La Russie devance nettement la France (5,6 milliards de dollars) ou l’Allemagne (4,6 milliards).
Deuxième fournisseur d'armes de la planète, avec la Chine et l'Inde mais aussi la Syrie parmi ses gros clients, la Russie a connu ces dernières années un essor spectaculaire de ses exportations d'équipements militaires, qui atteignent des niveaux record.
Selon le quotidien Kommersant jeudi, la Chine, qui se fournit pourtant de moins en moins à l'étranger, a signé un accord cadre avec Moscou pour que les deux pays construisent ensemble quatre sous-marins à propulsion diesel Amour.
Le coût total est estimé à deux milliards de dollars.
L'Inde serait également prête à acheter six exemplaires. New Delhi, premier importateur d'armes de la planète et principal client de l'industrie militaire russe, s'est déjà engagé en octobre pour près de 1.000 moteurs destinés à des
avions de chasse Soukhoï, ce qui représente selon le journal Vedomosti jeudi près de cinq milliards de dollars, un montant inédit pour un seul contrat depuis la chute de l'Union soviétique.
Moscou a aussi cette année arraché un contrat de 4,2 milliards de dollars avec l'Irak, composé selon la presse russe de 30 hélicoptères Mi-28 et de 42 systèmes de missiles sol-air Pantsir-S1. Bagdad a cependant annoncé depuis vouloir le renégocier.
Vladimir Poutine a annoncé lundi que les livraisons du pays dépasseraient 14 milliards sur l'année 2012, du jamais vu. "Nos objectifs sont donc dépassés", s'est félicité le président russe.
Les nouveaux contrats signés cette année (pour des livraisons ultérieures) représentent, eux, plus de 15 milliards de dollars.
En 2011, les livraisons avaient atteint 13,2 milliards de dollars, un montant déjà record et plus du double des montants du début des années 2000.
Des responsables russes avaient pourtant estimé que les changements de régime dans le monde arabe, en Libye notamment, représentaient un manque à gagner de quatre milliards de dollars.
A ce niveau, la Russie reste loin derrière les Etats-Unis, qui a vendu pour plus de 25 milliards de dollars d'armes en 2012, selon les estimations du Centre russe d'analyse du commerce international d'armes (Tsamto).
Mais elle devance nettement la France (5,6 milliards de dollars) ou l'Allemagne (4,6 milliards).
La croissance des exportations russes suit une tendance mondiale. Selon une étude de l'Institut international de recherche pour la paix de Stockholm (Sipri) publiée en mars, le volume des transferts d'armes à travers le monde
sur la période 2007-2011 a été 24% plus élevé que sur la période 2002-2006, en raison d'une forte demande en Asie.
Mais elle correspond aussi à une reprise en main de l'industrie de la défense par l'Etat russe au plus haut niveau.
"Une gestion directe du commerce d'armes par la présidence a été mise en place", explique Igor Korotchenko, directeur du centre Tsamto.
"Poutine a une image de leader fort, c'est bon pour nos exportations. Les acheteurs font confiance à la Russie parce qu'ils savent qu'on leur apportera des services et des pièces de rechange jusqu'à la fin de l'exploitation, contrairement aux Etats-Unis qui sanctionnent parfois les pays acheteurs" pour des raisons politiques, poursuit ce spécialiste, citant le Pakistan.
De fait, Vladimir Poutine a orchestré la modernisation du secteur, placé en partie sous la tutelle de la société publique Rostekhnologuii.
C'est le cas par exemple du producteur du célèbre fusil d'assaut Kalachnikov, Ijmach, qui a connu un bond de 60% de ses exportations sur les neuf premiers mois de l'année.
Le fabricant, pourtant réputé en difficulté sur son marché intérieur, a expliqué avoir simplifié sa structure. Le Kremlin a récemment décidé de le fusionner avec un autre fabricant d'armes, Ijmekh.
Vladimir Poutine a appelé lundi l'industrie à "s'attaquer à de nouveaux marchés" et mettre l'accent sur "la réparation et la modernisation" des équipements.
Pour le spécialiste des questions militaires Alexandre Golts, rédacteur en chef adjoint du site d'information ej.ru, la hausse des exportations s'explique surtout par la réticence des entreprises à vendre à l'armée russe.
"Les contrats à l'étranger, ce sont des sommes plus importantes, des acheteurs qui payent en totalité et à temps", explique-t-il.
"Avec le temps, les exportations russes vont diminuer. Ce que nous livrons actuellement sert à moderniser les équipements soviétiques des années 80, qui vieillissent et que rien ne vient remplacer", prévient-il.