Il faut croire que c’est une tactique constante de la politique turque.le gouvernement turc avait fait de même en menaçant Israël lors de l’affaire Marmara.
Le feu vert demandé par le gouvernement turc à son Parlement pour mener des opérations militaires en Syrie vise d'abord à dissuader le régime de Damas de poursuivre ses attaques contre la Turquie, qui souhaite éviter une escalade qui la mènerait à une guerre avec son voisin.
A peine digérée la perte en juin d'un de ses avions de combat abattu par la défense antiaérienne syrienne, les tirs syriens mercredi sur la localité frontalière d'Akçakale, qui ont causé la mort de cinq civils, ont sonné pour Ankara l'heure des représailles contre le pouvoir syrien.
"C'est un incident très grave qui dépasse les bornes", a lancé dès mercredi soir, juste après le bombardement, le vice-Premier ministre Besir Atalay pour résumer l'exaspération de son pays.
L'armée turque est donc passée à l'action et bombarde sporadiquement depuis mercredi des positions de l'armée syrienne autour du poste-frontière de Tall al-Abyad. Et le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan a réclamé de l'Assemblée l'autorisation formelle d'ordonner une intervention de troupes turques sur le sol syrien, laissant présager d'autres opérations à venir.
"Ce qui s'est passé a le potentiel de dégénérer en un conflit international mais il faut voir ce qui va se passer au niveau de l'Otan et si le Parlement turc va donner à son gouvernement mandat pour lancer des opérations en Syrie", a estimé Riad Kahwaji, de l'Institut d'analyse militaire pour le Proche-Orient et le Golfe persique (Inegma).
Mais à en croire ses proches, le chef du gouvernement turc ne compte pas jouer la carte de l'escalade militaire. "Il s'agit avant tout de dissuader, la Turquie ne part pas en guerre", a assuré à l'AFP une source proche du gouvernement, "mais ces attaques ne peuvent continuer".
Comme ce proche, plusieurs responsables du Parti de la justice et du développement (AKP) au pouvoir ont rejeté la rhétorique belligérante exprimée jeudi par certains titres de la presse turque.
Leçon
"La Turquie ne cherche pas à faire la guerre mais elle est parfaitement capable de se défendre contre toute attaque menaçant sa souveraineté", a lancé, en marge des débats, l'un des vice-présidents du Parti, Amer Celik.
"Toutes les cibles militaires ont été pilonnées pendant la nuit d'une manière dissuasive", a renchéri un autre responsable du parti et proche conseiller du Premier ministre, Yalçin Akdogan. "Ils ont reçu la leçon nécessaire", a-t-il ajouté, "tout dépendra maintenant de l'attitude de la Syrie".
Depuis le début des hostilités en Syrie en mars 2011, l'opinion publique turque, déjà confrontée depuis près de trente ans ans à la rébellion séparatiste kurde, reste majoritairement opposée à toute intervention en Syrie.
Un sondage en ligne publié jeudi par le journal à gros tirage Hürriyet a confirmé que 62% des Turcs étaient opposés au texte débattu au Parlement.
La principale force d'opposition, le Parti républicain du peuple (CHP), et le parti pro-kurde (BDP) ont annoncé qu'ils voteraient contre la motion. Un député du CHP, Muharrem Ince, a accusé le gouvernement de vouloir "partir en guerre" avec ce texte, estimant que la Turquie était devenue au Proche-Orient "le gendarme des Etats-Unis", son allié traditionnel.
Même si elle a renforcé sa présence à la frontière syrienne ces derniers mois, l'armée turque est jusque-là restée prudente.
"Il s'agit surtout de montrer que l'armée (turque) est capable d'intervenir à tout moment mais cela ne veut pas dire qu'elle partira en guerre", a conclu le général à la retraite Armagan Kuloglu sur la chaîne d'information privée NTV.