Sur fond de la légalisation du mariage homosexuel
Rien ne va plus entre l'Eglise catholique et la gauche au pouvoir en France : déjà très remontée contre le projet de mariage homosexuel, la principale institution religieuse de ce pays n'a pas apprécié qu'une ministre lui donne des leçons sur l'accueil des sans-abri.
La ministre écologiste du Logement, Cécile Duflot, a provoqué cette semaine l'agacement de la hiérarchie catholique pour avoir appelé l'archevêché de Paris à mettre ses bâtiments vides à la disposition des mal-logés.
"Les chrétiens de Paris et d'ailleurs ne l'ont pas attendue pour agir", a réagi l'entourage du cardinal de Paris André Vingt-Trois, cité par LeMonde.fr, mettant en avant l'engagement sur le terrain de nombreux bénévoles et associations catholiques auprès des populations précaires.
A l'approche de l'hiver, et alors que la France compte 3,6 millions de mal logés et 133.000 SDF (sans domicile fixe), Mme Duflot a appelé à un "choc de solidarité" de toutes les institutions, dont l'archevêché de Paris, disposant de bâtiments inoccupés pour faire face à "une des situations les plus difficiles que nous ayons eu à connaître ces vingt dernières années". Elle a aussi annoncé d'éventuelles réquisitions.
"Je ne comprendrais pas que l'Eglise ne partage pas nos objectifs de solidarité", a-t-elle ajouté.
L'Eglise catholique de France, aujourd'hui sur le déclin après avoir longtemps été l'une des plus florissantes d'Europe, dispose d'un important patrimoine immobilier, mais communique peu sur le sujet.
La revue catholique contestatrice Golias ainsi que le journal satirique Le Canard Enchaîné ont récemment publié des enquêtes sur des dizaines de propriétés de communautés religieuses sous-occupées à Paris, ce qui a pu donner des idées à la ministre.
"Avant d'en appeler à l'Eglise, Mme Duflot s'est-elle penchée sur les surfaces disponibles dans les administrations, les banques, les compagnies d'assurances, l'Etat ?", ont demandé dans un communiqué le diocèse de Paris et la Conférence des religieux et religieuses.
Manifestations pour et contre le mariage homosexuel
La jeune ministre écologiste, une des têtes de turc de l'opposition de droite, s'est aussi fait traiter d'"irresponsable" par le quotidien conservateur Le Figaro. Son appel à l'Eglise "est une insulte qui vient s'ajouter aux attaques que cette ministre profère déjà contre une institution qui la gêne dans son combat pour le mariage homosexuel", écrit mardi le journal.
Mme Duflot s'était élevée contre la revendication d'une "liberté de conscience" invoquée par certains maires qui refusent l'idée de devoir célébrer des mariages entre homosexuels.
Ce projet de loi du gouvernement de gauche, qui se heurte à l'opposition résolue de l'Eglise catholique, des autres religions et d'une grande partie de la droite, sera débattu au Parlement à partir du 29 janvier.
"Je n'ose pas croire" que les déclarations de Mme Duflot aient un lien avec la position de l'Eglise sur ce sujet, "mais si c'est ainsi, cela ne peut que durcir les positions au lieu de les assouplir", a déclaré l'évêque d'Evry (sud de Paris), Michel Dubost, au Figaro. "Les évêques n'ont pas été invités aux manifestations" des opposants au mariage homosexuel, mais "il ne faudra pas faire trop d'efforts pour qu'il y ait du monde", a-t-il ajouté.
Une manifestation contre la légalisation du mariage homosexuel est prévue pour le 13 janvier à Paris. Jean-François Copé, président proclamé de l'UMP - principal parti d'opposition -, a appelé à y participer.
Des dizaines de milliers d'opposants avaient déjà manifesté notamment le 17 novembre dans toute la France.
Le Parti socialiste s'est de son côté joint à un appel à manifester le 16 décembre en vue de défendre le droit des homosexuels au mariage et à l'adoption.