Il suffit pour les Syriens de refusent le diktat des miliciens pour subir leur ire. Chrétiens, kurdes, Druzes, Chiites, voire même Sunnites y passent. Sans aucune pitié.
Les minorités syriennes ont dès le début de l’insurrection été dans la ligne de mire des insurgés. Elles le sont aujourd’hui, plus que jamais. Surtout celles qui ont tenté de respecter une certaine neutralité face au conflit en cours, et se sont abstenues de tout appui verbal ou logistique aux protagonistes du conflit.
Ce n’est pas par pur hasard que Jaramana, Hajar al-Aswad, et Kasta-Gendo (proche d’Azzaz) ont fait ensemble l’objet d’attaques presque simultanées ces derniers jours. Malgré les distances qui les séparent, les deux premières étant dans la province de la capitale, et la troisième dans celle d’Alep, elles ont toutes de commun qu’elles toutes habitées par des minorités religieuses et ethniques syriennes. En particulier les Kurdes et les Druzes.
Du côté des premiers, cela fait depuis la semaine passée que leurs quartiers et localités à proximité de la frontière turque sont visés. La tension est montée depuis le vendredi dernier, lorsque les miliciens se sont mis à envahir les quartiers et les localités kurdes, provoquant leur colère. Ce jour-là, les miliciens ont même ouvert le feu contre une manifestation kurde dans le quartier de cheikh Maksoud, organisée pour protester contre l’invasion de leur quartier d’origine Achrafiyyeh par les miliciens. De source kurde, 5 manifestants ont été tués. Des combats s’en sont suivis au cours desquels il y a eu 30 tués (selon l’AFP).
Dimanche, le bataillon de l’ASL Tempête du nord a lancé un assaut contre Kastal-Gendo, une de leur localité dans la province d’Alep. Son chef, Ammar Dadikhi, connu au Liban sous le pseudonyme Abou Ibrahim, et comme étant le kidnappeur des pèlerins libanais, semble avoir été tué ainsi que 4 autres éléments de sa milice.
Cette information a été diffusée par la télévision Al-Mayadine, puis relayée par plusieurs autres medias, mais n’a pas été confirmée de source rebelle. La chaine de télévision Alarabiyya (financée par l’Arabie saoudite) l’a démentie. Fortement médiatisé depuis l’enlèvement des pèlerins libanais, et les soubresauts que cette affaire a connus, il est apparu tout récemment alors qu’il préparait ses hommes à attaquer les localités kurdes. Depuis, il n’a plus fait son apparition. Selon Al-Mayadine, il a péri aux mains des éléments des Comités populaires kurdes.
Ce mardi, le PKK a menacé d’intervenir en personne pour défendre les régions kurdes et de rentrer en guerre contre l’ASL.
Version AFP-OSDH
Combats entre les rebelles arabes et les Kurdes: un autre front en Syrie
((( Mohammed Hafar a été tué par balle alors qu'il tentait de porter secours à son frère Faysal, mortellement blessé dans des combats entre rebelles arabes et milices kurdes dans le nord de la Syrie, près de la frontière turque.
Quatre rebelles ont péri dans ces affrontements, les deuxièmes en quarante-huit heures, près du village kurde de Yazi Bah, selon des combattants rebelles rencontrés dans leur bastion d'Azaz.
Des combattants en treillis armés de kalachnikovs se sont rassemblés devant la maison des Hafar, ils ont porté le corps de Mohammed à travers des rues jonchées d'ordures jusqu'au cimetière.
Dans le cortège, des blessés sur des béquilles ont tenu à rendre un dernier hommage au défunt.
Parmi eux, Fahad, 20 ans, blessé, selon lui, dans les combats contre les forces gouvernementales dans la ville d'Alep (nord).
"L'ennemi est à présent le PKK (milice kurde), ce sont les chiens d'Assad", (Bachar al-Assad) le président syrien, marmonne-t-il en colère, affalé dans une chaise en plastique devant la maison des Hafar. "Quand ils nous tuent, on les tue". Abou Sabri acquiesce.
"Nous allons les punir. Je ne dis pas qu'on va le faire maintenant, mais bientôt, vous verrez", menace cet homme de 28 ans.
Les tensions se sont aggravées entre le PYD --branche syrienne du Parti des travailleurs du Kurdistan (rebelles kurdes turcs, gauche laïque), que les rebelles accusent d'être des laquais du régime-- et les insurgés sunnites qui souvent affirment vouloir un régime islamiste.(...)
Selon les Kurdes, ils ont ainsi interdit aux rebelles d'entrer armés dans la ville d'Afrine et conclu un accord avec les autorités pour le départ des forces gouvernementales.
Les troupes se sont retirées mais un poste des forces de sécurité demeure avec un portrait du président Assad accroché à la façade.
Pour les jusqu'au-boutistes de l'ASL, les membres du PYD ne sont rien d'autre que des sbires du régime, armés et payés pour tenir les rebelles à distance. Des guides arabes accompagnant l'AFP disent ne plus se sentir en sécurité dans les villages kurdes.
Peter Harling, analyste de l'International Crisis Group estime que le PYD a réussi à exploiter le conflit, créant des frictions avec l'opposition armée, particulièrement dans la zone clé de la frontière turque.
"Il y a beaucoup de tensions entre les groupes armés de l'opposition à propos des routes de transit des armes. Le fait que plusieurs des postes frontaliers sont contrôlés par les Kurdes a provoqué aussi des tensions avec les Kurdes", explique-t-il.
Selon l'analyste, le PYD veut rester neutre dans le conflit, mais il est déterminé à profiter de la situation quel que soit le résultat.
Quelque 600.000 Kurdes vivent dans la région située au nord-est d'Alep, et la crainte est grande de voir les tensions communautaires s'envenimer dans les zones frontalières de la Turquie d'où l'armée s'est retirée.
La minorité kurde (15% des 23 millions de Syriens) est hostile au régime de Bachar al-Assad, qui l'a réprimée, mais se méfie de l'opposition qu'elle juge peu encline à reconnaître sa spécificité.
"Dans les zones d'où les rebelles ont chassé l'armée, il y a un vide en matière de sécurité. Certains des combattants ne souhaitent pas du tout la démocratie. Ce sont juste des seigneurs de guerre qui profitent du chaos", a dénoncé le président de l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), Rami Abdel Rahmane.)))
Un kurde torturé jusqu’à la mort
Pour sa part, l’OSDH a rendu compte de la mort d’un Kurde torturé par des rebelles syriens dans la province d'Alep (nord).
"Khaled Bahjat Hamdu, un Kurde de 37 ans (...), est mort de blessures causées par les tortures qui lui ont été infligées alors qu'il était détenu par un groupe armé près du village de Hayan", a-t-il annoncé.
L’organisation signale que Hamdu avait été fait prisonnier en même temps que près de 200 autres Kurdes pendant des combats inédits entre miliciens syriens et kurdes, qui ont fait une trentaine de morts.
Conduit à Hayan, au nord d'Alep, M. Hamdu "a été torturé avec des décharges électriques. Il faisait partie des 120 Kurdes libérés dimanche, mais il était si faible qu'il est mort le lendemain matin", a déclaré le chef de l'OSDH, Rami Abdel Rahmane.
"Certains des groupes armés utilisent les méthodes répressives du régime", a-t-il dénoncé. "Nous ne devons pas rester silencieux face à cela".
Il est vrai ces derniers temps, que ce sont surtout les miliciens, bien plus que les soldats de l’armée régulière qui se font remarquer par des méthodes aussi féroces que machiavéliques. Toutes les communautés sont servies. Mêmes les Sunnites.
Les attentats contre les quartiers des minorités
Signe incontestatble de leur férocité sans merci, mélangée à leur machiavélisme: Ils n'ont de mal de recourir aux voitures piégées pour rafler le plus de civils possible, tout en terrorisant la population dans les régions qui refusent leur diktat. Tout en niant toute implication!
Ceci a été le cas ce week-end dans deux localités périphériques de Damans, où là-aussi le caractère communautaire ne peut être occulté.
La première a explosé dans le quartier Jaramana, où réside des minorités chrétienne et druze. 11 personnes ont été tués et des dizaines blessés dont de nombreux enfants. Sans compter les voitures détruites et les bâtiments délabrés. Cette localité au sud-est de la capitale avait déjà été touchée par deux autres attentats, les 28 août et 3 septembre, faisant respectivement 27 et cinq morts. La seconde localité victime est Hajar al-Aswad, une localité du sud de la capitale de 60.000 habitants, dont la plupart sont des émigrés druzes du Golan syrien, auxquels s’ajoutent des charcas, des turcomans. Le nombre des tués et blessés n’a pas été précisé.
Jaramana : maudite car neutre
Expliquant les raisons de cet acharnement contre la localité de Jaramana qui compte 650.000 habitants, le site en ligne syrien Syria Truth assure que le mot d’ordre pour l’attaquer a été donné le mois de juin dernier. Le site écarte l’analyse donnée par des proches de rebelles selon lesquels c’est le régime qui plante ces engins explosifs dans ces localités pour soi-disant serrer les liens confessionnels autour du régime. Le site écarte aussi l’éventualité que ce soit la milice d’Al-Qaïda, Jabhat-Nusrat, laquelle ne se ménage pas de revendiquer les attaques qu’elle commet.
Or Jaramana est convoitée pour sa position géographique, sachant qu’elle sépare la capitale de la région Goutha charkiyya (de l’Est) où se sont retranchées les milices rebelles, (la brigade de l’Islam et le bataillon d’Al-Fourkane).
Citant une source proche du Cheikh-Akel , cheikh Abou Hammoud de la communauté druze (plus haute autorité religieuse druze), l’animosité contre Jaramana s’est amorcée à partir du mois de juin, date à laquelle les notables et imams de mosquées des localités avoisinantes ainsi que des chefs de milices étaient venus le voir, lui demandant d’intervenir auprès des comités populaires, chargés de protéger les quartiers, pour fermer les yeux devant le passage de près de 3000 miliciens se dirigeant à Damas. Ce à quoi une fin de non-recevoir leur a été opposée, au motif que les habitants du quartier ne voudraient pas être impliqués dans le conflit en cours.
La demande a été réitérée une deuxième fois à la mi-juillet. A cette époque, les miliciens se préparaient pour l’heure zéro de l’attaque contre les sites militaires et de sécurité officiels, prévue simultanément avec l’attaque contre le siège de la sécurité nationale (au cours de laquelle quatre haut-officiers ont péri, dont le gendre du président Assef Chawkat). Jaramana étant le plus court chemin au siège des renseignements généraux dans la rue Ibn Askar, à celui des renseignements aériens à Bab Touma, et au département de sécurité intérieure dans le quartier Sadate.
Une nouvelle fois, une fin de non-recevoir a été opposée.
Le dictat des miliciens
Quant à la troisième demande, elle a été exprimée, à la fin du mois d’aout, à la différence qu’elle était cette fois-ci accompagnée de six exigences et de menaces en cas de refus. En cas de refus, tous les habitants de la localité seront des cibles des milices.
La première demande stipulait qu’il fallait donner le feu vert au passage de 3000 miliciens de la Brigade de l’Islam (financée par le dirigeant politique libanais Saad Hariri). La seconde exigeait l’expulsion des fonctionnaires civils et militaires appartenant aux autres communautés, notamment les Alaouites et les Ismaélites, ainsi que des chrétiens et des réfugiés irakiens de confession chiite. La troisième demande ordonnait de faciliter les opérations perpétrées contre les barrages et les points de passages sécuritaires érigés dans cette région ou au moins ne pas assister les autorités pour les faire avorter.
Quatrièmement, le texte demande aux habitants de Jaramana d’aider la milice de l’ASL à kidnapper les officiers et les éléments des forces de l’ordre et tous les habitants qui traitent avec le régime. La délégation a présenté une liste de 70 noms de personnes jugées dangereuses pour les activités des miliciens.
La cinquième exigence imposait le retrait des éléments des Comités populaires (chargés de protéger la ville) de leurs positions, en vue de les dissoudre. Alors que la sixième revendication exigeait que les notables de la ville gardent la neutralité, s’ils refusent ces demandes.
Selon Syria Truth, les notables de Jaramana ne pouvaient se plier à ces exigences qui constituent à leur regard « une entorse aux traditions et à l’éthique de la communauté druze », surtout celle liée au sens de l’hospitalité à l’égard des réfugiés, sans compter leur attachement aux Comités populaires qui sont indispensables pour protéger les différents quartiers de la ville.
Raison pour laquelle, une troisième fin de non-recevoir a été opposée. A peine une semaine après, le 28 aout, la première attaque a eu lieu : deux voitures piégées ont explosé presque simultanément tuant 27 civils. Et depuis, ça se poursuit.
Et les Chrétiens, et les Chiites
Samedi dernier, la ville de Homs était sous la choc en raison de l’assassinat d’un vieil homme du quartier Wadi Sayeh. Fervent partisan du régime et de l’armée régulière, Elias Mansour de confession chrétienne a été abattu par un sniper du bataillon Al-Farouk de l’ASL.
Alors que le sang des 4 enfants tués dans le quartier Zayna (habité par des réfugiés irakiens chiites) le dimanche 28 octobre n’a pas encore séché.
Ils étaient en train de jouer dans la place des jeux dans le projet Hussayniyya, lorsqu’un obus s’est abattu sur eux.
Et des Sunnites aussi: des exécutions sommaires à Idleb
Les Sunnites syriens ne sont pas non plus épargnés. Il suffit d’être partisan du régime pour être banni et mériter la peine de mort. Il en est du moins ainsi dans la localité Salkine dans la province d’Idleb. Selon Syrian Documents, la milice d’Al-Qaida Jabhat-Nusrat (le front Nosrat) y a instauré un tribunal, pour soi-disant juger les civils qui sont pro-régime. 7 civils syriens seraient passés à la barre. L’un d’entre eux a été exécuté dans la place de la localité, alors que les 6 autres ont été emmenés vers un lieu inconnu, après avoir été torturés et trainés dans les rues.
Lundi, selon le même site, l’ASL a exécuté 7 civils syriens dans la même localité et pour la même raison. Ce jour-là, cette milice avait tué 25 civils de la localité frontalière de Harem situé dans la province d’Idleb, dans un pilonnage violent. Tout laisse penser qu’ils sont tous sunnites !
Et la part des Palestiniens: 500 tués
Selon les dernières informations des combats dans ce gouvernorat, Syrian documents assure que l’armée régulière est en train d’avancer vers la ville de Maarat-Noomane, occupée par les miliciens et elle mène des combats acharnés avec les combattants de Jabhat-Nusrat et les milices de l’ASL.
Alors que dans la ville d’Alep, des accrochages violents ont eu lieu ce mardi dans le quartier Khan Al-Assal situé dans la cité historique.
Dans la province de Damas, Les repaires de miliciens dans la région Ghouta de l'Est ont fait l’objet de bombardements aériens.
Alors que les combats inter palestiniens dans le camp Yarmouk se sont calmés ce mardi. Ils avaient éclaté lundi, après ceux de Hajar al-Aswad entre les éléments du Front populaire pour la libération de la Palestine (FPLP) et des Palestiniens qui combattent dans les rangs de l’ASL. Selon Syrian Documents, 6 miliciens ont péri.
Dans ce contexte, le responsable du Hamas Ezzat Rachek a révélé que pas moins de 528 Palestiniens ont été tués durant les évènements syriens, rapporte le site en ligne de la télévision iranienne arabophone AlAlam.