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Langue arabe : Entre la fierté du passé et l’inquiétude de l’avenir

Langue arabe : Entre la fierté du passé et l’inquiétude de l’avenir

Signe de crise: c’est en France et non dans un pays arabe qu’a été organisée la 1ère journée mondiale de la langue du Coran.

"Le 18 décembre 1973, l'Assemblée générale des Nations Unies faisait de l'arabe une de ses langues officielles et de travail. Près de 40 ans plus tard, nous célébrons ce pouvoir de la langue arabe à nous rassembler autour de valeurs partagées, à donner de la force à nos idées et de l'amplitude à nos ambitions, au service de la paix et du développement durable", déclare ce mardi 18 Décembre 2012,  la directrice générale de l'UNESCO, Mme Irina Bokova, dans son message à cette occasion.

Célébrée au siège parisien de l'institution onusienne, ce premier hommage mondialement reconnu a vu l'organisation de deux séminaires traitant de "la langue arabe et sa relation avec les autres langues" et "le mécanisme d'expansion et de promotion de la langue arabe".

De hautes figures spécialistes de cette science linguistique qu'est l'arabe se sont succédé au  micro.
Les ambassadeurs libyen, égyptien, saoudien et marocain à l'Unesco, mais aussi des professeurs, orientalistes, journalistes ont tous insisté sur l'importance passée, présente et future de l'influence de la langue arabe dans le monde.

Irina BokovaMme Bokova relevait à ce propos qu' « il s'agit de célébrer les richesses d'une langue parlée par plus de 422 millions de personnes dans le monde arabe et utilisée par plus d'un milliard et demi de musulmans à travers 22 Etats membres de l'UNESCO".

Cette langue sémitique, vieille de près de deux millénaire a vu son expansion grandissante de part d'abord son aspect religieux et spirituel mais aussi par le commerce. Les caravanes parcouraient le monde et les échanges débutèrent.

A ce sujet, Monsieur Ali Azar Shab, professeur d'université et expert dans les relations linguistiques entre l'arabe et le perse a souhaité couper court à tout ce qui se dit sur l'expansion par la force de cette langue au delà de ses frontières.
Il a insisté sur le fait que pas un texte, rien, ne stipule que l'arabe ait un jours été imposé aux peuples voisins ou éloignés.
Des propos similaires ont été tenus par monsieur Faraj Maatoug, expert en Tunisie des relations linguistiques entre l'arabe et le swahili, langue Bantu de l'Est de l'Afrique. Il réfute toute forme d'hégémonie ou de domination par la force de l'arabe, mais parle de réelle complémentarité entre les différentes langues et cultures.

Aujourd'hui, selon Christian Lochon, orientaliste au centre Ghazali de Paris, la langue arabe est entrée dans les dictionnaires de nombres de pays occidentaux, tels que la France, l'Espagne, l'Italie aussi bien dans les termes topologiques que scientifiques, astronomiques, gastronomiques ou encore médicinaux.

C'est en montrant tout ces aspects et bien d'autres encore, que l'assemblée s'est entendue sur ce point essentiel qu'est cette diversité et force culturelle que représente l'arabe d'antan et d'aujourd'hui.

Mais lors du deuxième symposium, les intervenants ont levé le pied...
L'arabe doit préserver son identité, l'arabe doit pouvoir s'adapter et être à la hauteur du nombre croissant d'apprenants à travers le monde.

Pour Abdou Mazen, journaliste libanais d'Al Hayat, « l'arabe est resté, il est vrai, la plus préservée de toutes les langues », mais il a évolué, s'est enrichit parfois, mais s'est appauvri aussi.
 Et un déséquilibre dramatique s'est installé entre les termes utilisés et les dictionnaires.
Même la grammaire est essoufflée.
M. Wazen déplore qu'aujourd'hui la maîtrise réelle de la langue est un véritable luxe dont quelques personnes seulement peuvent se targuer.
Des fautes graves de langues s'immiscent dans la presse, la TV, la politique, l'enseignement... Partout.
D'autant plus que dans de nombreux pays arabophones comme  l'Algérie, la Tunisie, le Liban ou encore certains pays du golfe arabique, la langue arabe est mélangé avec l'anglais ou le français.

Un autre volet, tout aussi dramatique est venu appuyé cette réalité.
Et c'est le Directeur de l'Observatoire Européen pour la Réhabilitation de l'apprentissage de l'arabe, M. Ahmed Dabbabi qui a pointé du doigt un manque crucial dans ce domaine.

En effet, en France notamment, les cours d'arabe pourtant autorisés à être dispensés dans les écoles ne représente en 2011/2012 pas plus de 124 élèves en primaire.
Les apprenants se tournent alors auprès d'autres structures pour apprendre la langue mais les enseignants s'improvisent professeurs et n'ont aucune spécialisation en matière d'éducation.

Ainsi, M. Abdullah Aloma, secrétaire générale du Centre « King Abdallah International » pour l'apprentissage de la langue arabe, créé à l'initiative de plusieurs université arabes, annonce un certain nombre de projets en vu de pallier à cette dure réalité.

La remise de prix aux institutions arabes et aux experts pour promouvoir la langue: mettre en place une batterie de tests arabes équivalents au TOFEL, rechercher une base de données et un programme pour l'enseignement, et pourquoi pas instaurer « un mois de la langue arabe », sont tout autant d'idées pour préserver la force de la langue de notre Saint Prophète Mohamed (pslf).

La conférence prend fin, nous sommes conviés au déjeuner multiculturel mais une femme parmi les participants insiste pour prendre la parole.

« Améliorer l'apprentissage et préserver notre langue est une chose, mais au jour d'aujourd'hui, notre monde est en guerre fratricide, pourquoi ne pas aussi enseigner à nos enfants le respect et l'amour de son prochain, pour que cette langue de l'Islam ait une vraie valeur, et retrouve son caractère initial, celui de la paix  ??? ».

A bon entendeur salut!

 

 Eline Briant