Certains milieux n’hésitent pas à dire que le patriarche Raï est un successeur potentiel au pape démissionnaire.
L’annonce par le pape Benoit XVI de sa démission à partir du 28 février s’est accompagnée par un net recul des critiques contre la visite de Mgr Béchara Raï à Damas, qui sont restées limitées et sans réel impact sur l’opinion publique chrétienne qui, dans son ensemble, a semblé appuyer l’initiative du patriarche maronite.
La tentative du secrétaire général du 14-Mars, Farès Souhaid, de déclencher une campagne contre Mgr Raï a ainsi échoué, surtout que les principales formations chrétiennes de cette coalition ont gardé un silence embarrassé.
A cet égard, Nicolas Nassif du quotidien Al Akhbar écrit que la visite patriarcale à Damas «n’a pas été perçue comme provocatrice ni par le parti des Kataëb, ni par les Forces Libanaises». Estimant que le patriarche était «à l’aise» après ce déplacement, le journaliste ajoute que le prélat n’aura finalement pas fait un «pari perdant». «Tout le monde a suivi avec grand intérêt la visite. Mais le plus important, c’est que les chrétiens, et les maronites en particulier, sachent qu’il existe d’autres chrétiens et maronites ailleurs qu’au Liban, et en Syrie aussi», a-t-il dit.
Même si Bkerké donne une dimension œcuménique et pastorale à ce déplacement, An Nahar estime que la visite s’inscrit dans le cadre du «positionnement politique» de Mgr Raï. «Son action politique depuis qu’il a accédé au patriarcat n’a fait qu’apporter de l’eau au moulin du 8 Mars et du régime en Syrie», écrit Ali Hmadé.
Concernant la démission de Benoit XVI, la question qui se pose aujourd’hui est celle de savoir qui va lui succéder sur le trône de Saint-Pierre. Les analystes estiment que l’élection d’un prélat du Sud de préférence à un Occidental n’est pas cette fois exclue, qu’il soit latino-américain, africain ou asiatique, voire même originaire de l’Orient. Dans ce cadre, certains milieux n’hésitent pas à dire que le patriarche Raï est un successeur potentiel, à un moment où les chrétiens d’Orient traversent des moments difficiles, qui mettent en péril leur présence même sur leurs terres ancestrales.
Le vaticaniste Marco Politi estime que la décision du pape de partir à cause de son âge aura «beaucoup d’influence sur le choix d’un nouveau pape», surtout que l’Église «a besoin» de faire de la place aux jeunes.
Or, un certain nombre de cardinaux jeunes et prometteurs proviennent du sud du monde. Plusieurs candidats occidentaux proches du pape allemand, théologiens et intellectuels, ont quelques chances, selon les connaisseurs du Saint-Siège, même si le simple fait d’être occidental, européen ou encore plus italien est un handicap aux yeux de certains cardinaux venus des Églises du Sud, en plein essor.
Le cardinal québécois Marc Ouellet, préfet de la Congrégation pour les évêques, le cardinal Angelo Scola, archevêque de Milan et théologien très apprécié du pape, ont été les plus souvent cités ces derniers temps dans le jeu des pronostics. Un Américain est parfois cité: le cardinal de New York Timothy Dolan. Parmi les Africains, le cardinal ghanéen Peter Turkson, à la tête du conseil pontifical «Justice et Paix», et le cardinal nigérian John Onaiyekan, qui prêche pour la coexistence pacifique entre chrétiens et musulmans, pourraient tenir la corde. Il serait logique que l’Amérique latine, continent où se trouvent le plus grand nombre de catholiques, soit récompensée.
Médiarama