30-11-2024 02:50 AM Jerusalem Timing

La crise des réfugiés syriens s’aggrave et inquiète la Turquie

La crise des réfugiés syriens s’aggrave et inquiète la Turquie

Le flot des réfugiés syriens est difficilement accepté par la population locale et critiqué par l’opposition.

Des réfugiés syriens en TurquieDébordée par la pression croissante qu'ils exercent à la frontière, la Turquie tente d'endiguer sur son territoire le flot des réfugiés syriens, de plus en plus difficilement acceptés par la population locale et critiqués par l'opposition.

De l'aveu même d'Ankara, la situation est très délicate. Mardi matin, ils étaient au moins 10.000 candidats à l'exil à se presser le long des 900 km de frontière entre la Syrie et la Turquie, dans des conditions de plus en plus difficiles, avec l'espoir de quitter un pays ravagé par la guerre qui oppose les rebelles (soutenus par l’Occident et la Turquie) au régime syrien.

Et le flot ne se tarit pas, nourri par les violents combats qui déchirent Alep, la deuxième ville de Syrie. Mais aujourd'hui, les neuf camps de réfugiés installés par Ankara débordent de plus de 80.000 personnes. Les écoles et les pensionnats du sud de la Turquie sont également saturés.

En Turquie, le souvenir de l'arrivée en 1991 de 500.000 Kurdes irakiens pressés par la guerre du Golfe est encore vivace. Alors les autorités ont décidé de ralentir le rythme d'entrée des Syriens, le temps de monter en urgence trois nouveaux camps d'une capacité de 30.000 places.

"Des structures seront mises en place d'ici trois jours au plus tard, nous autoriserons alors ces gens à passer graduellement en Turquie", a expliqué à l'AFP un responsable turc.

Même s'il a encore répété lundi que son pays ne fermerait pas la porte aux réfugiés syriens, le chef de la diplomatie turque Ahmet Davutoglu a déjà fixé à 100.000 le seuil d'acceptation des réfugiés venus du sud et multiplie les appels à l'aide à la communauté internationale.

"Nous avons évoqué ce nombre de 100.000 comme une barrière psychologique", tempère à l'AFP un diplomate turc, "cela ne veut pas dire que nous allons fermer la frontière si le 100.001e Syrien veut venir".

Pourtant, en plus de ces problèmes logistiques, l'exode syrien commence aussi à peser sur la population locale turque.

 Incidents

Depuis quelques semaines déjà, les médias locaux rapportent des incidents opposant les réfugiés syriens aux résidents turcs pro-régime syrien.

Un élu turc a rapporté à l'AFP que des Syriens avaient refusé de payer leur addition dans des restaurants en lançant à leurs hôtes: "Envoyez la note au Premier ministre Recep Tayyip Erdogan, c'est lui qui nous a invités".

A Kilis, tout près de la frontière, ce patron de restaurant s'inquiète.

"Ces gens-là nous causent des ennuis", lâche-t-il à l'AFP, "ils sont comme une bombe prête à exploser, c'est grave".

Critiques contre l'ASL

Des élus de l'opposition, qui critiquent ouvertement le soutien du gouvernement Erdogan aux rebelles syriens, s'interrogent sur les activités à l'intérieur de certains camps qui, selon eux, seraient devenus de véritables bases de repli pour les rebelles de l'Armée syrienne libre (ASL).

Le refus opposé ce week-end à une délégation du principal parti d'opposition, le Parti républicain du peuple (CHP), qui souhaitait visiter le camp d'Apaydin (sud) abritant une vingtaine de généraux et des dizaines de soldats syriens, est venu renforcer leurs soupçons, même fermement démentis par le gouvernement.

"Nous allons inscrire cette question à l'ordre du jour du Parlement", assure à l'AFP le député du CHP Faruk Logoglu, "ces camps sont soumis aux lois turques, il est surprenant d'en interdire l'entrée aux députés du pays".

S’agissant de la création d’une zone de tampon, « une telle zone ne peut exister qu'avec la légitimité internationale », concède à l'AFP un diplomate turc.

"Nous pouvons décréter seuls une zone tampon ou une zone d'interdiction aérienne mais que se passera-t-il si un soldat syrien tire un missile ?", juge-t-il, "cela voudrait dire que la Turquie est en guerre avec la Syrie".