Et manifestation en Arabie, dans les régions chiites seulement, et grève générale au Bengladesh
Le ministre allemand des Affaires étrangères, Guido Westerwelle, s'est montré réservé dimanche dans une interview sur la publication de caricatures du prophète Mohammad dans un journal satirique français, affirmant que la liberté signifiait aussi la responsabilité.
"Parfois la question n'est pas de savoir si on a le droit de faire quelque chose mais de savoir si on doit le faire", a souligné le chef de la diplomatie dans le journal dominical "Welt am Sonntag". "J'ai appris dans la vie que la liberté signifiait toujours la responsabilité", a-t-il insisté.
Le journal satirique français Charlie Hebdo a publié mercredi des caricatures du prophète Mohammad (S) alors qu'un film américain anti-islam suscite déjà une immense vague de protestations dans le monde musulman. Au Pakistan, 17 personnes sont mortes samedi dans des violences liées à ce film ou à la suite de la publication des caricatures.
La liberté d'opinion "ne signifie pas le droit d'insulter ceux qui ont une autre religion ou une autre opinion et de troubler ainsi sciemment la paix publique", a assuré le ministre libéral du gouvernement d'Angela Merkel.
Il a insisté sur le rôle joué par internet dans la diffusion du film qui ridiculise le prophète Mohammad (s). "Avant, personne n'était au courant quand un réalisateur auto-proclamé tournait un film absurde. Aujourd'hui le monde entier en prend connaissance", a-t-il expliqué.
"Internet n'est pas qu'une bénédiction comme nous avons pu le voir lors des révolutions arabes mais aussi une malédiction: car même le plus idiot peut diffuser sa production avec un impact mondial", a conclu M. Westerwelle.
Alors que l'Allemagne veut tenter d'interdire la diffusion dans un cinéma du film islamophobe, le groupuscule d'extrême droite à l'origine de cette initiative a annoncé son intention d'organiser une projection en novembre.
"Nous avons pour objectif la première semaine de novembre", a assuré au magazine Der Spiegel le dirigeant de Pro Deutschland, Manfred Rouhs. Le film n'étant pas encore terminé, il ne peut "pas encore donner de date exacte", a-t-il ajouté alors que jusqu'à présent seul un extrait de 14 minutes a été diffusé sur internet.
Il a ajouté vouloir organiser cette projection dans un hangar en raison du refus de plusieurs cinémas.
Arabie : seuls les chiites manifestent
Samedi soir à Ryad, des centaines de chiites selon l'AFP ont manifesté contre le film "Innocence des musulmans", dans une localité de l'est de l'Arabie saoudite, ont rapporté des témoins dimanche.
Le défilé à l'appel d'un dignitaire chiite, Abdel Karim al-Hubeil, a parcouru tard samedi sans incidents la principale artère de la localité de Awamiya, foyer de la contestation chiite.
Les manifestants ont lancé des slogans hostiles aux Etats-Unis et à Israël et brûlé des drapeaux des deux pays, en signe de protestation. Sur une banderole ils se sont étonnés que l'atteinte au roi soit passible de sanctions, alors qu'il n'en est rien pour l'atteinte à la personne du prophète, et ont la réaction des autorités saoudiennes.
Il s'agit de la première marche du genre en Arabie saoudite.
Les autorités saoudiennes interdisent les manifestations en général mais les forces de l'ordre ne sont pas intervenues pour disperser les manifestants dont de nombreuses femmes et enfants.
Par ailleurs, quelque 70 dignitaires chiites d'Arabie saoudite ont appelé dans un communiqué "les décideurs du monde musulman à prendre l'initiative criminalisant les atteintes aux religions".
Au Bangladesh : une grève générale
La majorité des écoles, magasins et bureaux étaient fermés dimanche au Bangladesh en raison d'un appel à la grève lancée par les partis d'opposition pour protester contre un film islamophobe qui a provoqué des manifestations de colère dans le monde musulman.
Des milliers de policiers patrouillaient les rues de la capitale, Dacca, dimanche, jour de grande activité d'habitude dans ce pays de 153 millions d'habitants, dont 90% sont musulmans.
Une quarantaine d'activistes islamistes ont été arrêtés et détenus brièvement pour avoir tenté de monter une barricade sur l'une des avenues principales et jeter des pierres à la police, a déclaré à l'AFP le chef de la police, Abul Kashem.
Plusieurs partis islamistes, alliés au principal parti d'opposition, ont appelé à la grève pour protester contre "L'innocence des musulmans", un film américain à petit budget de piètre qualité cinématographique qui continue de susciter une vive émotion dans le monde musulman sans provoquer toutefois de nouvelles violences.
Les partis islamistes du Bangladesh entendaient également protester contre la publication de caricatures dans le magazine satirique français Charlie Hebdo.
Selon la police, quelque 10.000 policiers et membres des unités d'élite Bataillons d'action rapide étaient déployées à travers la capitale, y compris dans le quartier diplomatique.
Samedi, des centaines de protestataires avaient affronté les forces de l'ordre après s'être rassemblés, malgré une interdiction de la police. Selon les médias locaux, ces échauffourées ont fait une cinquantaine de blessés.
Vendredi, une manifestation avait rassemblé 10.000 personnes, toujours à Dacca, après la grande prière.
Le gouvernement a condamné le film "L'innocence des musulmans" et bloqué le site de partage de vidéos YouTube.
Ce film amateur à petit budget, coproduit par un américano-israélien, un copte (chrétien égyptien) de Los Angeles et des évangélistes américains, a suscité une vague de protestations qui a fait des dizaines de morts dans le monde musulman.