoir un logement leur permet de mieux se soigner, par exemple.
La campagne la plus ambitieuse se déroule à New York, où les associations espèrent reloger 100.000 sans-abri d'ici 2013. Depuis son lancement en juillet, 7.200 personnes en ont profité dans tout le pays, dont 1.000 à Washington.
"Ceux qui obtiennent des logements sociaux subventionnés par le gouvernement fédéral à Washington sont des gens qui peuvent attendre cinq, six, sept ans... et il faut avoir une adresse", explique la coordinatrice de la Campagne pour 100.000 logements, Linda Kaufman.
Le gouvernement fédéral soutient l'approche et a incorporé "Un logement d'abord" dans son programme de lutte contre le mal-logement, qui se monte à 1,4 milliard de dollars.
"Nous savons qu'il y a des stratégies qui marchent. Il faut s'engager derrière ces stratégies et s'assurer que la dynamique perdure", dit Anthony Love, directeur adjoint du Conseil sur les sans-abri, qui rassemble 19 organismes fédéraux.
Mais la croissance du déficit public aux Etats-Unis pourrait assécher les financements de la nouvelle politique, à peine lancée.
"Il y a moins d'argent disponible pour le logement, car les budgets des
Etats et des villes sont en baisse", regrette le directeur du Centre juridique national sur la pauvreté et les sans-abri, Jeremy Rosen, pour qui "réduire à zéro le nombre de sans-abri, ça n'a rien de mystérieux en termes de tactique, c'est simplement un problème de ressources".
D'autres associations de terrain militent pour que le financement de ces logements permanents ne se fasse pas au détriment des hébergements d'urgence, comme l'illustre l'exemple de Washington:
selon une association, la ville a fermé un centre d'hébergement de 400 lits en 2008 après avoir adopté la stratégie "Un logement d'abord", ce qui n'a fait que déplacer des dizaines de sans-abri dans un parc proche de la Maison Blanche.