Pourquoi est-il plus facile de se faire embaucher au Danemark qu’en Suède
Chaque matin, la gare centrale de Copenhague grouille de milliers de Suédois, pressés de rejoindre un travail qu'ils n'ont pas trouvé dans leur pays.
Ces travailleurs, le plus souvent originaires de Malmö à quelque 40 kilomètres à l'est de la capitale danoise, sont d'accord sur un point: il est plus facile de se faire embaucher au Danemark qu'en Suède.
"Ici, vous pourriez simplement parler aux employeurs pour voir s'ils embauchent. En Suède, on a besoin de plus de contacts pour trouver un boulot", a affirmé à l'AFP Denny Crona, un vendeur de 25 ans qui travaille à l'aéroport de Copenhague et fait la navette (30 minutes) depuis plus de quatre ans.
Avant la crise, les vertus du modèle danois qui combine flexibilité pour les employeurs, qui peuvent recruter ou licencier du personnel facilement, et sécurité pour les travailleurs, qui reçoivent des indemnités généreuses, ont été plébiscitées pour avoir quasiment éradiquer le chômage.
Le système se distingue nettement de ceux de ses voisins suédois et allemand, où les licenciements sont souvent coûteux et laborieux.
La logique danoise est simple: si les chômeurs reçoivent des indemnités généreuses et peuvent suivre des formations, payées par l'état alors ils seront alors moins susceptibles d'exiger une forte sécurité de l'emploi.
La flexsécurité a attiré l'attention de toute l'Europe, en particulier des pays en proie à un taux de chômage des jeunes élevé. En 2012, le législateur italien s'est inspiré du Danemark avant d'adopter une loi facilitant les licenciements et modernisant le régime d'indemnisation.
Mais au Danemark, le modèle ne fait plus recette. En période de croissance quasi nulle, avec un système bancaire ébranlé par l'effondrement du marché immobilier, la classe politique cherche à l'adapter.
Avec un taux de chômage de 6,3%, le Danemark se démène pour trouver des emplois à des milliers de personnes bientôt en fin de droits.
En 2010, le précédent gouvernement (centre-droit) avait réduit de moitié la durée des allocations chômage, passée de quatre à deux ans, renonçant en partie à la composante "sécurité" du modèle/système.
Selon la députée sociale-démocrate Trine Bramsen, les coupes budgétaires représentent un défi pour la flexsécurité mais les statistiques montrent que la plupart des chômeurs qui trouvaient un emploi à l'issu des quatre ans en trouve un après deux ans.
"Ce n'est dans l'intérêt de personne d'être en dehors du marché du travail pendant une longue période". "Nous préférons offrir à ces personnes la possibilité de se former" pour changer d'orientation professionnelle, a-t-elle affirmé.
L'actuel gouvernement (centre gauche) a décidé que toute personne dont les indemnités sont sur le point d'expirer se les verra prolonger de six mois si elle suit une formation.
Pour l'opposition, c'est une manœuvre destinée à dissimuler l'échec des autorités et du secteur privé à créer des emplois.
En octobre, le gouvernement a conclu un accord avec la Confédération des employeurs danois pour créer 12.500 emplois réservés aux chômeurs en fin de droits, a indiqué Mme Bramsen. Jusqu'à présent, peu de postes ont été créés.
Pourtant, sans flexsécurité, le taux de chômage aurait pu être encore plus élevé qu'il ne l'est aujourd'hui, a indiqué à l'AFP le directeur du Centre de Recherches sur le Marché du Travail de l'Université de Copenhague, Soeren Kaj Andersen.
"Le nombre d'emplois qui ont disparu au Danemark pendant la crise a été plus élevé que dans le reste de l'Europe du Nord, mais c'est le cas aussi pour le nombre d'emplois créés", a-t-il dit.
Mais le directeur-général de think-tank libéral CEPOS, Martin Aagerup, estime que peu d'éléments indiquent qu'un niveau élevé de dépenses pour l'indemnisation et la formation professionnelle est nécessaire pour atteindre ces résultats.
Ainsi, la Grande-Bretagne a un niveau élevé de mobilité et historiquement un taux de chômage relativement bas, mais sans grandes dépenses publiques, a-t-il relevé.
"Rien n'indique que vous ne pouvez pas apporter des modifications à un paramètre (les indemnités) sans changer l'autre (la mobilité de la main d'œuvre)", a-t-il conclu.