Les négociations ont véritablement commencé entre les États-Unis et la Russie pour trouver une solution à la crise.
Le régime syrien, soudé autour de Bachar al-Assad, semble tenir bon et démentir pour le moment les prédictions occidentales sur sa chute imminente, en dépit des succès militaires des rebelles, estiment des experts.
Les récentes affirmations unanimes des Occidentaux et, plus surprenant, d'un responsable russe sont le signe que l'opposition se renforce, mais pour que le régime tombe, il faut plus que ces coups de butoir, insistent ces experts.
"Il ne pourra tomber que par un coup d'Etat, une intervention étrangère ou un renforcement massif du soutien logistique aux rebelles par des pays étrangers", assure Barah Mikaïl, chercheur à l'institut de géopolitique espagnol FRIDE.
Selon ce spécialiste du Moyen-Orient, il y a certes "des déclarations diplomatiques fortes, mais il ne faut pas les surestimer, car le régime conserve la structure militaire et institutionnelle, même s'il se fait parfois surprendre", comme lors du récent attentat durant lequel le ministre de l'Intérieur a été blessé.
Plusieurs responsables ont déjà sonné le glas du régime. Le secrétaire général de l'Otan, Anders Fogh Rasmussen, a estimé que le régime "se rapprochait de l'effondrement" et Paris a appelé à "faire partir Bachar al-Assad le plus rapidement possible". Washington a jugé le régime "de plus en plus désespéré".
Le vice-ministre russe des Affaires étrangères en charge du dossier syrien, Mikhaïl Bogdanov, est allé dans le même sens, avant que son pays ne fasse marche arrière.
Pour Rami Abdel Rahmane, directeur de l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), plusieurs hypothèses expliquent cette avalanche.
"Soit il y a le début d'un consensus international pour mettre fin au régime, soit des pays occidentaux sont en contact avec un groupe important et influent dans l'armée qui pourrait se retourner contre Assad, soit ils accentuent les pressions afin de pousser Assad vers la sortie pour éviter un effritement total de l'Etat", explique-t-il.
"Pression psychologique"
Mais pour cet observateur, dont l'organisation dispose d'un important réseau de militants sur le terrain, "l'armée reste très forte, elle est toujours capable de protéger une large portion du territoire allant de Damas au littoral".
Certes, l'appareil militaro-sécuritaire, longtemps omniprésent, s'est nettement érodé et la multiplication des attentats à Damas démontre que la Sécurité est moins fiable qu'auparavant.
"C'est certain que les rebelles ont avancé et se montrent audacieux, mais pour le moment, l'armée garde globalement sa cohésion et défend les grandes villes", note un expert militaire occidental à Beyrouth.
"Malgré les désertions et les morts, elle compte encore 200.000 hommes, de toutes les confessions, et n'a pas engagé toutes ses unités dans les combats. Elle se conduit comme un véritable corps, avec une mission", ajoute-il.
"Elle se sentait mal à l'aise au début de la contestation quand on lui demandait de tirer sur des civils désarmés. Mais aujourd'hui, elle n'a plus d'états d'âme face à des hommes armés", assure-t-il.
Présenté il y a encore deux ans comme l'ouverture moderniste pour le pays, M. Assad est devenu un paria alors que ses adversaires rassemblés dans la Coalition de l'opposition ont été adoubés par la centaine de pays et d'organisations des "Amis du peuple syrien".
Mais son régime peut compter sur ses trois alliés, l'Iran, la Chine et la Russie, ces deux derniers opposant leur veto à toute résolution le condamnant au Conseil de sécurité de l'ONU.
Selon un spécialiste, qui ne veut pas être identifié car il retourne régulièrement en Syrie, les déclarations diplomatiques "prouvent que les négociations ont véritablement commencé entre les États-Unis et la Russie pour trouver une solution à la crise. Il s'agit d'exercer une pression psychologique pour obliger le régime à envisager des compromis douloureux".
Mais ces annonces peuvent être contre-productives, car si la chute du régime n'intervient pas dans les semaines à venir, "il pourra prétendre qu'il est assez fort pour ne pas céder", estime-t-il.